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Titre Le sens du jeu. Aragon entre littérature et politique (1958-1968).
Auteur Philippe Olivera.
Mir@bel Revue Actes de la recherche en sciences sociales
Numéro no 111-112 mars 1996 Littérature et politique
Rubrique / Thématique
Littérature et politique
Résumé Le sens du jeu À la différence des années 50 où la guerre froide conduisait les écrivains communistes à multiplier les signes de rupture avec le champ littéraire, le contexte de la déstalinisation dans les années 60 desserre la contrainte politique et autorise le «retour» dans le champ. Cet article s'attache au cas de Louis Aragon, le plus doté des écrivains communistes, celui dont le parcours et l'oeuvre légitiment les plus hautes ambitions au sein du champ littéraire, comme le montre le succès de son roman La Semaine sainte en 1958. Refusant l'approche qui postule l'aberration de l'engagement communiste des écrivains, il s'agit de montrer à la fois les difficultés et la possibilité d'une double appartenance au champ littéraire et au monde communiste. Par le repli sur les Lettres françaises qu'il dirige et dont la position intermédiaire recoupe très exactement la sienne, comme par l'usage à la fois politique et littéraire de la théorie du «réalisme», Aragon négocie une délicate opération : il parvient à occuper une position centrale dans le champ tout en conservant ses responsabilités au sein du Parti. Après 1965, il semble obtenir la consécration tout en niant les systèmes d'oppositions construits par l'histoire du champ : poète et romancier, romancier grand public et romancier d'avant-garde, poète national et poète surréaliste... Le retour brutal de l'actualité politique, lié aux événements de 1968, à Paris et à Prague, vient remettre en cause le fragile équilibre qu'il a construit entre littérature et politique. Le cas Aragon dans les années 60 montre la force de la contrainte imposée par la double appartenance. Il révèle aussi la forme de liberté d'écriture induite par ce qui est aussi une double extériorité.
Résumé anglais A sense of game Contrary to the 1950s, when the Cold War led communist writers to multiply the signs of their break with the literary field, the 1960s destalinization eased the political pressure and authorized a "return" to the field. This article focuses on Louis Aragon, the most gifted of the communist writers, whose itinerary and work legitimize the highest ambitions in the literary field, as shown by the success of his 1958 novel La Semaine sainte. Rejecting an approach that postulates the aberration for a writer of a communist engagement, the author of this article attempts to show the difficulties and the possibility of belonging to both the literary and the communist worlds. By withdrawing into the Lettres francaises, which he edited and whose intermediary position accurately reflects his own, and by the both political and literary use of the theory of "realism", Aragon negotiated a slippery path and succeeded in occupying a central position in the field while conserving his responsibilities in the Party. After 1965, he seems to have won recognition while rejecting the systems of opposition constructed by the history of the field : poet and novelist, popular and avant-garde novelist, national and surrealist poet... The sudden renewed relevance of politics, linked with the 1968 events in Paris and Prague, threatened the fragile balance he had constructed between literature and politics. The case of Aragon in the 1960s shows just how confining this double affiliation was, while revealing the way in which he was freed to write by what was also a twofold exteriority.
Article en ligne http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arss_0335-5322_1996_num_111_1_3169