Contenu du sommaire : Gauche : attention chantier !

Revue Mouvements Mir@bel
Numéro no 68, hiver 2011
Titre du numéro Gauche : attention chantier !
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Éditorial

  • Modernité

    • Développement, droits de la Nature et Bien Vivre : l'expérience équatorienne - Eduardo Gudynas p. 15-37 accès libre
    • Des communautés en transition : Entretien avec Faith Morgan et Pat Murphy (The Community Solution) - Vincent Bourdeau p. 38-47 accès libre avec résumé
      L'idéal communautaire a nourri et nourrit encore aux États-Unis, souvent perçus de ce côté-ci de l'Atlantique comme l'eldorado de l'individualisme, une forte composante de la culture politique. Fondé sur l'idée constamment rappelée par Dewey que « la démocratie doit commencer à la maison, et sa maison est la communauté de voisins1 », cet idéal rencontre un écho paradoxal dans l'expérience forcée de la transition vécue par Cuba pendant la « période spéciale », au cours de laquelle Cuba, du fait de l'effondrement de l'URSS et du blocus américain, a réduit drastiquement sa consommation d'énergie. C'est ce que nous présentent Pat Murphy et Faith Morgan, de l'organisation The Community Solution.
    • Ivan Illich : politique de l'amitié - Thierry Paquot p. 48-58 accès libre avec résumé
      Contrairement à la plupart des intellectuels « engagés » des années 1970-1980, Ivan Illich (1926-2002) n'était pas « marxiste » et la radicalité de sa pensée s'enracinait vraisemblablement dans un terreau composite. Ses critiques des institutions, des progrès techniques, des modes de penser dominants, bien que reprises par une partie de l'extrême gauche et par bon nombre d'écologistes n'en font pour autant pas un théoricien de la révolution ou un prophète de la décroissance : il est un carrefour où se rencontrent toutes ces sensibilités. En se mettant à l'écart de l'Église, il ne se réfugie pas dans le sein d'un quelconque parti, il affirme l'autonomie de l'individu et prône un choix de vie au-delà du politique, du moins dans son acception convenue allant de la droite à la gauche... Éclairages, par Thierry Paquot.
  • Figures et critique des représentations sociales

    • Quelle valeur a le travail ? - Moishe Postone p. 59-69 accès libre avec résumé
      Depuis quelques années, Moishe Postone mène une réflexion fondamentale sur les enjeux d'une critique marxienne du capitalisme qui aurait fait son aggiornamento écologiste. Il réinterprète ainsi les textes de Marx en tentant d'y loger une dimension anti-productiviste, ce qui a pour effet de mettre l'accent - pour mieux les décaper - sur les traits les plus caractéristiques de la modernité. Nous republions ici un texte devenu difficile d'accès en librairie, inséré au sein d'un recueil d'articles, Marx est-il devenu muet ? paru aux éditions de l'Aube en 2003. « Quelle valeur a le travail ? » demande Postone, ce qui est une manière de demander « quelle valeur a notre modernité ? ». Dix ans après sa première parution, ce texte n'a pas suscité encore les débats qu'il aurait dû entraîner. Mouvements entend ainsi y contribuer pour qu'en tête des priorités à Gauche figure une critique renouvelée du capitalisme, sans quoi, comme le souligne Postone, « la gauche aura complètement abandonné le champ politique à la droite ».
    • L'Innocence perdue de la productivité - Claus Peter Ortlieb p. 70-76 accès libre avec résumé
      Dans cet article1 Claus Peter Ortlieb interroge le statut systémique de la ferveur productiviste. Est-il bien vrai que les gains de productivité soient une bouffée d'air pour le capitalisme ? Le moteur de la croissance peut-il être alimenté en continu par de telles victoires remportées sur la productivité ou bien ces dernières ne sont-elles que des victoires à la Pyrrhus ? La facture de cette victoire se trouve déjà sur nos tables : l'expansion du capitalisme touche à sa fin, elle qui repose à l'extérieur sur l'accroissement du domaine de la dépendance salariale et, à l'intérieur, sur l'intensification de la domination des marchandises qui s'exprime sous la forme de création besoins irrépressibles. Ces deux formes de colonisation - par le travail et par la consommation - sont désormais en butte à des limites physiques, le travail vivant ne pouvant plus absorber le travail éliminé, si bien que la question de la sortie du capitalisme est aujourd'hui posée par les faits eux-mêmes, n'en déplaise à ceux qui poursuivent le fantasme d'une économie de marché sans croissance.
    • Socialisation des laboratoires Servier - Jean-Claude Salomon p. 77-84 accès libre avec résumé
      Le Médiator a conduit les laboratoires Servier sur le devant de la scène médiatique. À nouveau ont été convoquées les grandes agences de sécurité et de sûreté, à nouveau des personnes ont été mises en accusation pour avoir préféré le profit au service rendu. La messe est-elle dite ? Faut-il se contenter d'ajouter une nouvelle agence, réformer celles qui sont en place ? Doit-on « socialiser » les laboratoires Servier ? Mais alors doit-on forcément retomber dans les errements du passé en la matière ? Jean-Claude Salomon propose une alternative : partir des besoins, ce qui évite la dérive « productiviste », et s'assurer qu'elle est bien suivie en sortant l'entreprise du domaine marchand, en mettant aux commandes le personnel, mais aussi les usagers et les mutuelles. Ainsi pourrait-on faire en sorte que la production de médicaments soit au service de la santé et non de la consommation de médicaments.
  • Communauté

    • Du bon usage de la communauté - Vincent Bourdeau, Fabrice Flipo p. 85-99 accès libre avec résumé
      Dans cet article, nous cherchons à coupler la question de la communauté (dans ses multiples dimensions : religieuse, ethnique, culturelle) à la question des communs, non pas parce qu'il y aurait ici un jeu de mots facile à faire, mais parce que l'enjeu politique aujourd'hui, nous semble-t-il, consiste à proposer de retravailler ce qui est habituellement entendu par le premier terme - à savoir une citoyenneté comprise comme identité subjective donnée et partagée, dont la reproduction devrait être assurée pour que la pérennité du « commun » soit assurée. Dans le discours dominant, la fabrique de la citoyenneté n'est envisagée que sous l'angle de la transmission de l'identité culturelle, via l'école. Non que cet aspect ne soit pas important, mais il laisse dans l'ombre, le plus souvent, la question de la construction de ce commun, soutenant implicitement que son contenu est connu, donné et que le rôle des institutions établies est de le protéger et de le transmettre aux nouvelles générations. A contrario nous soutenons ici qu'une identité est de nature relationnelle, et toujours en marche ; que la situation financière, écologique, sociale actuelle oblige à changer notre regard sur le commun. Nous avons peut-être plus en commun avec le paysan indien, face au changement climatique, qu'avec le financier « Français de souche ».
    • Quelle école voulons-nous ? : Table ronde avec Charlotte Nordmann et Anne Querrien - Vincent Bourdeau, Marie-Claire Calmus, Julienne Flory p. 100-118 accès libre avec résumé
      La question scolaire est sans doute la plus sensible qui soit dans une société démocratique qui a voulu faire de l'école le lieu de construction de la justice sociale. Aujourd'hui, l'école ne remplit pas les attentes que nombre d'entre nous ont placées en elle : problème de moyens, dira-t-on, face à la réduction de postes - encore 14 280 suppressions de postes sont annoncées cette année pour la mission enseignement scolaire ! - qui, si elle ne dit pas tout de la crise de l'école, montre en tout cas le peu de cas qu'en fait le gouvernement actuel. Il ne suffira pas toutefois, tout le monde en est conscient, de redonner les postes perdus pour retrouver le sens de l'école. Quelle école voulons-nous ? Cette interrogation est une pierre que Mouvements a voulu apporter à un débat sur l'école qui ne saurait être esquivé une nouvelle fois en rejouant d'éternelles querelles entre « pédagogues » et « républicains ». Table ronde avec Anne Querrien et Charlotte Nordmann.
  • Institutions

    • Le retour du tirage au sort - Jacques Testart p. 119-127 accès libre avec résumé
      Depuis une trentaine d'années, de multiples réflexions et pratiques tentent de revisiter nos institutions démocratiques, ce mouvement étant parfois décrit comme constitutif d'un « tournant délibératif ». Sans pouvoir être réduit au conflit de la démocratie délégative et de la démocratie participative, le « tournant délibératif » a néanmoins placé au centre de sa réflexion ce que Callon, Lascoumes et Barthe, dans Agir dans un monde incertain. Essai sur la démocratie technique, ont appelé une « démocratisation de la démocratie ». Le tirage au sort, défendu ici par Jacques Testart, pourrait bien être une version particulièrement prometteuse de cette tentative.
    • La surveillance sous l'?il des citoyens : Entretien avec Émilie Thérouin, Adjointe au maire d'Amiens (EELV) en charge de la sécurité et de la prévention des risques urbains - Propos recueillis par, Noé Le Blanc p. 128-139 accès libre avec résumé
      Sous l'impulsion du gouvernement, la vidéosurveillance de voie publique connaît un développement rapide à travers toute la France. À l'exception de celle de Lens, toutes les circonscriptions de sécurité publique (CSP, unité administrative policière correspondant à le plus souvent à une agglomération) de plus de 250 000 habitants sont à présent équipées de caméras qui n'existaient pas il y a dix ans. Cet équipement tous azimuts présente la particularité d'avoir été lancé en l'absence d'une conception bien définie de la manière dont les caméras devaient affecter la délinquance, ainsi que des modalités d'évaluation de cette action. Le résultat, tel que le décrit le rapport de la Cour des Comptes (« L'organisation et la gestion des forces de sécurité publique », juillet 2011), est une opacité généralisée concernant le fonctionnement des réseaux et un bilan calamiteux en termes de lutte contre les délits. À Amiens, Emilie Thérouin tente depuis 2008 de remédier à ces maux.
  • Itinéraire

    • « La beauté donne des forces pour agir » : Entretien avec Ariane Mnouchkine - Propos recueillis par, Bérénice Hamidi-Kim, Juliette Rennes p. 141-154 accès libre avec résumé
      Aujourd'hui âgée de 72 ans, Ariane Mnouchkine est, depuis 1964, la figure de proue du Théâtre du Soleil. Cette compagnie indépendante est souvent citée comme emblème du « théâtre public » français dont elle incarne de fait certaines valeurs cardinales : l'exigence de la qualité artistique, le souci du public et d'une démocratisation de l'accès aux oeuvres, ainsi que la revendication d'un « art citoyen » en prise avec les enjeux politiques les plus contemporains. Cependant, le positionnement de cette troupe au sein de l'institution théâtrale, tout comme le corpus idéologique de la cheffe de troupe qu'est Ariane Mnouchkine, se laissent difficilement catégoriser. Nous avons souhaité aborder avec elle cette singularité du Théâtre du Soleil et sa dimension politique, en revenant à la fois sur le mode collectif d'organisation de la troupe et sur les formes d'engagement dont témoignent plusieurs créations théâtrales de la décennie écoulée.
  • Livres