Contenu du sommaire : 1917 en Russie. La philologie à l'épreuve de la Révolution

Revue Revue des Etudes Slaves Mir@bel
Numéro vol.88, n°1-2, 2017
Titre du numéro 1917 en Russie. La philologie à l'épreuve de la Révolution
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • 1917 en Russie. La philologie à l'épreuve de la Révolution. Catherine Depretto [Dir.]

    • 1917 en Russie. La philologie à l'épreuve de la Révolution : Politique de la langue, évolutions disciplinaires, trajectoires individuelles. Introduction
      - Catherine Depretto p. 9-22 accès libre
    • Articles
      • La révolution et la langue
        • De la philologie à la linguistique : l'éclatement d'une discipline = From Philology to Linguistics : the Breaking-up of a Discipline - Sylvie Archaimbault p. 25-49 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
          Nous proposons dans cet article de brosser à grands traits le développement de la discipline philologique en Russie au XIXe siècle, jusqu'à son éviction par la linguistique au début des années 1920. À l'image de sa matrice allemande, la philologie russe est une discipline large, qui embrasse l'étude des langues et des textes, notamment anciens, mais aussi l'ethnographie, l'histoire, l'étude du folklore et des arts... Même si la philologie avait trouvé dans la slavistique une véritable terre d'élection, l'explosion des savoirs et des données recueillies par l'ensemble de ses sous-domaines devait mener à des spécialisations qui rendaient difficiles le maintien d'un ensemble cohérent et précipiter son éclatement. De grands linguistes du temps, dont Baudouin de Courtenay, l'ont rejetée pour son goût immodéré des textes écrits, son obsession des détails et son indifférence envers les corpus oraux pris dans leur variété. Seule une discipline nouvelle leur paraissait susceptible de renouveler en profondeur objets et méthodes.
          We aim in this presentation to outline the development of the philological discipline in Russia in the nineteenth century, until it was ousted by linguistics in the early 1920s. Like its German matrix, Russian philology is a broad discipline that embraces the study of languages and texts, including ancient ones, but also ethnography, history, the study of folklore and the arts... Even if philology had found a rich home in Slavistics, the huge increase of knowledge and data gathered by all the sub-domains of philology eventually led to specializations which it was difficult to keep together as a coherent whole, a fact which inevitably precipitated the breakingup of the field. Several great linguists of the time, including Baudouin de Courtenay, rejected it for its immoderate taste for written texts, its obsession with details and its indifference to the various oral corpora. It was felt that only a new discipline would be capable of an in-depth renewal of objects and methods.
        • L'orthographe soviétique : prémices, programmes, mise en oeuvre = Soviet orthography : Background, Programs, Implementation - Alexandra Pletneva, Sylvie Archaimbault et Elena Ourjoumtseva [Trad.] p. 51-67
        • The abkhaz analytical alphabet of N. Ja. Marr. Evolution, revolution and language planning - Vittorio S. Tomelleri p. 69-95 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
          L'article retrace brièvement l'histoire du système de transcription-translittération, créé par l'académicien N. Ja. Marr, à la fin du XIXe siècle, sur la base de l'alphabet latin, agrémenté de signes sublinéaires et supralinéraires. Inventé initialement pour la représentation graphique du géorgien et de l'arménien, il fut appliqué après plus ample développement à la reproduction graphique de toutes les langues caucasiennes, considérées comme formant une seule famille de langues, appelé japhétique. Plus tard en 1926 une variante fut adaptée à l'abkhaze, riche en consonnes et introduit comme son alphabet officiel; en raison de sa complexité, il fut remplacé cependant deux ans plus tard par un alphabet à base latine qui convenait mieux. Comme l'ensemble de l'activité linguistique de son auteur, ce système différemment appelé (transcription japhétologique, alphabet analytique, alphabet analytique abkhaze) présente un apercu assez intéressant des questions théoriques à l'ordre du jour dans les années 1920-1930. Critiqué sévèrement par des porte-parole célèbres de la linguistique soviétique (au nombre desquels E. D. Polivanov et N.F. Jakovlev), l'alphabet analytique abkhaze ne peut être que partiellement considéré comme la contribution personnelle de Marr au mouvement de latinisation de la révolution culturelle. Notre analyse essaie d'éclairer la corrélation entre le climat culturel postérieur à la révolution d'Octobre et l'interprétation idéologique comme l'évolution épistémologique de l'alphabet analytique de Marr.
          The present paper features a brief history of the transcription-transliteration system that the academician Nikolay Yakovlevich Marr created on the basis of the Roman alphabet, with the addition of sublinear and supralinear marks, at the end of the 19th century. Originally devised for the graphic representation of Georgian and Armenian languages, after further development it was applied to the graphic rendition of all Caucasian languages, which were considered to form a single language family, called Japhetic. Further, in 1926 a variant of it was adapted to the consonant-rich Abkhaz and introduced as its official alphabet; because of its too complicated character, however, it was replaced two years later by a more suitable Latin-based alphabet. Like the whole linguistic activity of its creator, this system, which was differently labeled (Japhetidological transcription, analytical alphabet, Abkhaz analytical alphabet), offers a quite interesting overview of the theoretical issues that were on the agenda in the twenties and thirties. Strongly criticized by famous exponents of Soviet linguistics (among them E. D. Polivanov and N. F. Yakovlev), the Abkhaz analytical alphabet can be only partially considered as Marr's personal contribution to the Latinisation movement during the cultural revolution. Our analysis tries to highlight the correlation between the cultural climate change after the October revolution and the ideological interpretation and epistemological evolution of Marr's analytical alphabet.
        • Local language planners in the context of early Soviet language policy: The Case of Marupiol Greeks = Planificateurs linguistiques locaux et olitique linguistique soviétique des débuts : le cas des Grecs de Marupiol - Vlada Baranova p. 97-112 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
          La politique linguistique soviétique des débuts a cherché à favoriser l'utilisation des langues minoritaires dans la formation, l'édition et la gestion administrative locale ; ensuite à la fin des années 1930, un changement s'est opéré en faveur de la russification. Les Grecs de Mariupol′, ou d'Azov, furent déplacés de Crimée vers la région de la mer d'Azov à la fin du XVIIIe siècle. Du point de vue de la langue, il faut les diviser en deux groupes : les Grecs hellénophones (Rumei) et les Grecs turcophones (Urumy). Les deux groupes ont été classés comme grecs dans la nomenclature soviétique officielle, mais pourtant on a tenu compte de leurs langues maternelles dans les écoles en 1920-1930. Dans cet article je me propose de me focaliser sur les efforts individuels des planificateurs linguistiques locaux dans le cadre de la Micro-Planification Linguistique. Les données analysées dans cette étude proviennent des documents d'archives. Les deux opérations présentant un intérêt particulier dans le cas des Grecs de Mariupol′ sont le choix de la langue dans une communauté à deux langues maternelles et les rapports avec les activistes d'autres groupes grecs. Le cas des Grecs de Mariupol′ montre comment la planification linguistique résulte de l'expérience biographique et du discours idéologique de ses acteurs.
          The Early Soviet policy was oriented to promote minority languages' use in education, publishing, and local administration ; then in the end of the 1930s there was a shift toward Russification. Mariupol, or Azov Greeks, were moved from Crimea to Azov Sea region in the late 18th century. Linguistically they can be divided into two groups : Turkish-speaking (Urumy) and Greek-speaking (Rumei). Both groups were classified as Greeks by the Soviet official nomenclature, however their native languages were taken into account in schools in 1920-1930. Paper focuses on individual efforts of language planners in the frame of Micro Language Planning. The data used in this study comes from archive documents (1918-late 1930s). Two procedures which are of special interest in the Mariupol Greek context are language selection in the community with two native languages and communication with activist from other Greek groups. The case of Mariupol Greeks shows how language planning emerges from biographical experiences and ideological discourse shared by the actors.
        • Крестьянский язык и революция. Письма во власть до и после 1917 г = Revolution and Russian Peasant Language. Letters to Authorities before and after 1917 - Alexander D. Nakhimovsky p. 113-134
      • Mutations disciplinaires, enjeux méthodologiques
        • The Emergence of Modern Scientific Communities in Late Imperial and Early Soviet Russia : the Case of the Moscow Linguistic Circle = L'émergence des communautés scientifiques modernes en Russie à la fin des années 1910- début des années 1920 : le cas du Cercle linguistique de Moscou - Dušan Radunović p. 137-150 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
          Le sujet de l'article est l'état des sciences du langage et des arts en Russie, durant la période allant de 1915 à 1929, mis en relation avec l'affaiblissement de la cohésion sociale dans l'Empire et l'apparition de la « modernité séculière ». Les manifestations les plus importantes de ces phénomènes sociaux en sciences humaines sont l'émergence d'un modèle non-sémantique dans les sciences du langage et des arts et l'affirmation d'une production institutionnelle du savoir. Afin d'éclairer l'interaction de ces deux phénomènes, l'article est centré sur le Cercle linguistique de Moscou, qui constitue la meilleure étude de cas d'une institution moderne, à la fois pour le savoir produit et pour les méthodes de travail adoptées. L'article mobilise la théorie des mouvements scientifique et intellectuel de Frickel et Gross et le modèle d'évolution des groupes scientifiques de Nicholas Mullins afin de rendre compte du développement, puis du déclin de l'approche proposée par le Cercle. L'abandon d'une étude non-sémantique de l'art et du langage est interprété comme un revirement épistémologique, témoignant de l'échec des années 1920 à remplir leur rôle de modernisation.
          This article assesses the landscape of Russian studies of art and language in the period 1915-1929 in the light of the loosening of the system of social cohesion in Imperial years and in the context of the rise of ‘secular modernity'. The most relevant manifestations of these processes in the field of human sciences are the cognitive transformation of knowledge towards a non-semantic model of art and language and the definitive inauguration of the institutional mode of knowledge production. In order to elucidate the joint working of these two phenomena the paper focuses on the foremost scientific institution at the time, the Moscow Linguistic Circle, which emerges as the chief case study both for the scientific ideas it produced and for the mode of scientific research it espoused. The paper utilises Frickel and Gross's general theory of scientific and intellectual movements and N. C. Mullins's group model of scientific development to trace and explain the rise and fall of the Circle's approach to art and language and finally evaluates the decline of the non-semantic study of art and language as an epistemological reversal indicating the failure of the Soviet 1920s to fulfil its modernising mission.
        • Заседание Московского лингвистического кружка 1июня 1919 г. и зарождение стиховедческих концепций Б.Томашевского, О. Брика и Р. Якобсона = The meeting of the Moscow Linguistic Circle of June 1rst 1919 and the Genesis of the Prosodic Theories of Osip Brik, Boris Tomashevsky and Roman Jakobson - Igor Pilsčikov p. 151-175
        • Science, révolution, poésie : le cas d'Ivan Nikanorovič Rozanov (1874-1959) = Science, Revolution, Poetry : the Case of Ivan Nikanorovich Rozanov (1874-1959) - Nikolaj Bogomolov, Daria Sinichkina et Catherine Depretto [Trad.] p. 177-191 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
          I. N. Rozanov a laissé l'image d'un critique littéraire assez traditionnel. Toutefois, son journal tend à corriger cette impression, en particulier pour la période qui suit la révolution de 1917. On y découvre sa participation régulière aux séances du Cercle linguistique de Moscou, son intérêt pour la poésie d'avant-garde. Son analyse de la poésie russe de l'époque le place plutôt du côté des courants novateurs de la critique, évoquant par instants l'approche de Jurij Tynjanov.
          I. N. Rozanov is known as a rather traditional literary critic. However his diary shows another image of him, particularly in the period following the Russian Revolution. I. N. Rozanov regularly participates in the meetings of the Moscow Linguistic Circle and is very interested by the poetic avant-garde. Some of Rozanov's notes about the contemporary Russian poetry are close to the conceptions of modern literary criticism of that time, to Jurii Tynianov's views especially.
        • De l'art autonome du texte à la parole d'autrui : Boris Èjxenbaum et la rhétorique = From Textual Autonomous Art to Individual Speech : Boris Eikhenbaum faced with Rhetoric - Stefania Sini, Alessandra Mosca [Trad.], Claire Delaunay et Catherine Depretto [Collab.] p. 193-203 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
          Dans l'article consacré au style de Lenin (LEF, 1924), Èjxenbaum s'éloigne des territoires appartenant canoniquement à la langue poétique afin d'en explorer les périphéries, dans un hybride de stratégies expressives et de besoins pratiques, d'urgence historique et d'impulsions créatrices. À travers l'analyse stylistique de la langue de Lenin, Èjxenbaum circonscrit la sphère des discours persuasifs, le champ de la rhétorique, où se croisent et coexistent de multiples finalités, l'ancrage dans le hic et nunc et la profusion de procédés, intonations, constructions syntaxiques, schémas rythmiques. L'étude sur Lenin met ainsi en lumière la richesse de stimuli théoriques et méthodologiques que présente la zone de frontière entre littérature et société : le problème des relations entre ces deux domaines, dans le présent et dans le passé, occupera dorénavant de plus en plus l'esprit et le temps d'Èjxenbaum et des autres formalistes, qui se pencheront souvent sur des questions concernant les discours individuels, questions qui dépassent, de fait, l'impératif de l'immanence textuelle.
          In the article devoted to the style of Lenin's speeches, (“Lef”, 1924), Eikhenbaum's analysis withdraws from the territory canonically pertaining to the domain of poetic language, to explore its suburbs : a hybrid zone of expressive strategies and practical needs, of historical impulses and creative urgencies. Through the stylistic analysis of Lenin's discourse, Eikhenbaum circumscribes the sphere of persuasive words, the field of rhetoric, where multiple purposes, rooted in the hic et nunc and a profusion of proceedings, intonations, syntactic architectures, rhythmic patterns intersect each other and coexist. The problem of present and past relationships between literature and society, of that border area that the essay on Lenin has shown as dense of theoretical and methodological stimuli, will therefore occupy more and more the time and the interests of Eikhenbaum and of the other formalists, and will often touch issues concerning the persuasive public speech, problems that constitutionally go beyond the imperative of the textual immanence.
        • андрей белый о ритме Mедного всадника = Andrei Bely about the Rhythm of the Bronze Horseman - Ilona Svetlikova p. 205-219 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
          L'article est consacré au livre d'Andrej Belyj le Rythme comme dialectique et le Cavalier de Bronze (1929) et à ses liens avec le roman de Belyj, Pétersbourg (1913 ; première publication 1916) comme avec ses nombreux articles. Dans le Rythme comme dialectique, Belyj fait de Puškin un poète révolutionnaire et tente de justifier cette idée par une analyse statistique des vers de Puškin qui abonde en erreurs. Cette transformation du Cavalier de Bronze (1833) en une œuvre révolutionnaire aurait dû avoir un effet positif sur la réputation de Belyj, en montrant que sa recherche sur le vers était idéologiquement utile pour l'Etat soviétique. En outre, son analyse du Cavalier de bronze donne l'impression rétrospective que son roman Pétersbourg est, lui aussi, très révolutionnaire. La comparaison de l'étude de 1929 avec le roman jette, sur les deux œuvres, une nouvelle lumière.
          The article is devoted to the analysis of Andrej Belyj's book Rythm as Dialectics and ‘The Bronze Horseman' (1929) and its numerous connections with Belyj's early articles and his novel Petersburg (1913). Rythm as Dialectics purported to present Pushkin as a revolutionary poet. Belyj tried to support this argument with his statistical analysis of Pushkin's verse which contained numerous errors. Belyj must have hoped that this transformation of The Bronze Horseman into a revolutionary work could have a positive impact on his reputation, demonstrating the ideological usefulness of his studies of verse for the Soviet state. Moreover, Belyj's research produces an impression that not only Pushkin's poem, but Bely's novel Petersburg was deeply revolutionary in spirit. The comparison of this research with the novel sheds new light on both the former, and the latter.
        • The Excursionism Project and the Study of Literary Places (1921-1924) = Le projet excursionniste et l'étude des sites littéraires (1921-1924) - Frances Nethercott p. 221-235 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
          L'article décrit l'histoire de “l'excursionisme”, une approche multidisciplinaire de l'étude de l'environnement urbain qui au début des années vingt a brièvement bénéficié du financement du Narkompros dans le but de promouvoir un nouveau programme révolutionnaire d'éducation et de recherche dans les humanités et en science. L'essentiel de l'article est consacré aux théories des espaces urbains en tant que complexes historiques et littéraires, que Ivan Grevs et Nikolaj Anciferov, l'un et l'autre spécialistes d'histoire européenne médiévale, ont développées comme un des trois principaux axes de l'excursionisme, à côté de l'histoire naturelle et l'économie. Au milieu des années vingt, le projet excursionniste est éclipsé par le développement des études regionales (kraevedenie). Néanmoins, je soutiens que certains aspects de leur méthodologie pionnière, et, en particulier, l'approche littéraire des espaces urbains d'Anciferov est restée pertinente pour la génération des théoriciens et des historiens de la culture, active à l'époque post stalinienne.
          The article charts the history of ‘excursionism', a multi-disciplinary approach to the study of urban environments, which, in the early 1920s, briefly benefitted from Narkompros funding for the purposes of advancing a revolutionary new programme of education and research in the humanities and science. The main part of the article focuses on theories of urban spaces as cultural historical and literary complexes, which Ivan Grevs (1860-1941) and Nikolai Antsiferov (1889-1958), both trained in European mediaeval history, developed as one of the three principal axes of excursionism, alongside natural history and economics. By the mid-1920s, the excursionism project would be eclipsed by the rise of regional studies (kraevedenie). Yet, despite this, I argue that certain aspects of the methodology they pioneered and, in particular, Antsiferov's literary approach to urban spaces remained relevant to the generation of cultural theorists and historians active in the post-Stalinist era.
        • « Наследство и наследственность » : эволюция критики русской детской литературы 1910-1920-х годов = Heritage and Heredity. The Evolution of the Critique of Children's Literature in the 1910s-1920s - Svetlana Maslinskaia p. 237-255 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
          Depuis cent ans, l'évolution de la littérature pour enfants en Russie, suite à la révolution de 1917, est décrite en termes d'opposition des traditions, de dépassement des thématiques et des genres prérévolutionnaires, de rupture dans l'œuvre de tel ou tel auteur, etc. Dans cet article, l'A. prend ses distances par rapport à ces schémas et montre, au contraire, la continuité de la littérature russe pour enfants des années 1910 à 1930. Analysant les articles critiques publiés avant et après la Révolution, l'A. suit en particulier l'évolution des catégories d'« ancien » et de « nouveau » et montre la permanence de la conception de la littérature pour enfants. D'où il ressort que les éléments principaux du concept soviétique de « nouvelle » littérature remontent à un modèle proposé par la critique prérévolutionnaire. Ainsi, malgré une rhétorique du renouveau très présente, les premiers débats soviétiques concernant la littérature pour enfants ne proposent aucune approche originale.
          During the last 100 years children's literature in Russia before and after the revolution of 1917 is habitually described in terms of confrontation of traditions, overcoming of pre-revolutionary themes and genres, turning points in the careers of individual children's writers, etc. In this paper, I distance myself from this conventional analytical frame and choose the idea of a continuity of a literary process of 1910-1930s as a starting point. Using journal articles by literary critics published during the pre- and post-revolutionary period I trace how the concepts of “old” and “new” children's literature evolved. The continuity of the ideas of what appropriate children's literature should look like is manifest in the critical works analyzed. Ultimately, I argue that the Soviet concept of “new” children's literature in its basic terms goes back to the model of children's literature articulated by pre-revolutionary critics. Hence, despite the saturated discourse of novelty, conceptually there was nothing new in the early Soviet discussions of children's literature.
      • Savants et politique
        • La vie ne s'interrompt jamais : Julian Oksman et la Révolution = ‘Life doesn't stop going on' : Julian Oksman (1895-1970) and Revolution - Valentin Parsamov, Marie Velikanov [Trad.], Eugène Priadko et Catherine Depretto [Collab;] p. 259-279 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
          Les conceptions scientifiques et méthodologiques du philologue russe Jul. G. Oksman se sont constituées dans les années pré-révolutionaires et révolutionnaires. Cependant cette période de sa biographie et de son œuvre est précisément la moins bien connue. Sur la base de sources d'origine personnelle et de ses premiers articles, l'article tente d'approcher la perception de la révolution de 1917 qui était celle d'Oksman et d'établir à quel point celle-ci a influencé sa recherche. L'article jette un double éclairage, rétrospectif (fondé sur ses mémoires tardifs), et contemporain des événements (qui s'appuie sur ses lettres à femme Antonina Oksman des années 1910). L'accent est mis sur les sources philosophiques de la méthodologie d'Oksman et sur la question de son rapport aux formalistes. L'ensemble est mis en relation avec les tendances idéologiques et méthodologiques de l'époque révolutionnaire.
          Scientific views and methodology of the Russian philologist Yu. G. Oksman were formed in the prerevolutionary and revolutionary years. However this period of his biography is least known. On the basis of archival sources of personal origin, as well as his early works, the article shows how Oksman perceived the revolution of 1917 and reveals to what extent it affected the nature of his scientific research. The article gives a double coverage of the problem: a retrospective based on the latest memoirs of Oksman about the revolution, and synchronous with revolutionary events, preserving the effect of their unpredictability, based on his letters to his wife Antonina Oksman of the 1910s. The philosophical origins of the Oksman's methodology are shown. The problem “Oksman and formalists” is posed. Oksman's scientific ideas are considered in the context of ideological and methodological trends of the revolutionary period.
        • La trajectoire d'Alfred Bem à travers sa correspondance (1917-1921) = Alfred Bem's Trajectory through his correspondence (1917-1921) - Stéphanie Cirac p. 281-307 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
          Quel effet la Révolution a-t-elle eu sur le parcours d'un philologue russe, spécialiste de littérature – Al′fred Ljudvigovič Bem ? Février, mars, juillet, octobre trouvent dans sa correspondance des échos différents – en raison aussi de ses propres déplacements et séjours plus ou moins prolongés, qui le retiennent en Ukraine entre l'été 1917 et juillet 1918. Ces activités scientifiques et sa lecture des événements portent la trace de cet éloignement. À travers sa correspondance, l'on peut suivre sa position et son évolution dans le champ de la philologie au moment de la révolution et ultérieurement, mais aussi la perception que le savant a eue de 1917 et de ses répercussions sur le milieu scientifique. À cette fin, nous nous référons à la correspondance entre Bem et ses contemporains – Arkadij Iskoz et Vsevolod Sreznevskij pendant la Révolution et les deux années qui l'ont suivie. Ces écrits représentent les rares traces témoignant de ces années.
          What effect had the revolution on the pathway of a Russian philologist – Al′fred Ljudvigovich Bem ? February, March, July, October have different resonances in his correspondence. Changes of view are obviously due to historical events, but also to his own situation and frequent journeys and stays in Ukraine between summer 1917 until July 1918. Remoteness marks his activities and reading of events. Through his correspondence, one can grasp his position and his evolution in the field of scholarship at the time of the revolution and later ; one may also note his interpretation of 1917 and its aftermaths on his scientific milieu. For this purpose, we'll refer to Bem's correspondence with his peers – Arkady Iskoz and Vsevolod Sreznevsky – during the revolution and the following years. These writings belong to the rare material evidence witnessing his Russian past.
        • Spiritual Streams and Cultural Models pursued by Russian Literary Scholars exiled in Interwar Czechoslovakia (R. Jakobson versus E. Liatsky) = Tendances intellectuelles et modèles culturels des savants russes émigrés à Prague dans l'entre-deux-guerres (Roman Jakobson versus Evgenij Ljackij) - Miloš Zelenka p. 309-326 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
          S'appuyant sur des archives inédites, l'étude se penche sur le cas des philologues russes émigrés en Tchécoslovaquie dans l'entre-deux-guerres. Elle s'intéresse notamment aux tentatives de cette communauté pour s'intégrer au milieu tchèque. Dans cette optique, Ljackij et Jakobson peuvent être considérés comme des modèles représentatifs de deux courants différents de la communauté scientifique émigrée tout en démontrant également la structuration interne et la diversité des valeurs au sein de ladite communauté. Ljackij, plus âgé, représente un premier courant de chercheurs, plus important, marqué par le positivisme, le psychologisme et l ́école historico-culturelle, exilé dès la Révolution d'octobre. En revanche, Jakobson incarne une autre tendance, non hostile à la Russie soviétique, plus ouverte aux courants modernes sur un plan méthodologique. Ainsi, l'intégration des théories du formalisme russe débouche-t-elle sur le courant structural, avec pour ancrage institutionnel le Cercle linguistique de Prague. Si la seconde tendance et notamment les travaux de Jakobson ont été jusqu'à présent l'objet d'un intérêt soutenu, la tendance positiviste, psychologisante, véhicule, elle aussi, des valeurs dignes d'intérêt, ce dont témoigne le manuscrit récemment trouvé d'une Histoire de la littérature russe, sous-titrée « La littérature russe du XVIIIe siècle, dû à Ljackij ».
          Grounded in hitherto unpublished archive material, the paper explores the phenomenon of Russian literary scholars in inter-war Czechoslovakia, with special regard to the clash between this research community and the local context in the early 1920s. Thus Lyatskyi and Jakobson can be seen as models who represent two different types of scholarly exiles, manifesting the inner structuralisation and value differentiation of exile activities. Whereas Lyatskyi belongs to the earlier, larger group of researchers who espoused positivism, psychologism and cultural history, who emigrated immediately after the October Revolution and tried to commune with the new surroundings, younger and more radical Jakobson, by contrast, symbolises the other grouping which, though a political embodiment of Soviet Russia, methodologically remained more open to modern impulses. As a result, Russian formalist school became instrumental in developing structural aesthetics that was institutionally rooted in the Prague Linguistic Circle. While the latter has always been a focus of attention in professional circles, namely the thought-provoking works of R. Jakobson, the former, i.e. the positivist, psychologist and culturally historical orientation of Russian exile still awaits critical consideration. It can offer worthy ideas as evidenced by the newly discovered manuscript of Lyatskyi's monumental Historical Outline of Russian Literature, subtitled « Russian Literature in the Eighteenth Century ».
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