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Titre Le crépuscule des monnaies fortes
Auteur Département des diagnostics, Philippe Sigogne, Jacky Fayolle, Hélène Baudchon, Odile Chagny, Amel Falah, Olivier Passet, Christine Rifflart, Françoise Milewski, Valérie Chauvin, Hervé Péléraux
Mir@bel Revue Revue de l'OFCE (Observations et diagnostics économiques)
Numéro no 57, 1996 Revue de l'OFCE n°57
Rubrique / Thématique
Chronique de conjoncture
Page 5-94
Mots-clés (géographie)Allemagne Etats Unis France Japon Monde Royaume Uni
Mots-clés (matière)coopération croissance économique marché financier monnaie politique économique relations économiques situation financière
Mots-clés (organismes)Union européenne - U.E.
Résumé En 1996, le commerce mondial évoluera, dans la foulée du ralentissement de 1995, à un rythme bien plus proche de sa tendance de longue période (5 % l'an) que de la performance moyenne des années 1994-1995 (plus de 10 % l'an). L'infléchissement est net début 1996, surtout pour le commerce intra-européen. Ensuite, le commerce mondial et la demande adressée aux pays européens reviendraient, jusqu'à la fin 1997, sur un rythme de 6 à 7% l'an. La révision des comptes nationaux américains amène à une vision renouvelée de l'expansion enregistrée par les Etats-Unis ces dernières années. C'est dès l'année 1995 désormais que l'atterrissage en douceur paraît s'être inscrit dans les chiffres de croissance (+2,1 % pour le PIB après 3,5 % en 1994). Ce ralentissement doit être compris non pas comme le terme définitif de la phase d'expansion engagée en 1991- 1992, mais comme une pause, qui diffère les tensions, avant un rebond ultérieur. Comme l'action de la Réserve fédérale devrait être assez pragmatique pour éviter aussi bien le risque inflationniste que celui d'une déstabilisation de l'activité, la croissance du PIB, encore en ralentissement en 1996 (+ 1,6 %), reprendrait de la vigueur en 1997 (+ 2 %). Depuis la fin 1995, l'embellie de l'économie japonaise est confortée par la multiplication de signes précurseurs favorables. L'économie japonaise n'en est cependant qu'au stade de la récupération du terrain perdu lors de la rechute du printemps 1995. Le redressement de la demande privée reste partiel. Au-delà d'un horizon de quelques trimestres, la croissance envisageable pour le Japon reste modérée. Le gain sera net en 1996 (+ 2,3 % pour le PIB contre + 0,7 % en 1995) mais 1997 n'enregistrerait pas d'accélération (+ 2,2 %). L'affaissement de la croissance européenne au cours de 1995 n'est pas une simple pause technique, qui manifesterait l'adaptation normale _du_çomportement de stockage aprèsja reprise rapide de 1994. Il repose sur une sérieuse défaillance de la demande finale externe eTinferne, qui interrompt à contretemps le cycle européen, avant que des tensions substantielles sur l'offre aient pu être enregistrées. L'Allemagne rencontre aujourd'hui des difficultés spécifiques sur les marchés internationaux. Elle n'a pas engagé, comme cela était attendu, la reconstitution de ses parts de marché à l'exportation, qui avaient fortement chuté en 1992- 1993. La déception causée par la rechute allemande de 1995 ne signifie pas pour autant une détérioration cumulative de l'activité Outre-Rhin. Les signes de faiblesse sont maximaux en début d'année. Mais les facteurs existent pour une récupération progressive de l'activité, à partir du second semestre 1996. La politique monétaire est supposée rester accommodante. Les exonérations fiscales entrées en vigueur vont redonner du tonus au revenu des ménages. La normalisation des taux de change aidera à la stabilisation des parts de marché à l'exportation. Lestée par les mauvaises performances de la fin 1995 et du début 1996, la progression du PIB resterait faible en 1996 (+ 0,9 %), mais serait plus honorable en 1997 (+ 2,3 %). En France, après le repli du quatrième trimestre 1995, quelques bonnes nouvelles sont apparues au début de 1996, en particulier du côté de la consommation des ménages. Mais les anticipations des entreprises restent dégradées, les carnets de commande sont encore dégarnis, et surtout, les stocks sont jugés excessifs ; l'ajustement des stocks à la demande est donc encore à venir. La demande intérieure finale resterait modérée. Les composantes publiques de la demande (consommation et investissement des administrations) sont orientées à la baisse. La consommation des ménages pâtirait cette année de la faiblesse du revenu ; elle se redresserait à la charnière de 1996 et 1997 grâce à un regain de la masse salariale. C'est la condition pour que la reprise de l'investissement s'amplifie. Les entreprises ont déjà, en 1995, reporté nombre de leurs projets ; leur réalisation suppose un retour d'anticipations favorables sur la demande finale. La reprise des exportations serait progressive, mais supérieure à celle des importations en 1996. Dans le cycle actuel, la France, qui avait dépassé la moyenne européenne dans la reprise de 1994, a décliné plus fortement dans le repli de 1995 et 1996. Les incertitudes sont de deux ordres : en premier lieu, elles concernent la nature de l'ajustement du marché du travail. Depuis l'automne 1995, les effectifs ont stagné ; si les embauches redémarrent progressivement avec le rebond d'activité, alors le regain de la masse salariale fondera celui du revenu disponible et de la consommation. Mais cela signifie que la productivité reste faible. En second lieu, les incertitudes de politique économique demeurent. En matière monétaire, on a supposé que les taux d'intérêt courts continueraient de baisser jusqu'à la fin 1996 et se stabiliseraient ensuite. La baisse des taux longs serait faible. Cette détente est favorable à la croissance, mais elle intervient tardivement dans le cycle. Sur le plan budgétaire, on a retenu qu'il n'y aurait pas de restriction supplémentaire du point de vue des prélèvements, mais une surveillance accentuée des dépenses. Ces deux incertitudes conditionnent la consolidation de la reprise en 1997, après qu'elle aura été portée, à la fin de 1996, par l'arrêt du déstockage. Il faut ainsi prévoir que la détente monétaire se poursuive, que la restriction budgétaire ne s'accentue que modérément, que la reprise de l'emploi survienne, qu'enfin le contexte mondial permette une accélération de la demande extérieure, pour envisager une croissance économique de 1 % cette année et 2,5 % l'an prochain. C'est une croissance sous conditions. Laissant l'économie très en retrait de son potentiel, elle emporterait une très faible hausse des prix, une consolidation de l'excédent extérieur et une légère baisse du chômage en 1997, après sa remontée en 1996.
Source : Éditeur (via Persée)
Résumé anglais In 1996, world trade will grow, following the slowdown of 1995, at a pace nearer to its long term trend (5 % a year) than in 1994-95 (more than 10 % a year on average). The slackening is clear in early 1996, especially as concerns the intra-european trade. Afterwards, up to the end of 1997, world trade and external demand geared to European countries will meet again a yearly rate of 6-7 %. The revision of the American national accounts provides a new vision of the expansion in the United States, over the recent years. The soft landing took place as early as 1995 according to the new statistics (+ 2,1 % for GDP growth, from 3,5 % in 1994). This slowdown is not viewed as terminating the expansion but just as a break, that delays tensions prior to a further progress. As the Federal Reserve would pragmatically act to avoid both inflation and recession, the GDP growth, though declining in 1996 (+ 1,6%), would regain strength in 1997 (+ 2 %). Since the end of 1995, the recovery of the Japanese activity is confirmed by increased favourable signs. Nevertheless, the activity is just making up for the set back of spring 1995. The upturn of the private demand is still weak. Beyond a few quarters, growth will probably stay moderate : + 2,2 % in 1997 and 2,3 % in 1996 from + 0,7 % in 1995. The halting of the European growth in 1995 does not merely reflect a technical pause, related to an usual stock adjustment following the strong "recovery in 1994. A shortage of foreign and domestic final demands stopped the European cycle, before tensions on the supply side sprouted. Germany gets some specific difficulties on the international markets. Since their slump in 1992-93, its export market shares have not yet recovered. But despite an additional setback in 1995, German economy might stop sinking. At the moment, signs of weakness are at their top. However some factors suggest a slow recovery from the latter half of 1996 on. Monetary policy is assumed to be neutral. Tax cuts should stimulate the household income. Moreover, export market shares would be safeguarded thanks to a less overvalued currency. Due to the recent slump, annual growth will be weak in 1996 (+ 0,9 %), then stronger in the coming year (+ 2,3 %). In France, GDP shrank during the last quarter of 1995. Since the beginning of 1996 some good news have appeared, in particular on the private consumption front. But the firms' expectations remain dull : new orders are still scarce and, most of all, inventories are still considered too heavy. The adjustment of stocks to demand is still to come so that the GDP should stabilise for the second quarter 1996 after a rebound in the first quarter. This forecast is heavily dependent on the change in inventories. The final demand would remain moderate. Its public components (public consumption and investment) would still fall. The households consumption would be impeded by weak incomes this year ; then it would rebound around the end of 1996 thanks to stronger compensations. Investment wouldn't go on expanding without this condition. Firms have already postponed many projects in 1995 ; the fulfilment of these projects needs more favourable prospects for the final demand. Exports would pick up slowly, though faster than imports in 1996. In the current cycle, the French economy has been more responsive than the European average. More dynamic in 1994, it declined more during the 1995 — 1996 temporary set back. Uncertainties are twofold. Firstly, they relate to the kind of adjustment on the labour market. Since the autumn 1995, the labour force has stagnated. If firms start gradually rehiring when activity rebounds then compensations will grow and feed households income and consumption. This would imply a still low productivity growth. Secondly, the economic policy remains uncertain. As far as money is concerned, short term interest rates are assumed to drop until the end of 1996 and then stabilize. Long term interest rates would fall slowly. This easing off would favour growth, though occurring late in the cycle. On the budget side, we assumed there would be no further fiscal restriction but expenses would come under further scrutiny. Turning the inventory-led recovery of 1996 into a steady growth in 1997 depends on these two factors. It implies that the monetary policy goes on relaxing, that the fiscal stance isn't too restrictive, that employment picks up and finally that the world economic situation allows foreign demand to accelerate. These conditions would lead to an economic growth of 1 % this year and 2,5 % next year. Such a conditional growth would leave the economy well under its potential. Inflation would remain subdued, the external surplus would be consolidated and unemployment should witness a small fall in 1997 after its pick up in 1996.
Source : Éditeur (via Persée)
Article en ligne http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ofce_0751-6614_1996_num_57_1_1422