Contenu du sommaire : Patronat, syndicats ou salariés : qui servent les experts ?

Revue Agone Mir@bel
Numéro no 62, 2018
Titre du numéro Patronat, syndicats ou salariés : qui servent les experts ?
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Patronat, syndicats ou salariés : qui servent les experts ?

    • L'expertise entre arme de domination patronale et instrument de résistance syndicale : Les consultants dans les restructurations - Baptiste Giraud p. 7-14 accès libre
    • Vivre du licenciement des autres : Forme et usages des prestations de conseil en « pilotage des restructurations » - Chloé Biaggi p. 15-36 accès libre avec résumé
      Ce n'est pas la peur d'une improbable invalidation judiciaire ou administrative des licenciements collectifs qui motive les directions d'entreprises à recourir aux prestations de consultants spécialisés. Mais la haute technicité des procédures induit malgré tout des possibilités d'erreurs qui peuvent être exploitées par les salariés devant la justice, ce qui entraîne des coûts et des délais supplémentaires. Les directions cherchent aussi à limiter l'ampleur des mobilisations collectives des salariés. La mission des cabinets de conseil consiste à assurer les conditions du bon déroulé du « projet » en imaginant une multitude de scénarios et en élaborant des contre-stratégies adaptées.
    • Faire du droit une arme de domination patronale : L'intervention des avocats dans la mise en œuvre des plans de sauvegarde de l'emploi - Héléna Yazdanpanah p. 37-52 accès libre avec résumé
      En contexte de restructuration, le rôle des avocats consiste à traduire juridiquement les positions patronales. Le recours à des consultants et à des professionnels du droit, souvent bien en amont de l'annonce des PSE, permet aux directions d'entreprises de préparer leurs prises de position, en construisant des argumentaires économiques et juridiques, et de sécuriser leurs stratégies en les faisant entrer dans les cadres de la loi et des attentes de l'administration. Ce faisant, les avocats créent chez leurs clients des effets d'apprentissage du droit, et renforcent ainsi l'acculturation des directions aux normes juridiques, ce qui contribue à un processus de « managérialisation » du droit.
    • Le reclassement des licenciés économiques : « Acheter la paix sociale » et distribuer les salariés - Vincent Moeneclaey p. 53-71 accès libre avec résumé
      Plutôt que d'accompagner véritablement vers le retour à l'emploi, le travail des consultants en reclassement collectif des salariés licenciés pour motif économique participe à construire l'idée qu'un reclassement est proposé puis réalisé. Dans le même temps, le déroulement des antennes et les modalités de rétribution des cabinets concourent à ce que les consultants privilégient l'accompagnement des plus disposés socialement. Si bien qu'in fine, la distribution sociale que réalise le reclassement ne tend pas à corriger les inégalités entre les salariés face au licenciement.
    • Un extrait de Quand ils ont fermé l'usine. Lutter contre la délocalisation dans une économie globalisée - Baptiste Giraud, Marion Rabier p. 73-83 accès libre avec résumé
      L'une des originalités Quand ils ont fermé l'usine est de montrer que si la mobilisation du collectif des salariés de Molex décline logiquement une fois la fermeture de l'usine définitivement confirmée, elle se poursuit néanmoins. Paradoxalement, les dispositifs de reclassement peuvent créer les conditions du maintien de formes de résistance individuelle et collective des salariés. Espace de sociabilité, utile pour maintenir un entre-soi, les réunions collectives des antennes de reclassement peuvent aussi devenir des espaces de renforcement collectif et les conseillers des alliés, par exemple lorsqu'ils se refusent à dénoncer celles et ceux qui ne cherchent pas de travail.
    • Déréaliser le travail pour tuer l'emploi : Un exemple d'évaluation de la charge de travail dans un projet de restructuration - Martin Eden, Louise Hanoé p. 85-103 accès libre avec résumé
      Si le discours sur la « résistance au changement » peut fleurir, c'est parce que, dans nos sociétés basées sur la propriété privée des moyens de production, le patronat a tout fait pour que l'entreprise reste une « boîte noire ». Rentrer dans l'entreprise, caractériser son processus de production, et la manière dont est exploitée la force de travail, identifier les conditions dans lesquelles travaillent les salariés, etc., constituent pour l'employeur une forme d'ingérence insupportable. Invoquer la « résistance au changement » des représentants du personnel permet alors aux directions d'éviter tout débat sur les réorganisations projetées.
    • Du soutien aux syndicats à l'appui au « dialogue social » : Une reconfiguration sous tension des relations entre cabinets d'experts et militants syndicaux - Baptiste Giraud p. 105-122 accès libre avec résumé
      Les logiques des principaux cabinets d'expertise intervenant auprès des représentants du personnel se sont significativement transformées ces dernières années. Dans le cas du cabinet étudié ici, ses liens historiques de proximité avec l'une des principales confédérations syndicales se sont distendus. Son activité s'est étendue à l'intervention auprès de directions d'entreprises et il a investi le marché du reclassement des salariés licenciés. En examinant le déroulement d'une mission d'expertise menée par ce cabinet, on peut saisir les implications de ces évolutions sur les modalités du travail des consultants ainsi que leurs effets ambivalents sur la réception de leur travail par les syndicats et les directions.
    • Prendre soin du travail, une exigence pour l'activité syndicale et la défense des métiers - Alice Cardoso, Catherine Remermier p. 123-140 accès libre avec résumé
      Dans l'Éducation nationale, l'absence de demande de l'institution, voire le déni et la suspicion de conservatisme à l'égard des personnels, ne facilite pas l'entreprise de prise en compte du réel du travail portée par l'organisation syndicale. Il est pourtant de la responsabilité du syndicat non seulement de permettre à ceux qui travaillent de redevenir les experts de leur propre travail et de discuter avec les directions des prescriptions, de relayer cette parole, mais aussi de s'appuyer sur ce qu'elle enseigne pour faire revenir dans toutes les instances de discussion avec les décideurs cette réalité du travail des professionnels qu'il représente.
  • La leçon des choses