Contenu du sommaire : Le détail et l'indice : entre littérature, histoire de l'art et épistémologie

Revue A contrario Mir@bel
Numéro no 20, 2014/1
Titre du numéro Le détail et l'indice : entre littérature, histoire de l'art et épistémologie
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Introduction

  • Articles

    • Varietas, Curiositas, Vanitas : l'épistémologie détailliste à l'épreuve de son étiolement - Lucas Giossi p. 23-34 accès libre avec résumé
      Le détail semble intrinsèquement lié au savoir. Ce lien, La Rochefoucauld l'exprimait déjà dans ses Maximes au XVIIe siècle: « Pour bien savoir les choses, il faut en savoir le détail, mais comme il est presque infini, nos connaissances sont toujours superficielles et imparfaites. » Faut-il en déduire que le statut épistémologique du détail est atemporel ? En remarquant son indéfectible stigmatisation de Platon à Alberti, force est d'admettre qu'il n'a pas toujours été considéré comme un élément pertinent. Cet article tentera dès lors de questionner ce changement épistémologique, un renversement dont on ressent peut-être les tremblements dans trois grands topoï renaissants : la Varietas, la Curiositas et la Vanitas. En effet, le détail n'est-il pas le signe de la différence qui fonde la diversité ? N'est-il pas cette curiosité qui captive le regard au détriment de l'ensemble ? N'est-il pas enfin ce risque d'une dissolution du sens dans l'infinitésimal ?
    • Sur le chapeau de La lutte de Jacob avec l'ange d'Eugène Delacroix à Paul Gauguin : sens et postérité d'un détail - Laurence Danguy p. 35-55 accès libre avec résumé
      Vers la fin de sa vie, Eugène Delacroix voue toutes ses forces à l'exécution des fresques de la chapelle des Saints-Anges de l'Église Saint-Sulpice. Pour l'une d'entre elles, il choisit le thème biblique de La lutte de Jacob avec l'ange qu'il s'approprie pour en faire le théâtre de sa relation à la peinture. Le peintre inscrit tout autant son récit dans le cadre de la scène que dans le combat lui-même, avec l'introduction d'énormes chênes, très peu conventionnels, mais également en insérant plusieurs détails, dont un chapeau très dix-neuvième siècle placé au-devant de la composition. Ce détail, parfois relevé de manière anecdotique, est décisif dans la portée sémantique de l'œuvre. Gauguin le reprendra, du reste, dans sa Vision après le sermon.
    • Le goût pour le fini dans l'Europe des Lumières : les discours sur le détail dans la peinture de J.-E. Liotard (1702-1789) et de ses contemporains - Takumi Miyazaki p. 57-67 accès libre avec résumé
      Cet article a pour objet l'analyse des discours sur le fini de la peinture tel que tenus et énoncés par Jean-Etienne Liotard et quelques-uns de ses contemporains. Il vise à déterminer ce que ces prises de position révèlent quant au goût pour le détail, ainsi qu'à établir en quoi ce goût est symptomatique de la situation artistique d'une Europe des Lumières marquée par un double mouvement de vulgarisation du goût artistique d'une part, et de conformité au goût dit « profane » de l'autre. Je me propose d'analyser les jugements dont ont fait l'objet les œuvres marquées par leur soin du détail, ainsi que les définitions du mot « fini » données respectivement par les « connaisseurs » et par le « vulgaire des amateurs ». J'aborderai enfin les différents types de « mauvais goûts », dont les détracteurs de Liotard voient la trace dans ses œuvres.
    • Quand le détail fait signe : le rôle du détail dans la légitimation culturelle de l'affiche - Katarzyna Matul p. 69-89 accès libre avec résumé
      La mise en garde contre le surplus de détails marque le discours de légitimation culturelle de l'affiche au tournant du XIXe et du XXe siècle en France. La transformation de l'affiche de type narratif en une composition qui devient la synthèse graphique de l'information transmise, est-elle dictée par l'impératif du renforcement de la fonction commerciale de l'affiche ou plutôt par l'intention de nouer avec le discours propre à la peinture moderne ? Bien que le recours à la peinture demeure un moyen de reconnaissance artistique de l'affiche, l'enjeu majeur pour ce médium ne consiste-t-il pas plutôt à se constituer comme un genre à part, relativement autonome de la peinture ? Telles sont les questions auxquelles cet article tentera d'esquisser des réponses en faisant appel à la critique artistique de l'époque, et en analysant un choix d'affiches, notamment de Chéret, Toulouse-Lautrec, Capiello et Cassandre.
    • La « lacune » interpolée des premières éditions du Neveu de Rameau : un point de détail ? - Francis Kay p. 91-112 accès libre avec résumé
      Dans les romans de Diderot, certains détails se révèlent symptomatiques de la censure opérée sur le texte par les dépositaires des manuscrits. Je le démontre à partir de l'étude d'une note qui fut d'abord insérée dans l'édition Brière du Neveu de Rameau (1823) : « (Nota. Il y a dans le manuscrit une lacune, et on doit supposer que les interlocuteurs sont entrés dans le café ou il y avait un clavecin.) » Cette « lacune » interpolée est révélatrice des enjeux symboliques liés à l'héritage intellectuel des Lumières au XIXe siècle. Mais dans la littérature française du XVIIIe siècle, la question de la lacune potentielle renvoie en même temps à la pratique effective du texte crypté : il s'agit là d'une véritable stratégie d'écriture.
    • « Rien de nouveau sous le soleil » ? L'indice intertextuel dans L'Élixir de longue vie de Balzac - Olivier Besuchet p. 113-127 accès libre avec résumé
      Cette étude de cas s'attache à mettre en évidence le réemploi de séquences narratives d'origines diverses dans la composition d'une « Étude philosophique » de La Comédie humaine, L'Élixir de longue vie. Il ne s'agit pas de révéler une hypothétique unique source de L'Élixir, mais de montrer, par un examen minutieux, comment le texte balzacien réorganise des éléments issus de plusieurs hypotextes dans un contexte discursif, textuel et intertextuel nouveau, afin de produire des effets de sens inédits.
    • « Les coupables, c'est nous » : symboles et indices pour une étude du roman historique - Jenny Ponzo p. 129-142 accès libre avec résumé
      Cet essai vise à éclairer deux façons différentes de concevoir et d'appliquer le concept d'indice dans la culture italienne en adoptant une perspective sémiotique-hermétique. Il se concentre sur les romans historiques dont l'intrigue se passe pendant « il Risorgimento », corpus significatif parce que lié à l'interprétation que les Italiens donnent de leur unité nationale. Il se sert de la théorie d'Umberto Eco pour chercher à comprendre et concilier le style interprétatif « logico-inductif» et le style interprétatif « hermétique » qui coexistent dans les récits historiques produits au XXe siècle.
    • L'indice de l'horreur chez Bret Easton Ellis. Le Los Angeles ville morte de Moins que zéro et Suite(s) impériale(s) - Helder Mendes Baiao p. 143-159 accès libre avec résumé
      Ce travail vise à analyser le style minimaliste de l'écrivain américain Bret Easton Ellis dans deux de ses romans, Moins que zéro et Suite(s) Impériale(s). L'auteur y décrit l'univers huppé de la jet set de Los Angeles. Les deux romans suivent le même groupe de protagonistes pour qui l'existence n'est qu'une série de fêtes, d'aller et retour à travers la ville, d'activités mondaines, et de consommation de drogues. Adoptant une narration hyperréaliste, chargée de détails contemporains, Ellis noie la vie de ses personnages et leur rapport au monde dans l'immédiateté et la frivolité des échanges consuméristes. L'histoire dévoile alors un monde sans âme, où l'amour est impossible, l'angoisse omniprésente, et dont la Mort seule semble détenir les secrets.
  • Épilogue

  • Varia