Contenu du sommaire : La construction de l'altérité dans l'espace noir atlantique : Etats-Unis - France - Caraïbes - Amérique latine

Revue Revue Européenne des Migrations Internationales Mir@bel
Numéro Vol. 27, no 1, 2011
Titre du numéro La construction de l'altérité dans l'espace noir atlantique : Etats-Unis - France - Caraïbes - Amérique latine
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Articles

    • Éditorial : Contextualiser pour mieux conceptualiser la racialisation - Christian Poiret, Odile Hoffmann, Cédric Audebert p. 7-16 accès libre
    • Les rythmes de l'altérité au Mexique (XVIIIe-XXIe siècles) - Odile Hoffmann p. 17-30 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Au-delà du rappel des natures situées, construites et reconstruites en permanence des identités, l'article explore les rythmes de ces transformations ainsi que leur pluralité. Parlant « des noirs au Mexique » sur le temps mi-long de deux siècles, la question de l'identification bascule d'une époque à l'autre, entre des visions qui privilégient l'interprétation racialisée ou culturelle de l'identification. Dans la seconde moitié du XXe siècle, l'ethnicisation comme la racialisation s'imposent et semblent nier le métissage, pourtant omniprésent dans la vie quotidienne. Ces deux tendances se nourrissent l'une l'autre sans se confondre. Elles posent alors de nouveau la question de la fabrication de la différence et son instrumentalisation, que ce soit comme fondement d'une domination, ou condition d'une émancipation.
      The article explores the dynamics of identity transformation as well as its plurality. Over two centuries, the definition of “blacks in Mexico” oscillates depending on the historical context, between racially oriented visions of identification and culturally oriented ones. By the second half of the 20th century, both ethnicisation and racialisation have prevailed as a negation of hybridity (“mestizaje”), though omnipresent in the daily life. Both tendencies influence each other but yet remain distinct. They both raise the issue of the construction of cultural and racial “difference” and its interpretation as an instrument of domination or as a condition for emancipation.
    • Catégorisation raciale, ethnicité et compétition spatiale des communautés afro-caribéennes aux États-Unis : géographie urbaine et stratégies politiques - Cédric Audebert p. 31-46 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Au regard de l'impact remarquable de l'immigration contemporaine sur les changements démographiques et culturels dans les villes nord-américaines, la question se pose du lien entre la catégorie raciale, l'ethnicité, la géographie résidentielle et l'ascension politique des communautés immigrées arrivées récemment. La réflexion porte sur la concentration résidentielle des deux principales communautés migrantes afro-antillaises, les Haïtiens et les Jamaïcains, comme possible facteur de la visibilité électorale et de l'ascension politique de ces groupes aux États-Unis. Un des enseignements principaux est que les recours aux registres racial ou ethnique ne sont pas exclusifs l'un de l'autre et peuvent être tour à tour utilisés par un même groupe en fonction du contexte, des objectifs visés et de l'échelle spatiale considérée.
      The remarkable impact of contemporary immigration on demographics and culture in major US cities raises the issue of the relation between race, ethnicity residential patterns and political visibility of recent immigrant communities. The reflection focuses on the residential concentration of two prominent Afro-Caribbean groups – Haitians and Jamaicans – as a potential factor of electoral visibility and political ascension in the US. One of the major findings is that racial or ethnic labels are not exclusive from one another and may be used simultaneously depending on the context, the goals and the spatial unit of analysis.
    • Les Garifuna. Transnationalité territoriale, construction d'identités et action politique - Carlos Agudelo p. 47-70 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Les Garifuna, produits du métissage entre Africains et indigènes Caribes au cours de la période coloniale, vivent depuis le XVIIIe siècle sur le littoral caribéen de quatre pays d'Amérique Centrale (Belize, Guatemala, Honduras et Nicaragua). Suite à un processus migratoire constant qui a débuté vers les années 1950, la plupart d'entre eux habitent actuellement aux États-Unis. La trans-nationalité, qui a pour origine leur territorialisation en Amérique Centrale et leur présence récente aux États-Unis, s'est toujours accompagnée d'une forte circulation de symboles identitaires. Ces symboles se composent de diverses représentations ethno-raciales qui se sont transformées sous l'incidence de processus politiques et sociaux d'ordre national, régional ou global jusqu'à devenir une identification au sens générique comme peuple afro-descendant.
      Since the 18th century, the Garifuna, of mixed African and Carib descent, during the colonial period, have lived along the Caribbean shores of four countries of Central America (Belize, Guatemala, Honduras and Nicaragua). Following a constant migratory process that began by the mid-fifties, the vast majority of them now live in the United States. As a result of their territorialization in Central America and their recent presence in the United States, their trans-nationality has always come along with an intense circulation of identity symbols. These symbols are composed of various ethnoracial representations that have changed under the influence of political and social processes at a national, regional or global scale, to finally become a generic identity as an Afro-descendant people.
    • Entre universalisme et multiculturalisme : politiques publiques et luttes politiques autour de l'éducation supérieure en Colombie - Oscar Quintero p. 71-87 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article propose d'analyser les politiques publiques destinées à promouvoir la présence des populations noires dans le système d'enseignement supérieur colombien à partir des années 1990, ainsi que les réponses à ces politiques de la part des associations noires. Nous développerons l'hypothèse selon laquelle, malgré l'existence de réglementations et de programmes dits « multiculturels », les logiques fondées sur le modèle de l'égalité entre les citoyens sont toujours d'actualité et se concrétisent par des propositions d'égalité des chances définies notamment à partir des critères de classe sociale ou de territoire. Pour autant, cette tendance s'accompagne d'une mobilisation croissante de la part des associations noires et des étudiants concernés afin de faire respecter et appliquer les principes multiculturels dans l'université. Ils élaborent des revendications et des propositions qui dépassent le répertoire d'action imposé par la réglementation existante et proposent un profond changement de la société colombienne.
      This article aims at analyzing the public policies in higher education that focus on Black people, and the reaction of Black organizations to such policies since the 1990s in Colombia. The central idea is that despite existing “multiculturalist” legal frameworks and programs, there are still a number of practices based on the idea of equality among citizens, specifically grounded on the criteria of social background or territory. This approach has generated a growing demand from Black student organizations to implement multicultural principles in universities through proposals that seek to transcend the spectrum of action imposed by existing regulations and that promote a more radical change in Colombian society.
    • La construction politique d'un sujet « afro » ou « noir » au Mexique - Gloria Lara p. 89-106 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article porte sur l'action politique des afro-descendants au Mexique et sur l'ethnisation liée à l'identification de traits culturels et phénotypiques soi-disant « spécifiques ». Les catégories ethniques et raciales sont des constructions émanant d'acteurs universitaires, politiques, juridiques, locaux visant à reconnaître un statut particulier à la population afro-mexicaine. Au Mexique, on assiste à la mobilisation politique de plusieurs organisations civiles et communautaires qui revendiquent la reconnaissance constitutionnelle des « peuples noirs » et de certains droits associés ainsi que la mise en place de politiques publiques qui leur soient bénéfiques. L'article décrit l'émergence du thème « afro » dans les études universitaires et les interventions des institutions gouvernementales. Il met l'accent sur les acteurs principaux de cette action politique et sur les différentes « catégories de la différence » qui font l'objet du débat.
      The article deals with the political action of afro-descendants in Mexico and the ethnicization process related to the identification of cultural and phenotypical features considered as “specific” ones. Ethnic and racial categories are constructed by academic, governmental and legal local agents as a way to confer a specific status to Afro-Mexicans. In Mexico, the political mobilization of civil and community organizations aims at promoting the constitutional recognition of “black populations”, as well as the associated rights and public policies. The analysis of the emergence of the “Afro” issue in academic studies and in governmental institutional practices put the emphasis on the protagonists of this political process and on the “categories of difference” that are at the center of the debate.
    • Les processus d'ethnicisation et de raci(ali)sation dans la France contemporaine : Africains, Ultramarins et « Noirs » - Christian Poiret p. 107-127 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Si les « races » humaines n'existent pas, des groupes racisés existent, constitués d'individus qui tendent à être traités comme l'incarnation de leur groupe d'appartenance et doivent donc apprendre à « faire avec ». Mais plutôt que de considérer ces groupes comme un objet scientifique, cet article leur substitue un objet processuel et contextualisé. La première partie de cet article précise donc les modalités théoriques de construction de cet objet avant de le replacer dans le contexte français contemporain, marqué par le retour de la catégorie « Noirs » dans l'espace public. La deuxième partie présente une approche compréhensive du processus subjectif de racisation par lequel on devient « Noir », basée sur l'analyse de la parole de personnes pouvant être ainsi catégorisées. Ce processus est découpé en quatre grandes formes, liées mais analytiquement distinctes, faisant chacune l'objet d'un développement : la racialisation, l'altérisation, la conscientisation et l'adaptation à la situation subordonnée. Enfin, la troisième partie conclusive revient sur la dimension collective des processus d'ethnicisation et de racisation et leurs conséquences en termes d'action collective.
      If human “races” do not exist, “racized” groups exist that are constituted by individuals who tend to be treated as the embodiment of their group of belonging and thus have to learn to cope with it. Yet rather than considering such groups as scientific object, this article analyzes them as a processual and contextual object. Therefore, the first part of the article clarifies the theoretical construction of such an object and then replaces it in the contemporary French context; this context is marked by the rise of the category “Black” in public space. The second part presents a comprehensive approach of the subjective process of “racization” through which one becomes “Black”, based on a discursive analysis among individuals who may be categorized as such. This process is grounded on four main forms that are related but analytically distinct, each of which will be subject to analysis: racialization, otherization, awareness and adaptation to subordination. Finally, the concluding part gets back to the collective dimension of ethnicization and “racization” processes and their implications for collective action.
    • Racisme, métissage et population d'origine africaine au Mexique : une perspective historique - María Elisa Velázquez p. 129-145 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article explore les mécanismes de la construction du racisme au Mexique dans une perspective historique. Il insiste sur l'importance de comprendre la période coloniale comme une période de grande mobilité et d'échange social, économique et culturel intense, en prenant en considération les contributions des Africains et de leurs descendants. Il analyse les processus sociaux qui ont permis le « métissage » entre indigènes, Espagnols et Africains, et il explique comment les idées du XVIIIe siècle, qui ont servi à justifier le commerce esclavagiste, ont influencé le discours « raciste » qui se développe au Mexique au cours du XIXe siècle.
      This article explores the characteristics of the construction of racism in Mexico from a historical perspective. It demonstrates the importance of understanding colonial Mexico as a society with possibilities for social, economic and cultural mobility and exchange, while taking into account the contribution of Africans and Afro-descendants. This paper also analyses the social process that allows “mestizaje” (miscegenation) between Indigenous populations, Spanish and Africans. Finally, it explores how the “pseudo-scientific” ideas of the Enlightening during the 18th century help to justify the enormous slave trade of Africans and shape the “racist” discourse that was developed in Mexico mostly during the 19th century.
    • Negritos et mestizos à Mérida dans la première moitié du XXe siècle. Métissage, région, race - Elisabeth Cunin p. 147-169 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Dans la péninsule du Yucatán, au sud-est du Mexique, l'Indien incarne l'altérité, tant d'un point de vue scientifique que politique. Cet article se propose d'adopter un regard décalé en s'intéressant au « noir » : s'il est absent des travaux historiques locaux et des recherches ethnologiques, d'autres sources permettent néanmoins d'analyser le statut du « noir » dans le Yucatán, dans la première moitié du XXe siècle. Au-delà du récit dominant portant sur la confrontation entre l'Européen et l'Indien, l'ancrage caribéen du Yucatán déplace le débat sur l'« identité régionale » dans un cadre géographique et culturel plus large, renvoyant notamment au phénomène du blackface, d'accentuation de traits physiques noirs, dans une logique racisante. Ce blackface sera étudié au travers du personnage du negrito, et de la référence aux Negros. L'altérité différentielle entre Indiens et Noirs renvoie à des processus historiques et à des données démographiques, et révèle le regard porté par la société dominante sur ses minorités.
      In the Yucatan peninsula, in Southeastern Mexico, the Indian represents otherness, both from a scientific and a political point of view. This article offers an original approach by focusing on black people, who do not appear in local historical works nor in ethnological research, but do appear in other sources, which enable us to analyze the status of “blackness” in Yucatan, at the beginning of the 20th century. Beyond the predominant tales on the confrontation between Europeans and Indians, the Caribbean dimension of Yucatan locates the debate on “regional identity” in a broader geographical and cultural frame. Within this framework, the phenomenon of “Blackface”, i.e. the accentuation of black physical traits, in a racial logic, becomes relevant. I will base my analysis of “Blackface” on the figure of the negrito and on the reference to Negros. “Differential otherness” between Indians and Blacks is related to historical and demographic processes, and it reveals the vision the dominant society has on its minorities.
  • Notes de lecture