Contenu du sommaire : Rire en ville

Revue Histoire urbaine Mir@bel
Numéro no 31, août 2011
Titre du numéro Rire en ville
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Dossier

    • Rire en ville. Rire de la ville : L'humour et le comique comme objets pour l'histoire urbaine contemporaine - Olivier Ratouis, Martin Baumeister p. 5-18 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La ville, on l'a vu, est tout à la fois un décor, un thème ou un motif. Elle abrite le rire et provoque le rire. Concernant la connaissance de la spécificité des médias (tant artistiques que culturels) pour dire la ville, l'histoire urbaine est en chantier. L'humour est un moyen particulièrement sensible de pénétrer la strate des changements sociaux, un vecteur puissant de compréhension des transformations. Or, la ville aux xixe et xxe siècle est elle-même et le sujet de ces transformations et leur mode d'inscription spatiale dominant. L'hypothèse d'un rire de la grande ville moderne, de la société industrielle, fait donc ici son chemin. Ce rire se découvre ses objets, inédits et liés à un environnement renouvelé. Ce rire en ville est aussi un rire de la ville, qui accompagne au moins jusqu'à la révolution numérique actuelle la conversion définitive et forcenée à la modernité urbaine. L'ambition de ce numéro d'Histoire urbaine est d'en esquisser quelques contours.
      Laughs in the City: humor and comedy as the objects of contemporary urban history
      We have seen the city as simultaneously backdrop, theme and motif; it also shelters laughter as much as it is a source of comedy. Regarding our knowledge of the specificity of both artistic and cultural media in their discourse on the city, urban history is still a work in progress. Humor is a particularly sensitive tool for an approach of social changes, as it is a powerful vehicle for the understanding of transformations. As the city itself is, during the 19th and 20th centuries, the subject of these transformations and the mean of their primary spatial expression, the hypothesis of a laughter of the great modern city, of industrial society, can be envisioned. This laughter of and in the city finds new objects, born of a new environment, and goes along, at least until the current digital revolution, with the frenzied and permanent conversion into urban modernity. This issue of Histoire urbaine aims to sketch its outlines.
    • Rire et identité urbaine : L'invention du Witz à Berlin au XIXe siècle - Martin Baumeister p. 19-45 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'article interroge le « witz » berlinois (trait d'esprit) comme un mode de représentation de la ville et de ses habitants dans une ère de profondes transformations urbaines, des années 1820 jusqu'à la première guerre mondiale. Il s'efforce d'expliquer les fonctions sociale et politique du « witz » ainsi que les raisons de son succès comme pratique culturelle urbaine et comme une dimension spécifique de Berlin. Le « witz » berlinois implique les questions d'identité sociale, de relations de pouvoirs et de hiérarchie, d'inclusion et d'exclusion, qui sont analysées à partir des genres comiques de la littérature populaire et du théâtre mais aussi des débats contemporains sur le « witz » lui-même. Celui-ci peut être compris comme un produit culturel issu du rapide développement d'une culture populaire qui s'est attachée à capter tous les aspects de la vie quotidienne. Il a transité entre élites et couches populaires sous l'effet de la censure et de la répression politique ainsi que du commerce croissant. Le «witz» berlinois s'est constitué comme une forme particulière de communication qui convenait particulièrement à une ville en voie de métropolisation dans une ère de profonde détresse sociale et de conflits politiques.
      Laughter and the metropolitan identity in 19th century Berlin. The invention of the Berlin witz
      The article discusses “Berlin witz” as a mode of representing the city and its inhabitants in an era of profound urban transformations, from the 1 820s until World War One. It tries to explain the social and political functions of “witz” as well as the reasons for its success as a cultural practice in the city and as a particular feature of the Berlin character. “Berlin witz” dealt with questions of social identity, power relations and hierarchies, of inclusion and exclusion, which are analysed by considering comical genres of popular literature and theatre on the one hand and of the contemporary debates and comments about “witz” on the other hand. “Berlin witz” can be understood as a media product emerging from a quickly developing popular culture, that eagerly picked up all aspects of local everyday life. It could easily move between the spheres of elite and popular culture under the conditions of censorship and political repression as well as of an increasing commercialisation. In its versatility and ambiguity, “Berlin witz” rose as a particular form of communication and representation that suited perfectly to the city on its way to become a modern metropolis in an era of deep social distress and political conflict.
    • Se baigner ensemble : Les corps au quotidien et les bains publics parisiens avant 1850 selon Daumier - Davide Lombardo p. 47-68 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      En 1839, Honoré Daumier commence à publier des lithographies dédiées aux baigneurs, qui, l'été, se délassent dans les établissements ouverts en bord de Seine. La pratique des bains était alors l'objet d'une réglementation de plus en plus stricte, dans une ville qui dans les années trente et quarante, allait subir de profondes transformations (même si celles-ci furent moins spectaculaires que celles des années cinquante) : pavage des rues, système d'égouts. Daumier fait un usage très original de ses baigneurs, usage qui se situe bien au delà des productions dominantes de l'époque visant à représenter le corps du baigneur - hygiénique, sociale, érotique ou esthétique. Daumier se moque de la culture hygiéniste (et des tensions entre classes) qui touche au thème des bains. Il subvertit le corps idéal bourgeois en le dévoilant dans toute son animalité, mais en même temps, il se refuse à adopter un regard érotique quand il figure des scènes de sociabilité. La stratégie de Daumier n'est pas celle d'une résistance ou subversion des idées et valeurs reçues à propos du corps, il s'agit plutôt d'une affirmation de l'expressivité du corps lui-même et d'une recherche sur son quotidien.
      Bathing together: Daumier's everyday bodies and Parisian public baths before 1850In 1839 Honoré Daumier starts to publish lithographs on summer bathing in the Seine, an urban custom which was being increasingly regulated. Paris in the 1830s and 40s was undergoing a major transformation from city to metropolis, subtler however not less decisive than the spectacular ones that was to take place in the fifties. Street paving, sewage system, transformation were undergoing major transformation.Daumier used his bathers in a totally original manner, one that eschewed all of the dominant ways - hygienic, social, erotic, aesthetic - of discussing and representing the bathing body. Daumier, mocks the hygienic culture (and class tensions) surrounding bathing, and subverts the ideal male bourgeois body by revealing it in all its grotesque animality, but also deliberately refuses to employ an erotic gaze when depicting social scenes. Daumier's strategy should not be seen as a resistance to or subversion of certain received values and aesthetics about the human body but as an assertion of actual bodily expressiveness and an inquire into their everydayness.
    • Eugène Poubelle mis en boîte - Agnès Sandras p. 69-91 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      En 1883, la mise en place d'une boîte à ordures, à l'initiative du préfet Eugène Poubelle, suscite un tollé général. Pourtant, quelques mois plus tard, l'objet est adopté par les Parisiens qui le désignent désormais par le nom de son inventeur. Le charivari orchestrè autour de la « poubelle » a en effet dédramatisé la nouveauté. Grâce au rire scatologique, la ville a dévore et digéré ce qui avait été identifié comme une transgression morale et sociale.
      Trash talking Poubelle
      In 1883 the setting up of a garbage disposal box, at préfet Eugène Poubelle's instigation, causes a public outcry. The object is however accepted after a few months by Parisians, who start calling it after it's inventor. The uproar created by “la poubelle” allows the shocking newness of the contraption to be laughed off. Thanks to scatological laughter, the city is able to devour and ingest what was previously seen as moral and social transgression.
    • Les revues théâtrales locales en France 1855-1930 : S'identifier en riant ? - Pierre le Goïc p. 93-113 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Un court siècle a transformé la France urbaine. Un nouveau genre de spectacles, la revue théâtrale locale, a accompagné cette mutation d'environ 1855 à 1930. D'anciens citadins ne reconnaissaient plus un cadre de vie que découvraient simultanément de jeunes ruraux. Le développement d'une industrie du spectacle facilita sans doute l'intégration culturelle. Rire - ou sourire - en ville contribua à une coexistence qui devint identité, sans pour autant faire oublier les différences sociales.
      The Revues in France, 1855-1930: urban identity ?
      French towns were very deeply transformed in a short century near 1850-1930. Old city dwellers no longer recognized the urban life they had discovered. The young countrymen were confused. Perhaps integration was made easier by the development of show business. Laughing and smiling in the city facilitated coexistence, which later became an urban identity.
    • S'amuser en guerre : Le cas de Berlin (1914-1918) - Jan Rüger p. 115-128 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      L'article s'efforce de reconstruire les enjeux clés du débat sur le divertissement public urbain à Berlin durant la Première Guerre mondiale. En août 1914, les autorités de la capitale impériale décidèrent l'interdiction des divertissements publics. Toutes les activités contraires au sérieux exigé par le temps durent être arrêtées. Comment cette position a-t-elle évolué au cours de la guerre et quelles furent ses implications politiques ? L'article développe l'idée que les formes changeantes du divertissement n'ont pas simplement anticipé ou reflété l'effort public de mobilisation en faveur de la guerre, mais plutôt défié les attitudes officielles à un moment où les questions de la souveraineté et de l'autorité devenaient plus fortes que jamais.
      Amusement in Berlin during the First World War
      This paper reconstructs key aspects of the debate about amusement in Berlin during the First World War. In August 1914, the Berlin authorities pronounced a taboo on public amusement: all activity that stood in contradiction to ‘the seriousness of the times' was to be stopped. How did this position change with the course of the war and what were the political implications ? The paper argues that the reaction of public amusement in Berlin to the war did not simply anticipate or mirror the government-led mobilization for war. Rather, it could challenge official attitudes and official attitudes could change in response - at a time when questions about sovereignty and entitlement were becoming more urgent than ever before.
    • Rire, une forme de réception de l'urbanisme moderne : Le moment '58 - Olivier Ratouis p. 129-150 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      En France et plus généralement en Europe, la modernité urbaine connaît un moment charnière dans les années 1950, marqué par la reconstruction d'après guerre et la rupture des modes de vie souvent qualifiée « d'américanisation ». Ces changements suscitent différentes émotions parmi lesquelles le rire constitue à titre individuel et collectif une forme de prise de distance et d'appropriation d'une réalité mouvante, que l'on se propose ici d'étudier à partir des vecteurs de la nouvelle culture de masse. Considérant les œuvres comiques comme des formes de réception de l'urbanisme moderne, l'article s'appuie sur un corpus d'œuvres françaises et belges comiques et burlesques dont le pivot est l'année 1958, relevant, par leur succès et leur aura, de la « culture populaire ». Elles sont contextualisées dans l'actualité que souvent elles commentent, en particulier Mon Oncle de Jacques Tati et le Salon des arts ménagers, les œuvres du dessinateur André Franquin et l'Exposition internationale de Bruxelles (dite «Expo '58»).
      Laughter, a form of reception of modern urbanism. The '58 moment
      In France as in general in Europe, the 1950's are a decisive moment for urban modernity, characterized by the post-world war reconstruction and a new lifestyle often called “Americanization”. Several emotions express the depth of transformations. Laughter constitutes a form, both individual and collective, of distancing and appropriation of a moving reality. This article proposes to study it through the vectors of the new mass culture, by considering comic works as forms of reception of modern urbanism. The corpus is made up of French and Belgium comic works and burlesque works created around 1958, which were categorized as “popular culture” in consideration of their success and their aura. The article studies different art works contextualised in the social events that they comment, among others Mon Oncle by Jacques Tati and the Houseware Show (“Salon des arts ménagers”), comics by André Franquin and the International Exhibition of Brussels (called «Expo '58»).
  • Études

    • Limites de la ville et symboles du pouvoir à Rome : Les ambiguïtés des jardins de Mécène - Clément Chillet p. 151-170 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Les limites de la ville de Rome se laissent difficilement cerner, dès l'Antiquité. Un des marqueurs topographiques directement visible pour marquer la ville pourrait être les jardins suburbains qui se situent au-delà de la muraille servienne et du pomérium, marquage symbolique et religieux de la Ville (en tant qu'entité territoriale et territoire sacré). Un ensemble se distingue : les jardins de Mécène sur l'Esquilin franchissent la muraille, et le pomérium qui coïncident en cet endroit. La muraille intégrée dans les jardins est abattue pour laisser place à un bâtiment d'agrément, et les jardins « entrent en ville », jouant sur les limites. Cette situation se double d'une difficulté de dénomination (horti / domus) due au brouillage tant topographique que symbolique: Mécène a un usage de l'habitat et de l'espace novateur. Il a une activité politique dans un espace marque par le loisir. Son intervention est sans doute cautionnée par Auguste : ce dernier a un besoin politique tant de Mécène que de son domaine qui a à voir, par leur jeu sur les limites, avec la maîtrise symbolique de l'espace urbain.
      Maecenas and his gardens in Rome
      Rome's boundaries have never been easy to locate, even in Antiquity. A possible topographical trace might be the horti suburbani, which are all situated beyond both the Servian city-wall and the pomoerium, the symbolic and religious landmark of the City as territorial entity and holy ground. One estate stands out: Maecenas' gardens, on the Esquiline, spreading over both the wall and the pomoerium, which coincide in this area, into the city. The wall was integrated into the gardens, and even pulled down, in order to build a pleasure-house, and the gardens “stepped into the city”, toying with the line. This state of affairs was coupled with a problem of designation (horti/domus) because of the topographical and symbolic confusion this position created: Maecenas had an innovative use of housing and of space. He carried out his political activities in a place designed for leisure. He may have been supported by Augustus in this; indeed, the emperor had a political need for both Maecenas and his gardens which, through their play on limits, had a symbolical significance for the mastery of urban space
  • Sources

  • Profil

  • Lectures