Contenu du sommaire : Se distinguer dans les métiers d'ordre

Revue Sociétés contemporaines Mir@bel
Numéro no 72, 2008
Titre du numéro Se distinguer dans les métiers d'ordre
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Éditorial - p. 5 accès libre
  • Se distinguer dans les métiers d'ordre (armée, police, prison, sécurité privée) - Proteau Laurence, Pruvost Geneviève p. 7-13 accès libre
  • Luttes de prestige entre pairs. Le cas des officiers de l'armée de terre - Coton Christel p. 15-35 accès libre avec résumé
    Cet article traite des registres de consécration à l' oeuvre dans le corps des officiers de l'armée de terre. Dans un espace professionnel profondément ordonné où les régimes de préséance et de subordination sont strictement réglementés, il est intéressant de se pencher sur les pratiques de distinction entre pairs. Loin d'être univoques, elles traduisent l'existence de préséances en concurrence avec les échelles hiérarchiques instituées par le grade. Si le respect de la règle apparaît bien comme un code de conduite unanimement valorisé, la distinction entre pairs de même grade se joue sur une certaine forme de virtuosité et d'écart produite dans les règles d'un art qui ne saurait être strictement qualifié de militaire. Les dispositions aux « coups d'éclat », inégalement distribuées entre les agents, ne reposent pas uniquement sur des labels indigènes (qualité du recrutement ou arme d'appartenance plus ou moins « guerrière »). Les qualités distinctives relèvent également de registres culturels et scolaires, tout à la fois déniés et omniprésents dans les formes empruntées par les virtuoses les plus « militaires ».
  • L'Etat en action : classements et hiérarchies dans les investigations policières en matière de proxénétisme - Mainsant Gwénaëlle p. 37-57 accès libre avec résumé
    Comment comprendre ce que fait la police dans le cas singulier de missions de lutte contre le proxénétisme ? Quels sont les principes qui régissent l'action des agents publics subalternes (les policiers de terrain) dans les interactions avec les proxénètes et les prostitué-e-s ? L'ethnographie au sein d'un service de police spécialisé permet de mettre au jour ces principes qui, à différentes échelles, classent et hiérarchisent les policiers, leur travail, mais aussi leurs populations cibles. Ces classements se comprennent à la croisée de normes institutionnelles et de logiques de l'action. À une échelle microsociologique, les pratiques des fonctionnaires de police nous livrent ainsi les ressorts d'opérationnalisation d'un pan de l'action publique.
  • Spécialisation et distinction dans un commissariat de police. Ethnographie d'une institution segmentaire - Lemaire Élodie p. 59-79 accès libre avec résumé
    Le processus de spécialisation des services policiers est une tendance ancienne, accrue depuis 1990 dans le contexte de l'émergence du traitement en temps réel de la délinquance et du tournant gestionnaire. Quels en sont les effets sur le travail policier ? L'analyse des données recueillies lors d'une recherche de terrain d'une année dans un commissariat central de province a pour ambition de saisir au plus près le principe de segmentation professionnelle. Loin de déboucher sur une complémentarité des pratiques, il nourrit encore davantage la compétition et la concurrence observables entre « petits » services spécialisés engagés dans des stratégies de distinction professionnelles souvent dérisoires.
  • Ordre et désordre dans les coulisses d'une profession. L'exemple de la police nationale - Pruvost Geneviève p. 81-101 accès libre avec résumé
    La gestion du désordre qui règne en coulisses, hors de la vue de la hiérarchie et du public, constitue un indice certain du degré de professionnalisation d'une profession. La police est sur ce plan particulièrement exposée dans la mesure où le niveau de relâchement y est très élevé et où il occupe une fonction nodale dans l'organisation du travail : les policiers, pour s'assurer d'une solidarité de corps et pour se protéger du « sale boulot », s'emploient à mettre distance leur métier pendant les pauses ou dans les salles de repos. Pour ce faire, les hommes, mais aussi les femmes, usent des ressources offertes par l'homo-sociabilité virile. Cette étude de la nature des activités de coulisses, mais aussi des différences de participation selon le grade, le service et le sexe vise à mettre en évidence le primat de la sociabilité policière sur l'accomplissement du travail lui-même.
  • Une mise à distance pragmatique de la force physique. Formes et fondements de la sécurité privée en Argentine - Valcarce Federico Lorenc p. 103-123 accès libre avec résumé
    Cet article analyse la production d'un ordre instrumental dans des situations d'interaction entre les agents de sécurité privée, les commanditaires de leurs services et les différentes catégories de public. Loin de prendre en charge tout le contrôle de la délinquance, les personnels de sécurité privée sont d'abord concernés par la prévention des pertes, le maintien de l'ordre et la prestation de services généraux à leurs clients. Les agents chargés d'accomplir ces tâches valorisent donc des compétences qui s'éloignent de plus en plus du modèle policier, pourtant à l'origine des métiers de la sécurité privé. En effet, ils revendiquent une approche relationnelle des situations du travail. Cela tient en grande partie au changement dans le recrutement et aux liens subjectifs qui les attachent à leur poste, mais aussi aux changements dans les conceptions des services en vigueur au sein d'une industrie de la sécurité privée qui s'est transformée au cours des dernières années.
  • La volonté de savoir sociologique à l'épreuve du terrain. De l'enchantement du commissariat au désenchantement de la prison - Le Caisne Léonore, Proteau Laurence p. 125-149 accès libre avec résumé
    Deux terrains menés auprès des gardiens de l'ordre : l'un de l'extérieur (les policiers), l'autre de l'intérieur (les surveillants de prison). Le premier fut poursuivit suffisamment longtemps pour autoriser la production de connaissances. Le second fut au contraire rapidement interrompu. Les oppositions structurales entre les deux « mondes » expliquent en grande partie ce renoncement. Les policiers d'investigation sont en effet des petits porteurs de mobilité sociale, alors que les surveillants de l'administration pénitentiaire cumulent les signes du déclassement. Leurs positions dans leurs institutions respectives, les caractéristiques de leur travail, ainsi que leurs images sociales ­ valorisés pour les policiers, dévalorisés pour les surveillants ­, les (dé)classent dans l'échelle des valeurs et des honneurs sociaux. Cette configuration sociologique construit les visions du monde des deux professions et rend très difficile le passage du chercheur d'un terrain à l'autre.