Contenu du sommaire : Peut-on aimer le football ?

Revue Mouvements Mir@bel
Numéro no 78, été 2014
Titre du numéro Peut-on aimer le football ?
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Dossier : Peut-on être de gauche et aimer le football ?

    • Éditorial - p. 7-12 accès libre
    • Les territoires réinventés du football mondialisé - Ludovic Lestrelin p. 13-23 accès libre avec résumé
      Le football semble s'être émancipé de ses bases locales et nationales. Joueurs, images, capitaux circulent à l'échelle mondiale, construisant un marché globalisé alimenté par de multiples produits dérivés, compétitions hors-sol et autres tournées promotionnelles de grands clubs dont les soutiens ne se réduisent plus aux seuls supporters locaux. Le phénomène des « supporters à distance », qui témoigne de modalités renouvelées de construction des sentiments d'appartenance, ne doit cependant pas s'analyser sous le signe du désencastrement spatial. Les pratiques de ces supporters révèlent en effet l'importance des lieux associés au club soutenu, en particulier son stade où ils côtoient des supporters locaux qui sont tout à la fois en première ligne dans la promotion de l'identité locale du club et dans les mobilisations pour défendre son ancrage spatial.
    • Villes marchandes et villes rebelles : préparation aux méga-évènements et reconfiguration des formes d'exercice du pouvoir au Brésil - Juliette Rousseau p. 24-30 accès libre avec résumé
      Depuis l'annonce de sa sélection en tant que pays hôte de la Coupe du monde de football en 2007, jusqu'au début effectif de celle-ci en juin 2014, le Brésil est passé par un véritable processus de reconfiguration, tant de ses espaces urbains que d'une partie de son cadre législatif et des logiques et formes de pouvoir à l'œuvre. Un processus en forme de rouleau compresseur, dont le passage ne s'est pas fait sans dommages ni résistances, illustrant certaines des nombreuses mutations en cours dans la société brésilienne.
    • Le progrès dans l'ordre : À propos des stades de la Coupe du monde de football - Jean-Charles Basson p. 31-42 accès libre avec résumé
      La tenue de la 20e Coupe du monde de football au Brésil en juin juillet 2014 est présentée comme l'opportunité pour cette nation émergente de renouer avec son ambitieux projet moderniste en affichant la réussite de son programme de rénovation et de construction de grandes enceintes sportives destinées à accueillir les matchs de la compétition internationale. Toutefois, la magnificence architecturale et la vaste entreprise d'intervention urbaine qui l'accompagne ont leur revers : inspirés des principes de la prévention situationnelle, les techniques sollicitées et les dispositifs mis en place sont davantage mobilisés pour garantir des impératifs sécuritaires drastiques que pour célébrer, dans la liesse, la fête « do futebol ».
    • Quand le foot-business fait son grand projet inutile et imposé : le cas d'OL Land - Barnabé Binctin p. 43-54 accès libre avec résumé
      Si le football est parfois considéré comme un miroir sociologique des sociétés contemporaines, la construction des équipements afférents répond, elle, à la tendance actuelle de nos politiques publiques au développement des Grands Projets Inutiles Imposés (GPII). À Lyon, le cas d'« OL Land », aux finalités largement extra-sportives, semble à cet égard l'illustration parfaite d'un projet d'infrastructure aussi contre-productif que superfétatoire. Tant dans le montage du projet que dans son financement, l'instrumentalisation du fait sportif dissimule mal les enjeux d'une opération économique incertaine au profit de quelques intérêts privés locaux.S'appuyant sur la définition des GPII proposée dans la Charte de Tunis élaborée lors du dernier Forum social mondial, Barnabé Binctin démontre ici l'inutilité socio-économique et les dangers environnementaux du projet OL Land. Il interroge aussi les moyens de la résistance – qui puise abondamment dans le registre d'action de la désobéissance civile – dont l'organisation, parfois éparpillée, témoigne des difficultés de la convergence des luttes.
    • « Le côté noir des affaires » : délinquance financière, mondialisation et football : Entretien avec Noël Pons - Noé Le Blanc p. 55-61 accès libre avec résumé
      Univers de rêves et de paillettes autant que de muscles et de sueur, le football n'existe pourtant pas en dehors, ou au-delà, du monde qui l'entoure. Acteur à part entière du tissu économique et social, il n'échappe pas aux pratiques crapuleuses qui y fleurissent. Noël Pons1, ancien inspecteur des Impôts, ancien conseiller au Service central de prévention de la corruption, revient à travers cet entretien sur les manipulations financières existantes dans le football.
    • La fabrique des footballeurs : la fabrique de « mauvais garçons » ? - Julien Bertrand p. 63-71 accès libre avec résumé
      Épiés, observés dans leurs faits et gestes, souvent décriés, les footballeurs professionnels laissent rarement insensibles. Ils sont même une cible de choix pour des commentateurs qui n'en finissent pas de brocarder leur « individualisme » et leur absence de « valeurs ». Ces sportifs n'en restent pas moins souvent mal connus et décrits à grand renfort d'amalgames. À partir d'une enquête sociologique menée dans les écoles qui forment en France ces footballeurs de métier (les centres de formation), Julien Bertrand éclaire certains des travers qui leur sont reprochés et invite à interroger les ressorts de ces désapprobations publiques.
    • Pas vus, pas pris : la médicalisation de la performance dans le football : Entretien avec Jean-Pierre de Mondenard - Noé Le Blanc p. 72-80 accès libre avec résumé
      Le dopage généralisé qui touche le foot fait l'objet d'un déni qui l'est tout autant. Reconnaître l'étendue du phénomène serait sans doute admettre trop ouvertement que l'important dans le football n'est pas de participer, mais de gagner. Mouvements a rencontré Jean-Pierre de Mondenard1, médecin spécialisé dans le sport, afin d'apporter à ce dossier un point de vue rarement mis en lumière : l'importance du dopage dans le football.
    • Le foot français, les noirs et les arabes - Patrick Simon p. 81-89 accès libre avec résumé
      Les rapports entre football et immigration sont anciens et structurants. La circulation internationale des joueurs et l'incorporation de jeunes d'origine immigrée dans les équipes locales et nationales font du football une vitrine cosmopolite et mondialisée. Pour autant depuis l'éphémère glorification de l'équipe « Black-Blanc-Beur » en France en 1998, la place des joueurs d'origine immigrée dans les clubs et dans l'équipe nationale, en particulier ceux liés à l'immigration postcoloniale, fait l'objet de nombreux débats. Faisant suite aux attaques contre l'équipe « Black-Black-Black » proférées par Alain Finkelkraut ou Georges Frêche, une réunion du staff de la Direction technique nationale a évoqué en 2011 le projet de limiter la présence de joueurs des minorités ethno-raciales. Révélée par le site Mediapart, « l'affaire des quotas » et les réactions qu'elle a suscitées sont utilisées par Patrick Simon dans cet article pour analyser les relations entre le foot français et les minorités.
    • Le football féminin face aux institutions : maltraitance et conquêtes sociales - Annie Fortems p. 90-94 accès libre avec résumé
      Pionnière du football féminin contemporain, cofondatrice du club de Juvisy et capitaine de l'équipe pendant douze années, Annie Fortems nous livre un témoignage instructif sur l'histoire et la place du football féminin au sein de la Fédération française de football. Une histoire « empreinte de maltraitance » qu'il faut connaître pour permettre au football féminin de trouver une place entière dans ce sport national.
    • Visibilité et désamorçage des antagonismes sociaux dans des équipes féminines de football - Camille Martin p. 95-102 accès libre avec résumé
      La pratique du football féminin en France est l'occasion de contacts répétés et formellement égalitaires entre des joueuses d'origines sociales très différentes. Les divergences dans leurs manières d'appréhender l'activité sportive et de se comporter sont telles que leur commune passion pour le ballon rond ne saurait préserver les équipes des rapports conflictuels. Au contraire comme le montre Camille Martin, les rapports entre personnes socialement très distantes multiplient les occasions de développement de tensions, lesquelles reflètent en fait les antagonismes qui traversent la société. Toutefois, des contacts répétés, orientés autour d'objectifs communs mènent à des rapprochements entre joueuses et à une dédramatisation par l'humour des conflits sociaux. Mais ces rapprochements exigent souvent des joueuses les plus dominées qu'elles adaptent leur comportement à la culture plus légitime de leurs partenaires.
    • Est-ce la fin du mouvement ultra en France ? - Bérangère Ginhoux p. 103-109 accès libre avec résumé
      Le supportérisme ultra, considéré désormais comme une forme de « délinquance des stades », apparaît à l'opposé du modèle de supportérisme souhaité dans l'organisation des championnats nationaux ou dans le cadre des manifestations internationales telles que la Coupe du monde. Bérangère Ginhoux décrit dans cet article le monde social spécifique des supporters ultras en France (composition, culture, fonctionnement) et interroge la manière dont ces supporters font face au développement d'un football business dont ils sont exclus.
    • Supporters ou révolutionnaires ? Les ultras du Caire : Entretien avec Céline Lebrun - Amin Allal p. 110-116 accès libre avec résumé
      Qui sont ces masses bravant les ordres autoritaires dans plusieurs pays arabes lors de l'hiver 2011 ? À la faveur d'une explication simpliste et exclusive, deux figures concurrentes se sont imposées dans les médias : d'une part, le révolutionnaire Facebook ou Twitter, cet archétype de la classe moyenne éduquée, pacifiste et moderne qui use utilement des nouvelles technologies de l'information. Et d'autre part, le supporter ultra, ce représentant des classes laborieuses, qui affronte dans la rue les forces de l'ordre, les représentants du régime honni. Ce schéma binaire et réducteur est à bien des égards insatisfaisant. Concernant plus particulièrement la figure des ultras, les commentateurs ont souvent surdéterminé la portée politique de leurs actes. La confusion à leur propos a alimenté l'image d'un lumpen prolétariat aguerri et révolutionnaire, sorte d'avant-garde qui ne dit pas son nom. Céline Lebrun, sociologue travaillant sur les ultras du Caire, nous aide ici à comprendre aussi bien les ressorts de leur engagement dans les affrontements contre la police que leur recul conservateur sur des questions identitaires.
    • Première mi-temps : discriminations : Table ronde avec Cécile Chartrain, Nicolas Kssis-Martov, Marwan Mohammed, Veronica Noseda - Catherine Achin, Armelle Andro, Renaud Epstein p. 117-127 accès libre avec résumé
      Il existe encore des espaces dans lesquels le football demeure une pratique festive, un support de liens sociaux et de transformations sociales. Mais les acteurs et actrices de cet « autre football » sont confronté.e.s à des tensions permanentes, qui les interrogent dans leur ambition de faire de la pratique de ce sport un levier d'éducation populaire ou d'action politique. Pour essayer de saisir ce qui se passe dans ces autres lieux du football, Mouvements a réuni autour d'une table ronde Cécile Chartrain et Veronica Noseda, membres fondatrices de l'association « Les Dégommeuses », Marwan Mohammed, fondateur et ancien entraîneur d'un club de futsal et Nicolas Kssis-Markov, journaliste à So Foot et impliqué à la Fédération sportive et gymnique du travail (FSGT).Cette table ronde 1 est organisée, comme il se doit, en deux mi-temps : dans la première, les intervenant.e.s dressent un constat des discriminations rencontrées dans leur trajectoire de footeux.euse ; dans la seconde, ils et elles reviennent sur leur goût pour ce sport, leurs pratiques militantes et leurs dilemmes.
    • Être (bien) payé pour parler foot - Xavier de La Porte p. 129-132 accès libre avec résumé
      Le foot professionnel n'existerait pas sans la télévision. Les chaînes de télé, qui dépensent des fortunes pour avoir la possibilité de diffuser les matchs jouent en effet un rôle clef dans l'économie des clubs et des ligues. En retour, elles espèrent attirer annonceurs et abonnés en offrant une couverture aussi exhaustive que possible des compétitions nationales et internationales. Mais les matchs ne suffisent pas (ou plus). Les émissions sur le foot se multiplient, et on parle foot du matin au soir, dans des émissions dédiées comme dans des programmes d'actualité ou de culture. Cette profusion de la parole pourrait, a priori, s'accompagner d'une grande liberté de ton et offrir des espaces pour des analyses distanciées, pour des mises en perspectives historiques, voire pour des propos humoristiques ou satiriques, en mobilisant des passionnés de foot. La réalité est pourtant bien plus complexe – ou plus pauvre et monocorde, comme l'atteste Xavier de La Porte, ancien chroniqueur « sport » (c'est-à-dire foot) sur Canal Plus.
    • Seconde mi-temps : subvertir et aimer le football : Table ronde avec Cécile Chartrain, Nicolas Kssis-Martov, Marwan Mohammed, Veronica Noseda - Catherine Achin, Armelle Andro, Renaud Epstein p. 133-139 accès libre
    • « Mon plus beau match de football... » - p. 140-163 accès libre
  • Thème

    • Brésil, Turquie : leçons de juin - Thomas Coutrot p. 165-175 accès libre avec résumé
      Les pays émergents sont rattrapés par la crise mondiale. Fuite des capitaux, chute des bourses et des monnaies : le tournant annoncé de la Fed, la banque centrale états-unienne, vers une politique monétaire moins laxiste, et l'anticipation d'une hausse des taux d'intérêt américains, ont déclenché à l'été 2013 puis à nouveau l'hiver 2014 de fortes turbulences sur les marchés financiers indiens, sud-africains, brésiliens, turcs... Pendant ce temps la bulle financière continue à enfler à Wall Street et en Europe où les indices boursiers ont dépassé les sommets atteints en octobre 2007, ce qui ne laisse d'ailleurs rien présager de bon.Une tornade financière globale pourrait bien éclater à nouveau d'ici quelque temps. Mais dans l'économie réelle, le ralentissement général de la croissance des émergents est déjà sensible depuis deux ans, soulignant les fondements précaires de leurs modèles de croissance. Plus significatifs que les hoquets de la finance, les grands mouvements sociaux qu'ont connus le Brésil et la Turquie en juin dernier ont mis à nu les limites de ces modèles. Les manifestants du Passe Livre et du parc Gezi s'en sont pris aux grands projets inutiles et coûteux qui ont soutenu dans les deux pays une croissance inégalitaire et instable désormais à bout de souffle.