Contenu du sommaire : La singularité de la personne : entre liberté et humilité
Revue | Revue des Sciences Philosophiques et Théologiques — RSPT |
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Numéro | Tome 94, no 3, 2010 |
Titre du numéro | La singularité de la personne : entre liberté et humilité |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
La singularité de la personne : entre liberté et humilité
- Introduction - Emmanuel Housset p. 415-420 Une métaphysique de la personne qui veut échapper à une démarche purement empirique comme au pur formalisme se doit de redonner au terme de personne un sens nouveau. Or, c'est par un retour à la philosophie médiévale qu'il est possible de penser la personne sans le moi pour la comprendre comme un agent éthique qui trouve sa dignité dans son unicité et dans son élection à une vocation.If a metaphysics of personhood wishes to avoid following a purely empirical approach, or falling into a pure formalism, it will have to restore a new meaning to the term person. By going back to medieval philosophy, it becomes possible to conceive of a type of personhood without a self, and so to understand persons as moral agents whose dignity lies in their uniqueness and their being chosen to fulfil a vocation.
- « En personne » : La tradition latine de la morale et l'émergence d'une interrogation éthique dans l'œuvre de s. Anselme de Cantorbéry - Kristell Trégo p. 421-450 Dès sa première apparition dans le Monologion (autrement dit en théologie trinitaire), le concept de personne qu'Anselme hérite de Boèce subit par rapport à ce dernier une réorchestration : l'accent porte désormais sur l'idée d'individu. L'article envisage la reprise de ce concept de théologie trinitaire pour penser l'être humain, et ses actions.From the moment it first appears in the Monologion (i.e. in trinitarian theology), the concept of person, which Anselm borrowed from Boetius, is reworked by him : the emphasis now lies on the idea of the individual. The present article contemplates taking up this concept in trinitarian theology and applying it to a conception of the human person and human action.
- Les personnes selon Saint Bonaventure - Laure Solignac p. 451-480 Examinant la définition scolaire de la personne comme « substance individuée que distingue une propriété », Bonaventure montre sa pertinence en matière théologique, angélologique et anthropologique : il rappelle aux Latins que les personnes divines, pour désigner des relations, n'en sont pas moins des individus, et découvre, d'une manière toute franciscaine, dans la basse position de l'homme par rapport à l'ange la matière d'une éminente propriété qui le consacre comme personne spécifiquement humaine.Bonaventure examines the School's definition of the person as an “individuated substance distinguished by a property”, and demonstrates its significance for theology, angelology and anthropology. He reminds Latin theology that, although they refer to relations, divine persons are nevertheless individuals. And, in typically Franciscan style, he finds that the lower rank occupied by human beings, as compared with angels, is a property that marks their eminence, qualifying them as specifically human persons.
- « Rien de personnel » : Notes sur la question de l'acceptio personarum dans la théologie scolastique. - Pasquale Porro p. 481-509 La tradition théologique oppose la notion d'acceptio personarum à celle de mérite : il y a préférence personnelle quand, dans la concession d'un bénéfice, le bénéficiaire est privilégié, non en raison de ses mérites pour ainsi dire objectifs, mais de la disposition subjective du bienfaiteur. Le présent article considère la manière par laquelle la notion apparaît dans les discussions sur le rapport entre grâce et mérite dans la pensée scolastique, à partir des exemples privilégiés de Thomas d'Aquin et d'Henri de Gand. Pour exempter Dieu de l'accusation d'acceptio personarum, tout en maintenant le postulat de la gratuité absolue de la grâce, Thomas d'Aquin et Henri de Gand choisisse d'emprunter des voies différentes : Thomas – en cela plus fidèle à la position de l'Augustin de la maturité – soutient que Dieu peut effectivement traiter les hommes inégalement, dans la distribution de la grâce, sans pour cela enfreindre la justice distributive, puisque la grâce, n'étant pas due, n'a rien à faire avec la justice distributive ; Henri préfère en revanche faire l'hypothèse que, même s'il n'y a pas de mérite propre qui puisse rendre digne de la grâce et la faire entrer dans la sphère de la justice distributive, il y a au moins, du côté des hommes, une “congruence” que Dieu ne peut écarter : Dieu n'agit pas arbitrairement, il prend en considération (sans toutefois y être obligé) les conditions déterminées des personnes (leur congruence), et non les personnes en tant que telles.In the theological tradition, the notion of acceptio personarum is opposed to that of merit: respect of persons is referred to when, in the conferring of a benefit, the beneficiary is singled out, not on the basis of any so to speak objective merits, but on the basis of the subjective disposition of the benefactor. The article considers the way in which the notion is used in the Scholastic debate over the relation between divine grace and human merit, focusing mainly on the different positions of Thomas Aquinas and Henry of Ghent. In order to preserve God from the allegation of acceptio personarum, while at the same time maintaining the principle of the absolute gratuity of grace, Thomas Aquinas and Henry of Ghent adopt different strategies. Aquinas, who seems to be more faithful to Augustine's mature position, affirms that, without causing offense to distributive justice, God can indeed treat individuals unequally when dispensing grace, since grace, being something that is not earned, has nothing whatever to do with distributive justice. Henry, on the other hand, proposes that even if there is no merit which as such could make a person worthy of receiving grace, and so bring grace within the bounds of distributive justice, human beings nevertheless have a certain “congruence” that God cannot just set aside. Rather than acting arbitrarily, God takes into account (although without being obliged to do so) not just persons as such, but the particular conditions in which they find themselves (their congruence).
- L'exil amoureux de la personne dans L'Étoile de la Rédemption de Franz Rosenzweig - Deborah Blicq p. 511-533 Si le concept de « personne » semble aux premiers abords étranger à l'œuvre de Franz Rosenzweig, il semblerait toutefois que ce qu'il désigne dans l'Étoile de la Rédemption sous le mot « âme » et ce qu'il décrit de ses conversions successives, questionnent le statut même d'un « concept » de personne. Ainsi l'âme, expression féminine d'une tension insurmontable entre Éros et Thanatos, permet d'appréhender la personne` comme un concept fuyant ou toujours en devenir, à l'image du paradigme biblique de l'exil amoureux de la Sulamite dans le Cantique des cantiques, contrepoint de la Révélation dans l'Étoile de la Rédemption.If the concept of “person” initially seems alien to the work of Franz Rosenzweig, it would nevertheless appear that what he means by the word “soul” in the Star of Redemption, and his descriptions of its successive conversions, questions the very status of a “concept” of person. Thus, the soul, which is the feminine expression of an insurmountable tension between Eros and Thanatos, allows us to apprehend the person as a fleeting concept, or one that is always in the process of becoming. This is akin to the biblical paradigm of the amorous exile of the Shulamite woman in the Song of Songs, which serves as a counterpoint to Revelation in the Star of Redemption.
- Introduction - Emmanuel Housset p. 415-420
Bulletin
- Bulletin d'histoire des esoterismes - Jérôme Rousse-Lacordaire p. 535-583
- Recension des revues - p. 585-623
- Notices bibliographiques - p. 625-630