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Titre De la réparation des "gueules cassées" à la "sculpture du visage" - La naissance de la chirurgie esthétique en France pendant l'entre-deux-guerres
Auteur Nicolas Guirimand
Mir@bel Revue Actes de la recherche en sciences sociales
Numéro no 156-157 mars 2005 La spécialisation de la médecine
Rubrique / Thématique
La spécialisation de la médecine XIXe-XXe siècles
Page 72
Résumé C'est au lendemain de la Première Guerre mondiale, avec la réparation des « gueules cassées », que s'ébauche une chirurgie réparatrice intégrant à ses finalités la dimension de l'esthétique. Pendant l'entre-deux guerres, celle-ci se construit dans plusieurs espaces spécialisés du champ médical (services de chirurgie constructrice, d'ORL, d'orthopédie), tandis que sont mises au point des techniques (lifting, rhinoplastie, mammoplastie...) qui vont rendre possible l'émergence d'une chirurgie esthétique « pure », alors même que se développe un marché de la lutte contre le vieillissement. Si, à ses débuts, la chirurgie esthétique doit compter avec la concurrence des thérapeutiques de rajeunissement endocriniennes (greffes de testicules et de thyroïdes de singes sur l'homme), le discrédit qui frappe ces traitements à la fin des années 1920 lui permet de dominer ce marché. Le nombre de chirurgiens s'adonnant à des interventions de chirurgie esthétique « pure » augmente notablement jusqu'à la veille de la Deuxième Guerre mondiale, mais ceux qui s'y consacrent à titre exclusif restent l'exception. Parce que leur pratique ne bénéficie que d'une très faible légitimité aux yeux de la majorité des chirurgiens qui critiquent sa « futilité », les promoteurs de la chirurgie esthétique « pure » doivent s'attacher à la justifier en mettant en avant les bénéfices psychologiques et sociaux que leurs patient(e)s tirent des interventions. C'est ainsi qu'on verra le docteur Raymond Passot légitimer la correction des « disgrâces » au nom de la prévention du suicide et surtout du traitement des névroses. Tandis que Suzanne Noël, tout en inscrivant la chirurgie esthétique dans le combat féministe, lui assignera un rôle social comme facteur favorisant l'intégration ou le maintien dans certains secteurs d'activité professionnelle.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Résumé anglais It is just after the First World War, with the repair of facially injured veterans, that a reparative surgery taking the aesthetic aspect into account begins to arise. During the period between the two Wars it develops in several specialized areas of the medical field (in constructive surgery, orthopaedics, ENT) while techniques are being perfected (lifting, rhinoplasty, mammoplasty...) that will make it possible for a “pure” plastic surgery to emerge at the very time a market against aging is developing. If, in its beginnings, plastic surgery must face the competition of endocrinal rejuvenation therapies (monkey testical and thyroid transplants on man), the discredit falling upon these latter practices in the late 1920's makes way for the former to dominate the market. The number of surgeons doing “pure” plastic surgery operations grows notably up to the eve of the Second World War, but those devoting themselves entirely to these remain few. Because their practice is not held in great esteem by the majority of surgeons who criticize its futility, those who promote “pure” plastic surgery must strive to justify it in insisting on the social and psychological benefits their patients get from such operations. It is thus that Doctor Raymond Passot will be seen to justify the correction of “blemishes” in the name of suicide prevention and especially in that of the treatment of neuroses. At the same time Suzanne Noël, as well as enrolling plastic surgery in the feminist struggle, will asign it a social role as a factor facilitating integration and staying power in certain sectors of professional activity.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Article en ligne http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=ARSS_156_0072