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Titre Portugal : le poids du passé et l'ouverture sur l'Europe
Auteur Roland Colin
Mir@bel Revue Revue de l'OFCE (Observations et diagnostics économiques)
Titre à cette date : Observations et diagnostics économiques
Numéro No 18, 1987
Rubrique / Thématique
Chroniques d'économies étrangères
Page 5-80
Mots-clés (organismes)Communauté économique européenne - C.E.E.
Mots-clés (matière)histoire histoire des faits économiques politique économique situation économique
Mots-clés (géographie)Portugal
Résumé Le Portugal est entré dans la Communauté économique européenne le 1er janvier 1986. Pour mieux saisir les enjeux de cette situation nouvelle, il paraît nécessaire de prendre en considération le cours de l'histoire et mesurer à quelles conditions le poids du passé peut se muer en ouverture pour l'avenir. Une histoire coloniale très ancienne s'est terminée à travers le drame des guerres de libération en Afrique. Elles ont provoqué un sursaut national, qui a fait s'effondrer le vieil édifice de l'économie et de la société salazariste, et avec lui la « logique de l'or » symbolisant le conservatisme allié au refus de la démocratie. La logique qui prit la suite se réclama d'une révolution s' efforçant d'abolir les injustices sociales : réforme agraire, naissance d'un nouveau droit du travail, nationalisation des rouages essentiels de l'économie, à travers une vie politique tumultueuse, jusqu'à la proclamation de la constitution de 1976 qui donna stabilité à la nouvelle démocratie. Il fallut alors assurer l'équilibre économique par-delà les bouleversements sociaux. Le problème majeur devint rapidement le dérapage des comptes extérieurs. Simultanément l'inflation montait en flèche, alors que le déficit du secteur public pesait de plus en plus lourd. Pour y porter remède le pouvoir politique appliqua à deux reprises (1978 et 1983) des programmes d'austérité rigoureux. L'histoire portugaise récente est ainsi ponctuée d'épisodes de surchauffe et de refroidissement. Pour sortir durablement de ces difficultés récurrentes il paraît indispensable d'engager une profonde transformation des structures de l'économie. Dans cette perspective l'agriculture reste le secteur sensible. Menacée par la politique agricole commune et par la poussée agro-exportatrice de ses nouveaux partenaires, elle devra se moderniser, gagner en productivité et s'armer pour réduire la dépendance alimentaire actuelle (les importations représentent plus de 50 % de la consommation). L'industrie, en situation plus favorable, au moins à court et moyen terme, quant à certaines branches exportatrices à fort coefficient travail (tex- tiles, chaussures), ne pourra pas rivaliser longtemps avec les nouveaux pays industriels du Tiers Monde sans se moderniser et se restructurer. Parmi les services c'est surtout un tourisme dynamique qui comporte de précieuses chances de développement. En 1986 la conjoncture est redevenue favorable. La baisse du dollar et la chute du pétrole apportent un soutien appréciable à un pays particulièrement sensible à ces facteurs extérieurs du fait de sa dépendance énergétique, la plus forte d'Europe. Le Portugal saura-t-il profiter de ce moment favorable pour engager une politique de développement à moyen et long terme, reposant sur une «nouvelle logique », compatible à la fois avec l'ouverture européenne, donc acceptant la compétition sur les marchés intérieurs et extérieurs, et avec la valorisation de ses atouts propres, qui ne sont pas négligeables, ressources humaines à promouvoir, expérience des coopérations et des échanges internationaux avec les pays lusophones, capacités d'épargne encore insuffisamment investies dans l'économie ? La stabilisation démocratique acquise appelle maintenant un ajustement du système politique qui assure d'une stabilité gouvernementale suffisante pour un pilotage en finesse d'une économie soumise à une si profonde mutation.
Résumé anglais Portugal joined the European Economic Community on January 1, 1986. In order to clarify the stakes of this new situation, the historical background must be taken into account. A very ancient colonial history came to an end with the drama of liberation wars, causing a national start and the collapse of the social and economic patterns of the Salazar era. The « Logic of Gold » which symbolized conservatism and the denial of democracy was then given up. It was superseded by the ideals of the Revolution, the aim of which was to abolish social inequalities through the land reform, the labour legislation and the nationalization of the main economic structures. However, political stability was not achieved before the proclamation of the 1976 constitution. Then, the attention focused on the and especially on the huge current account imbalance. At the time, inflation soared and the public deficit kept rising. To cope with those problems, the government set up austerity programmes in and 1983. « Stop and Go » phases have indeed been a main feature the Portuguese economic history. But to durably iron out recurrent difficulties, it seems necessary undertake deeper changes within the economic structures. remains the most sensitive sector in that respect. It will have increase its productivity and reduce the food dependence from abroad (imports amount to 50 % of the present food consumption). If seems in a better position, especially as exporting and sectors are concerned, it will not be able to successfully compete with the Newly Industrialized Countries without modernizing and restructuring. Among services, tourism appears to be the most dynamic and most likely to develop. In 1986 economic conditions have improved. The Portuguese economy has greatly benefited from the fall of the oil price and the dollar, because of its high energetic reliance on imports (the highest in Europe). But will the country be able to take advantage of this favourable situation so as to work out a medium and long term development policy that could combine the acceptance of a fiercer European competition and the promotion of its own ressources ? The political system should now adjust to the stabilization of democracy. Sufficient government stability is indeed required to make a fine tuning policy possible.
Article en ligne http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ofce_0751-6614_1987_num_18_1_1084