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Titre "L'ouvrière, mot impie, sordide."
Auteur Joan W. Scott
Mir@bel Revue Actes de la recherche en sciences sociales
Numéro vol. 83, no. 1, 1990 Masculin/féminin-1
Rubrique / Thématique
Masculin/féminin-1
Page 2-15
Résumé "L'ouvrière, mot impie, sordide..." Les effets du développement industriel sur la société française, notamment le bouleversement qui en résulte pour la division traditionnelle des rôles entre les sexes, ont donné lieu à la production d'une importante littérature au 19e siècle, tant chez les économistes, les socialistes que chez les moralistes. On y voit la place importante que tient le thème de l'ouvrière, dans les principaux débats de l'époque, sur la pauvreté, les salaires, les métiers, la famille. Ce thème est lié à une représentation (essentiellement masculine) de la féminité comme un état "naturel" de dépendance à l'égard de l'homme : la place "naturelle" de la femme étant au foyer, le seul travail qui lui convient en dehors des tâches domestiques doit être compatible avec ses aptitudes naturelles, féminines, et surtout ne doit pas la détourner de son foyer. L'ouvrière d'usine ne peut donc être considérée que comme un "travailleur imparfait" de l'industrie vouée à un salaire inférieur à celui de l'homme (le seul à participer au processus de production et à pouvoir toucher un salaire suffisant pour assurer la reproduction familiale), salaire féminin insuffisant pour compenser le désordre et les troubles engendrés par son absence au foyer lorsqu'elle est mariée et synonyme de pauvreté et de prostitution lorsqu'elle est une femme isolée, cas extrême de déviance sociale, économique et morale qui, en tant que cristallisation de tous les désordres créés par l'industrialisation, concentre les préoccupations des penseurs de l'époque.
Source : Éditeur (via Persée)
Résumé anglais A Woman's Place. The effects of industrial development on French society, in particular the resulting upheaval in the traditional division of roles between the sexes, gave rise to an abundant literature in the 19th century, both among economists and socialists and among moralists. In it can be seen the important place held by the theme of the female factory worker in the main debates of the period, on poverty, wages, crafts, and the family. This theme is linked to an (essentially male) representation of femininity as a "natural" state of dependence on man. Since woman's "natural" place is in the home, the only work appropriate for her apart from housework must be compatible with her natural, female, attributes, and above all must not turn her away from the home. The female factory worker can therefore only be regarded as an "imperfect" worker in industry, to be paid a lower wage than a man (who alone takes part in the production process and is entitled to a wage sufficient to ensure the reproduction of his family). This female wage is not enough to compensate for the disorder and disturbance resulting from her absence from the home if she is married and is synonymous with poverty and prostitution if she is an isolated woman - the extreme case of social, economic and moral deviance, which crystallizes all the disorders created by industrialization and on which the preoccupations of the thinkers of the time are focussed.
Source : Éditeur (via Persée)
Article en ligne http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arss_0335-5322_1990_num_83_1_2932