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Titre Jeunes agriculteurs et vieux paysans
Auteur Patrick Champagne
Mir@bel Revue Actes de la recherche en sciences sociales
Numéro vol. 26, no. 1, 1979
Page 83-107
Résumé Jeunes agriculteurs et vieux paysans. Le développement des clubs du 3ème âge en milieu rural n'est que le symptôme secondaire de transformations plus générales de l'économie des échanges entre générations, à l'intérieur de familles paysannes notamment. Une enquête monographique effectuée dans un village du Bas-Maine montre que l'implantation de ces clubs est liée à l'accroissement du nombre de paysans retraités et «désoccupés» qui ont dû céder, de façon précoce, l'exploitation à leurs enfants. Mais la crise de la succession qui affecte nombre de familles paysannes et qui trahit l'affaiblissement de la position de la famille comme telle dans les mécanismes de reproduction sociale n'aurait peut-être pas suffi à assurer le succès des clubs du 3ème âge si, dans le même temps, ne s'était produite une déstructuration du groupe villageois. L'isolement des paysans âgés ne pouvait, en effet, que croître avec l'individualisation des travaux agricoles (liée à la mécanisation) et le repliement sur la famille nucléaire. Les clubs du 3ème âge, en cherchant à regrouper les paysans isolés pour mettre fin à leur isolement, constituent sans doute une sorte «d'autogestion de la prise en charge morale» de la vieillesse; mais on peut se demander si leur fonction sociale essentielle ne réside pas dans le travail d'euphémisation et dans la légitimation du déclassement social qu'ils opèrent implicitement. La mise à l'écart, par les enfants, des parents âgés n'est pas sans poser des problèmes moraux et affectifs, comme on le voit dans le cas-limite que représente le placement en maison de retraite. L'analyse de la médicalisation de la vieillesse permet de saisir comment la mauvaise conscience individuelle parvient à se transmuer en bonne foi collective.
Source : Éditeur (via Persée)
Résumé anglais Young Farmers and Old Peasants The growth of senior citizens' clubs in a rural environment is merely a minor symptom of wider transformations in kinship interchange between different generations, notably within peasant families. A monographic survey carried out in a village in the Bas-Maine reveals that the setting up of these clubs is linked to the growth in the number of peasants who are either retired or not in gainful employmenf, who have had to hand over prematurely the running of the farm to their children. But the shortage of effective heirs to the estate which affects a good many peasant families and which betrays the weakening of the position of the family as such within the machinery of social reproduction would not alone have sufficed to ensure the success of the senior citizens' clubs had there not taken place a simultaneous dismemberment of the village group. The isolation of the old peasants was effectively bound to increase given the individualisation of farm labour (linked to mechanization) and the withdrawal into the nuclear family that accompanies this. The senior citizens' clubs, by seeking to rally isolated peasants in order to put a stop their isolation, doubtless constitute a sort of 'self-management of welfare' of old people; but we may ask ourselves whether their essential social function is not more concerned with cushioning and legitimizing a loss of social status, a function which they implicitly fulfil. The discarding of aged parents by their children necessarily creates moral and affective problems, as illustrated by the borderline case of parents being sent to Old Peoples Homes. To analyse the socio-medical care of old people is to grasp the ways in which the bad conscience of the individual insidiously becomes the good intentions of society at large.
Source : Éditeur (via Persée)
Article en ligne http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arss_0335-5322_1979_num_26_1_2631