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Revue Nordiques Mir@bel
Numéro N°32, automne 2016
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Éditorial

    accès libre
  • Dossier. Islande : sortie de crise ?

    • Islande : entre succès économiques et crises politiques et sociales - Michel Sallé p. 11 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      En avril 2013, la majorité de gauche subit une déroute électorale sans précédent malgré une sortie de crise saluée de toutes parts pour sa rapidité. Plusieurs raisons, dont une est essentielle : ce gouvernement n'a pas répondu aux attentes de refonte des institutions pour notamment donner la parole à des citoyens convaincus d'être les véritables auteurs du redressement par leur dynamisme et leur cohésion. La nouvelle majorité, le plus souvent au pouvoir avant la crise, fait comme si celle-ci n'avait pas existé, s'approprie les bons résultats de ses prédécesseurs et sait les amplifier par une politique uniquement attentive à la résorption des dettes publiques et privées, mais d'où est exclue toute ambition sociale ou sociétale de changement. En dépit d'incontestables succès économiques, la très rapide désaffection du gouvernement est accompagnée de conflits sociaux qui témoignent d'une exaspération croissante, confirmée politiquement par l'enthousiasme pour les Pirates. La majorité élue le 29 octobre 2016 saura-t-elle associer à son action des citoyens qui, compte tenu de l'abnégation et la solidarité dont ils ont fait preuve face à la crise, ne demandent rien d'autre qu'être pris au sérieux ?
      In April 2013, the left wing majority was under unprecedented electoral defeat, despite the end of the financial crisis honored from all sides for its speed. Several reasons exist, but essentially the government did not respond to the recast of expectations, particularly to give voice to citizens who believed to be the true actors of recovery by their dynamism and cohesions.The new right wing majority, mostly in power before the crisis, acted as if it had not existed but took credit for the positive results of its predecessors and launched a careful policy in dealing with public and private debts, but which has ignored any social or societal ambition for change. Despite undeniable economic success, the government has quickly lost public support and had to deal with social conflicts showing an increasing exasperation, politically confirmed by the enthousiasm for the “Pirates”. Will the majority elected in October 29, 2016 respond to the desires of the citizens who, because of the selflessness and solidarity they have shown during the crisis, demand nothing else than being taken seriously?
    • Political turmoil in Iceland - Stefán Ólafsson p. 29 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La crise financière de 2009 a complètement bouleversé la politique islandaise. La crise est le résultat d'expérimentations néolibérales, qui ont produit une bulle financière entre 2003 et 2008. La première réaction politique à ce choc est un virage important à gauche en 2009, à la suite de mouvements de protestation dans les rues de Reykjavík. En 2013, les électeurs ont manifesté leur déception à l'égard du gouvernement de gauche et porté au pouvoir le parti du centre en coalition avec les conservateurs (Parti de l'indépendance). Avec les élections anticipées d'octobre 2016, à la suite des révélations des « Panama Papers », on constate un mouvement centripète vers la droite et la gauche. Un nouveau parti de droite (Redressement), le Parti pirate et la Gauche Verte sont les principaux bénéficiaires. Les Pirates portent une ambition de réforme démocratique, de transparence, de lutte contre la corruption et les inégalités. À l'instar du parti libéral Redressement, c'est un mouvement qui se démarque clairement des partis populistes aujourd'hui en forte croissance dans le contexte d'une Europe marquée par les crises. Le changement politique se poursuit donc avec de grandes fluctuations et de nouveaux partis pour la troisième élection de suite.
      The financial crisis of 2008 upset Icelandic politics extensively. The crisis was a result of a neoliberal experiment, which produced an excessive bubble economy between 2003 and 2008. The first political reaction to the crisis was a major swing to the left in 2009, following extensive protests in the streets of Reykjavík. In 2013 voters were disappointed with the left government and a major swing to the centrist Progressive Party emerged. They formed a centre-right government with the Conservatives (IP). With early elections in October 2016, due to revelations from the Panama Papers, there is now a bi-polar swing to the right and left, but away from the center. A new party on the right-wing (Viðreisn) and the Pirate Party and Left-Greens on the left-wing are the major victors. The Pirates stand for democratic reform and increased transparency against political corruption and inequality. They are decisively different from the populist right parties, which have featured strongly in Europe in recent years. So is the new liberal party (Viðreisn). The political turmoil with big swings and new parties continues for the third elections in a row.
    • La dramatisation de l'idée de l'Islande dans les médias contemporains - Daniel Chartier p. 43 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      S'appuyant sur l'hypothèse qu'un « lieu » se construit par la dynamique entre son existence matérielle et la somme des discours qui portent sur lui, cet article a comme objectif d'étudier l'image de l'Islande dans la presse étrangère de langues française et anglaise dans le contexte de l'« après-crise » de 2008. Il apparaît que l'image de l'Islande se construit, de l'extérieur, entre un discours pérenne qui s'appuie sur sept paradigmes principaux (l'Islande serait ainsi étrange, merveilleuse, lointaine, violente et depuis peu : progressiste, égalitaire et écologiste) et des débats mondiaux où l'Islande agit discursivement, en pure rhétorique, dans des prises de position liées aux intérêts des différents lectorats des journaux étrangers. Certaines crises médiatiques mettent ponctuellement le fonds discursif positif de l'Islande à l'épreuve. Durant la période analysée (soit entre 2014 et 2016), des débats sur la croissance exponentielle du tourisme, le Brexit, l'Euro 2016, et les « Panama Papers » créent une tension dramatique entre ces enjeux et le fond commun du discours sur l'Islande, qui permet de circonscrire la perception de ce pays à l'étranger.
      Based on the hypothesis that a “place” is built by the dynamic between its material existence and the discourse on it, this article aims to study the image of Iceland in English and French foreign press in the context of the «post-crisis» of 2008. It appears that the image of Iceland is built, from the outside, from a perennial discourse based on seven main paradigms (Iceland as a strange, wonderful, distant, violent, and recently: progressive, egalitarian and environmentalist place) and global debates in which Iceland is discursively used to strengthen positions of interest to the different readerships of foreign newspapers. Some media crises promptly put the positive discursive image of Iceland to the test. During the analysed period (between 2014 and 2016), debates on the exponential growth of tourism, Brexit, Euro 2016, and “Panama Papers” create a dramatic tension between these issues and the common positive discourse on Iceland, which allows to better understand the perception of this country from abroad.
    • La politique islandaise piratée ? - Lionel Cordier p. 61 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Depuis 2008, l'Islande a été le théâtre de plusieurs crises politiques majeures. Suite à la crise économique et à la démission du gouvernement, des élections anticipées ont placé pour la première fois dans l'histoire du pays une coalition de gauche au pouvoir en avril 2009. Plus récemment, au printemps 2016, les scandales des « Panama Papers » ont fortement touché la classe politique islandaise et le gouvernement formé par le Parti du progrès et le Parti de l'indépendance, entre-temps revenus aux affaires en 2013. Mais ces évènements sont les symptômes de changements bien plus profonds dans la vie politique islandaise, que l'émergence du Parti pirate islandais permet de mieux éclairer. Né trois ans après la « révolution des casseroles », ce parti bénéficie toujours d'une grande popularité et a obtenu un nombre de sièges important aux dernières élections parlementaires d'octobre 2016, bien que pas autant qu'il était anticipé. En couplant un discours à vocation internationale sur les enjeux du Web et de la transparence à un discours sur les défis socioéconomiques de l'Islande, le parti semble avoir attiré de larges franges de l'électorat jeune et populaire. Il bénéficie également des spécificités sociales et politiques de l'île, moins touchée par la montée des droites radicales que le reste de l'Europe du Nord.
      Since 2008, Iceland has been the scene of several major crises. Following the economic crisis, the government's resignation and early elections in April 2009, the country has been run with a historic left-wing coalition government. Most recently in May 2016 the “Panama Papers” scandal has greatly affected the Icelandic political class and the government formed by the Progressive Party and the Independence Party, which had returned to power in 2013. But these events are the symptoms of many deeper changes in Icelandic politics that led to the emergence of the Icelandic Pirate party. Born three years after the Kitchenware revolution, the party now enjoys great popularity and audience and got a significant number of seats in the parliamentary elections of October 2016. By coupling an internationally oriented discourse on issues of the Internet and transparency with the socio-economic challenges of Iceland, it seems to have attracted broader segments of young and low-class voters. The party also enjoys social and political specificities of the island, less affected by the rise of right-wing populism than the rest of northern Europe.
    • De la crise au rêve ? Transformation de l'image touristique de l'Islande en France depuis la crise financière de 2008 - Gaëlle Reneteau-Metzer p. 77 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'Islande n'est plus une destination insolite ou rare. Depuis quelques années, en particulier en France, l'Islande est une destination phare. Pour preuve, pas moins de trente-cinq agences de voyages proposent aux voyageurs français un séjour sur l'île. Le site de l'Office national du tourisme islandais est ainsi disponible en douze langues, en plus de l'islandais. L'activité touristique est devenue une véritable industrie. Le désir d'évasion est stimulé dans toutes les brochures : des paysages sans hommes, des geysers dans un ciel bleu limpide, des chutes toutes plus vertigineuses les unes que les autres, des églises dans la brume, des plages de sable noir. En partant d'exemples pris dans les médias imprimés et, plus particulièrement, en examinant un corpus de publications telles Géo et National Geographic France qui sont largement diffusées, cet article propose de réfléchir sur les images que veut donner l'île pour accroître son tourisme et celle renvoyée par la presse française spécialiste des destinations étrangères. Nous cherchons ainsi à capturer le changement profond qui, dans une période de crise, et par-delà les effets d'aubaine, a contribué au développement de cette vogue islandaise.
      Iceland is not an unusual or uncommon destination. In recent years, particularly in France, Iceland has become a popular destination. As evidence, no less than thirty-five travel agencies offer French travelers to stay on the island. The website of the Icelandic National Tourism Office is available in twelve languages in addition to Icelandic. The tourism business has become an industry. All the tourist information stimulates the desire to escape: desert landscape, geysers bursting in a clear blue sky, waterfalls each time more dramatic, churches in the mist, black sand beaches. Starting with examples from printed media and, in particular, examining a corpus of travel publications such as Géo and National Geographic France which are widely available, this article proposes to reflect on the images that the island wants to convey to lure more tourists, as well as on those that feature in the French travel magazines. We try to capture the deep change that, in spite of the crisis and beyond the possibility of cheap tourism, has triggered this fascination with Iceland.
  • Varia

    • Diwan sur le prince d'Emgión de Gunnar Ekelöf : la voix du poète et la pseudo-traduction - Anders Löjdström p. 97 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Dīwān sur le prince d'Emgión, recueil de poèmes de Gunnar Ekelöf (1907-1968), paraît en 1965 et devient le premier des trois livres de la trilogie du Dīwān, l'un des sommets absolus de la poésie suédoise du XXe siècle. Il fait entrer le lecteur dans l'univers de la Byzance du XIe siècle et Ekelöf choisit de présenter les poèmes comme des traductions de textes anciens. Peu de temps après la publication, il révèle en être l'auteur véritable, mais sans modifier la présentation du livre. Les spécialistes de l'œuvre d'Ekelöf ont rarement considéré le Dīwān sur le prince d'Emgión en tant que pseudo-traduction. Nous avons l'intention d'en proposer une lecture qui met les particularités de la pseudo-traduction et son fonctionnement en rapport avec les aspects autobiographiques du livre ainsi qu'avec l'œuvre antérieure, afin de déterminer les effets de ce dispositif sur la voix du poète.
      Dīwān on the prince of Emgión, a collection of poems by Gunnar Ekelöf (1907-1968), was published in 1965 and became the first of the three books forming the Dīwān-trilogy, one of the utmost highlights of twentieth century swedish poetry. It leads the reader into the world of the eleventh century Byzantium and Ekelöf chooses to present the poems as translations of ancient texts. Shortly after publishing the book he revealed being the author without changing its presentation. Ekelöf scholars have rarely considered the Dīwān on the prince of Emgión as a pseudo-translation. Our aim is to present a reading of the Dīwān as a such and to put the genre's particular characteristics in relation to the book's deeply autobiographical aspects as well as to the author's previous work, in order to determine the specific effects of pseudo-translation on the poet's voice.
    • Aki Kaurismäki, un cinéaste-cinémathèque - Aymeric Pantet p. 111 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article s'inscrit dans la continuité des travaux de Satu Kyösola et ceux d'Andrew Nestingen sur la présence de l'archive dans l'œuvre d'Aki Kaurismäki. En rapprochant ces études de l'intertextualité filmique forte de Kaurismäki, nous proposons ici de considérer sa cinématographie comme étant similaire à une cinémathèque. D'abord, une analyse de l'œuvre de Kaurismäki permet de relever les éléments d'archive filmique présents, qui se divisent en deux catégories : les fragments venant directement d'autres œuvres ; et les influences filmiques de Kaurismäki, auxquelles il fait écho en les reproduisant. Puis, nous explorons l'engagement qui découle de cette cinémathèque. En particulier, pourquoi celle-ci traduit le point de vue alternatif du cinéaste et étaye la dimension transnationale de la cinématographie de Kaurismäki. En considérant Kaurismäki comme un cinéaste-cinémathèque, cet article explicite l'intertextualité filmique présente dans son œuvre.
      This article develops two researches: one conducted by Satu Kyösola and the other by Andrew Nestingen on the archive in Aki Kaurismäki's work. By correlating these two studies with Kaurismäki's strong filmic intertextuality, we propose to consider his cinematography as analogue to a film library. First, an analysis of Kaurismäki's work reveals the filmic archive, which divides itself into two categories: the fragments coming directly from other movies, and the filmic influences that Kaurismäki readapts into his work. Secondly, this article explores the engagement emanating from the film library. Moreover, it aims at explaining why this film library conveys the director's particular point of view and enhances the transnational aspect of Kaurismäki's cinematography. Considering Kaurismäki as a film library cum film maker, this article makes explicit the filmic intertextuality in his work.
    • Le sens véritable de la formule sur l'inscription de Rök - Alain Marez p. 125 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Une formule structure de façon insistante le célèbre monument runique suédois de Rök , dont le déchiffrement et donc l'interprétation et la traduction demeurent encore problématiques. Heureusement, le graveur a réécrit la séquence des runes scandinaves à 16 signes en runes germaniques (fuþark à 24 signes), rendant ainsi le texte intelligible. Une analyse épigraphique rigoureuse et méthodique de l'orthographe runique mise en œuvre dans la série en runes anciennes permet seule de restituer la chaîne phonique sous-jacente : cette étude aboutit à des conclusions bien éloignées des interprétations proposées jusqu'ici et projette un éclairage nouveau sur la tâche que s'assigne le graveur : en inscrivant des runes sur toute la surface du bloc de pierre, il donne naissance à un monument sans pareil, le seul digne à ses yeux de célébrer la mémoire de son fils défunt.
      On the famous Swedish Rök stone, the runic formula appears regularly: its deciphering, interpretation and translation still raise many questions. Fortunately, the engraver wrote the sequence both in Scandinavian runes (16 signs) and in Germanic runes (fuþark with 24 signs), thus making the text intelligible. A rigorous epigraphic analysis of the runic spelling in the series of ancient runes allows to reconstruct the underlying phonic chain: this study leads to conclusions far different from the interpretations which has so far been suggested and offers a new approach to the task assigned to himself by the engraver. By engraving runes over the whole surface of the rock he gives birth to an unrivalled monument, the only monument worthy of his dead son's memory.
    • Lecture
      - p. 135