Contenu du sommaire : Rebelles à l'ordre colonial

Revue Cahiers d'histoire. Revue d'histoire critique Mir@bel
Numéro no 126, 2015
Titre du numéro Rebelles à l'ordre colonial
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Le mot de la rédaction - Anne Jollet p. 5-9 accès libre
  • DOSSIER

    • Rebelles contre l'ordre colonial : expériences et trajectoires historiques de résistances anticoloniales - Didier Monciaud p. 13-18 accès libre
    • Lettrés, rebelles et autres bandits face à l'ordre colonial. Réflexions sur l'esprit de résistance et le patriotisme vietnamien - Trinh Van Thao p. 19-34 accès libre avec résumé
      Face à la domination coloniale au Viet Nam, les confucéens ont eu un apport significatif à l'esprit de résistance et au patriotisme. En particulier, la politique de la « marge », notamment les groupes stigmatisés par la mémoire historique comme les bandits, les pirates ou les rebelles, participent de manière active au refus de l'ordre colonial. Leurs perceptions, chargées d'enjeux sociaux, ethniques, politiques et régionaux, se situent entre disqualification et glorification. Avec les substantielles mutations de la société vietnamienne apparaissent de nouvelles contestations du statu quo colonial, avec une sérieuse rivalité entre nationalistes et communistes. Investis de la confiance des puissances alliées victorieuses, ces derniers vont s'imposer comme la force incontestable pour l'indépendance du Viet Nam au sortir du second conflit mondial.
    • De la révolte à la réforme : rébellions musulmanes à l'ordre colonial en Asie du Sud-Est (1820-1930) - Rémy Madinier p. 35-53 accès libre avec résumé
      Au-delà de la grande variété et de l'enchevêtrement des registres religieux de la révolte, trois grandes phases successives peuvent être distinguées dans les rébellions islamiques d'Asie du Sud-Est. Les premières furent avant tout des mouvements de résistance à l'avancée de l'ordre colonial, au cours d'un long XIXe siècle qui vit les prétentions européennes sur ces territoires se transformer en contrôle effectif. Elles mobilisèrent un référent religieux, au nom d'un ordre ancien considéré comme légitime et menacé. Les secondes, plus populaires et moins organisées, naquirent de l'échec des précédentes et articulèrent, autour de thèmes millénaristes, une contestation du ralliement des élites à cette domination européenne. À l'orée du XXe siècle, un nouveau type de rébellion vit le jour : il procédait d'un retournement des valeurs proclamées par l'Occident en faveur de l'émancipation des peuples dominés. Ce nationalisme fut nourri de diverses idéologies et le réformisme musulman, concordisme de combat, en constitua la déclinaison islamique. Aux révoltes armées succéda, après la Première Guerre mondiale, un mouvement politique, éducatif et social qui, pour l'essentiel, troqua une lutte armée trop inégale contre une résistance politique, intellectuelle et culturelle exploitant habilement les contradictions de l'associationnisme colonial.
    • Tirailleur, facteur, anticolonialiste : la courte vie militante de Lamine Senghor (1924-1927) - David Murphy p. 55-72 accès libre avec résumé
      Entre 1924 et sa mort prématurée en 1927, le Sénégalais Lamine Senghor devient une vedette du mouvement anticolonialiste. Le souvenir de sa contribution au mouvement anticolonialiste, ainsi qu'à la prise de conscience du monde noir, sera bientôt éclipsé par le succès de ceux qui l'ont suivi. Nous tenterons dans cet article de reconstruire son parcours militant. Ce qui nous intéresse le plus chez Lamine Senghor, c'est son engagement transnational, qu'il soit exprimé à travers le communisme ou le panafricanisme. Si son opposition à l'impérialisme s'exprime d'abord à travers la solidarité de classe, il semble évoluer en 1926-1927 vers une vision plus « raciale » de la solidarité, lorsqu'il crée le Comité de Défense de la Race Nègre. S'agit-il ici d'une rupture avec le communisme, ou d'une prise de conscience, comme en feront pendant les décennies suivantes des personnalités comme Richard Wright, Aimé Césaire ou George Padmore, du fait que le communisme ne s'intéresse pas vraiment au racisme blanc ? Et cette vision d'une solidarité noire met-elle fin à la possibilité d'une solidarité mondiale ?
    • Les engagements d'Injî Aflâtûn dans l'Égypte des années quarante : la radicalisation d'une jeune éduquée au croisement des questions nationale, femme et sociale - Didier Monciaud p. 73-95 accès libre avec résumé
      Dans l'Égypte des années 1940 dominée par la puissance britannique, de nombreuses jeunes égyptiennes rejoignent la gauche communiste alors en plein essor. Injî Aflâtûn, jeune éduquée passionnée de peinture, s'engage à gauche et s'investit dans « l'action femme ». Sa trajectoire s'inscrit dans la riche histoire des luttes pour les droits des femmes en Égypte qui s'articule, non sans tensions, aux luttes anticolonialistes. Elle exprime un phénomène de radicalisation et de militantisme se situant au croisement du marxisme, du patriotisme, de la réforme sociale et de la « question femme ».
    • Algérianisation et radicalisation :les étudiants communistes de l'université d'Alger (1946-1956) - Pierre-Jean Le Foll-Luciani p. 97-117 accès libre avec résumé
      En s'intéressant aux trajectoires des étudiants communistes d'Alger entre 1946 et 1956, cet article vise à appréhender à hauteur d'individu les questionnements habituellement liés au Parti communiste algérien, tout en insistant sur les configurations propres à l'université et au militantisme étudiant. L'université d'Alger, espace important de lutte politique, fut en effet au tournant des années 1940 et 1950 l'un des lieux où les communistes furent le plus pris au sérieux par les nationalistes algériens, ce qui entraîna des relations spécifiques allant de la rivalité entre partis à la quasi-fusion clandestine au service de la lutte armée au début de la guerre d'indépendance. La vie de ce groupe témoigne donc tant de l'« algérianisation » du PCA que de trajectoires de radicalisation dont la dissidence s'exerce parfois tout autant à l'égard de l'ordre colonial que des chemins tracés par les structures partisanes.
    • L'indépendance sera révolutionnaire ou ne sera pas. Étudiants africains en France contre l'ordre colonial - Françoise Blum p. 119-138 accès libre avec résumé
      La Fédération des étudiants d'Afrique noire en France (FEANF, 1951-1980) a été l'association la plus représentative des étudiants africains en France. Elle a pris des positions radicales, en se prononçant et combattant très tôt pour une indépendance totale des pays africains, indépendance qu'elle souhaitait voir se réaliser par la « voie révolutionnaire » et dans l'unité. Les étudiants utilisèrent diverses armes dans leur lutte anticoloniale qu'ils poursuivirent d'ailleurs après les indépendances de 1960 en s'opposant au néocolonialisme et à l'impérialisme : déclarations de principe, manifestations, relations internationales. Ils mobilisèrent dans ce combat le savoir qu'ils avaient acquis dans les universités françaises de même que celui de la bibliothèque marxiste de l'époque. La revalorisation des cultures africaines fut un des enjeux importants de cette lutte menée par des intellectuels, futures élites de « l'Afrique de demain ».
  • CHANTIERS

    • L'autobiographie romancée d'un aventurier en politique : Sans patrie ni frontières, de Jan Valtin - Constance Margain p. 141-159 accès libre avec résumé
      Richard Krebs (1905-1951), alias Jan Valtin, a été un marin communiste et syndiqué allemand. Son récit, Sans patrie, ni frontières, qu'il présente comme une autobiographie, est paru aux États-Unis en janvier 1941. Différents éléments constituant la trame du livre ne concordent pas avec l'objectivité historique. Dans cette autobiographie romancée, Valtin s'octroie une vie d'exception qui le dégage de l'anonymat du simple militant. Quel fut le rôle politique réel de Richard Krebs ? À la lecture des sources et des analyses qui ont été faites sur cet ouvrage, on remarque que Krebs mêla à sa propre expérience au sein de l'Internationale des gens de la mer (ISH), syndicat dirigé par le Profintern, des colportages et récits trouvés dans les journaux de l'époque ou des histoires entendues. L'exagération, qui est présente tout au long du récit, est-elle une forme narrative ou la transformation du narrateur en héros ? L'ouvrage de Jan Valtin doit être compris comme celui d'un marin allemand pris dans la tourmente de l'Allemagne des années vingt et trente. Son ascension et ses responsabilités sont à mettre en parallèle avec la création, le 3 octobre 1930, de l'Internationale des marins et dockers (IMD en français), à Hambourg. De communiste convaincu, Richard Krebs devint un agent de la Gestapo tandis que sombrait, avec l'avènement du régime nazi, l'Allemagne comme centre opérationnel du mouvement communiste mondial.
  • MÉTIERS

  • DÉBATS

    • Marx, un spectre qui ne hante plus les Science studies ? - Jérôme Lamy, Arnaud Saint-Martin p. 173-187 accès libre avec résumé
      Abandonné dans les années 1990, le corpus marxiste n'est plus une référence pour les Science studies, devenues discipline dominante. Une série de théories (de l'acteur-réseau à la Triple hélice, en passant par la Nouvelle production des savoirs) envisage les articulations entre sciences et politique sur le mode d'un alignement très général aux formes contemporaines de la marchandisation des connaissances. La fluidité des relations le dispute à la disparition souhaitée de l'État. Cependant, au début des années 2000, c'est un autre Marx qui resurgit : ses travaux sur l'interaction métabolique entre la nature et les activités humaines sont reconfigurés aux formes d'une sociologie résolument écologiste. Le retour du refoulé semble ne plus avoir de limites, puisque les textes des historiens marxistes d'avant le second conflit mondial, comme Edgar Zilsel, sont republiés, et que la généalogie des Science Studies n'exclut plus, dans son histoire officielle en cours de constitution, cette matrice marxiste.
  • LIVRES LUS

  • UN CERTAIN REGARD

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