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Titre Évolution de la politique littéraire soviétique : XXe-XXVIIe Congrès du Parti communiste de l'Union soviétique
Auteur Dauphine de Montlaur Sloan
Mir@bel Revue Revue d'études comparatives Est-Ouest
Numéro Vol. 18, 3, 1987
Page 123-146
Résumé Cet article explore les rapports entre politique et littérature en U.R.S.S. depuis le premier « dégel » déclenché par le XXe Congrès du Parti communiste de l'Union soviétique, prélude à l'austérité du régime de Leonid Brejnev, jusqu'à F« ouverture » (glasnost) pratiquée par l'actuel Secrétaire général, Mikhaïl Gorbatchev. Les autorités assignent à l'écrivain la mission de défendre et promouvoir l'idéologie officielle, conforter l'assise du pouvoir et éduquer le peuple dans le but d'édifier une société communiste nouvelle. Afin de faire exécuter sa commande, l'État s'est efforcé d'organiser nature et contenu de la littérature ainsi que tout aspect de la profession d'écrivain. Le Réalisme socialiste, modèle littéraire officiel institué en 1932, reste en vigueur et comprend thèmes et héros exaltant idéologie (idejnost) et Parti (partijnost), patriotisme, activisme et optimisme, valeurs contribuant toutes à la force de la nation et auxquelles M. Gorbatchev a désormais rajouté la nécessité d'une critique objective et constructive. Mécanisme précis, la censure contrôle le contenu, l'orthodoxie et l'impact social de toute œuvre et veille ainsi au respect de ces principes. Enfin, l'Union des écrivains régit les devoirs politiques et droits sociaux des écrivains ayant la chance d'appartenir à cette élite. Avantages et récompenses sont offerts aux fidèles serviteurs de l'État ; tracasseries et répression menacent les individualistes. L'interaction entre politique et littérature apparaît clairement puisque l'écrivain demeure un instrument aux mains du pouvoir soviétique : conformiste, il l'assiste en véhiculant sa politique ; non-conformiste, il permet d'évacuer un trop-plein d'insatisfaction, agissant ainsi en « soupape de sûreté », et offre à l'État, par la répression dont il peut faire l'objet, l'occasion de démontrer sa puissance. Toutefois, par contrecoup de l'intervention de l'État dans la création littéraire, l'écrivain soviétique non-conformiste a retrouvé son influence politique et sociale grâce aux moyens techniques (méthode d'Esope) et pratiques (samizdat et tamizdat) mis au point depuis le début des années soixante. Il contribue à l'évolution de son art par l'apport d'idées hétérodoxes d'une part, par une nouvelle esthétique de l'écriture, d'autre part.
Source : Éditeur (via Persée)
Résumé anglais Evolution of Soviet literary policy : XXth-XXVIIth Communist Party Congresses This article examines the relationship between politics and literature in the U.S.S.R. since the first "thaw" brought about by the XXth Communist Party Congress ? a prelud to Leonid Brejnev's repressive regime ? through Mikhail Gorbatchev's openness or glasnost'. Soviet authorities assign the writer the role of defending and promoting the ruling ideology, preserving and consolidating the position of the ruling group, and educating the people in order to build a new, communist society. In order to control the implementation of these tasks, the State has striven to structure the nature and contents of literature and all aspects of the literary profession. An official literaty model, known as Socialist Realism, was instituted in 1932 and remains in force. It involves themes and heroes glorifying Communism (idejnost) and the Communist Party (partijnost) patriotism, activism, optimism. To these values, meant to strengthen the nation, M. Gorbatchev has now added the need for objective and constructive criticism. Censorship plays a major role in ensuring adherence to these principles by means of precise mechanisms for supervising the content, orthodoxy and social impact of all written work. Finally, the Writers' Union regulates the political duties and social rights of the writers loyal or lucky enough to belong to this very select community. A "carrot and stick" program is an integral part of the overall policy related to the rights and duties of writers : advantages and rewards are offered to the faithful servants of the State ; harrassment and repression threaten independent thinkers. The interaction between politics and literature is clearly shown by the use Soviet authorities make of writers for political purposes : conformists serve the State by transmitting its policies ; non-conformists serve as a "safety valve" releasing an overflow of discontent, and the repression targeted at them further demonstrates the State's power. However, as an indirect consequence of State intervention in literature, Soviet non-conformist writers have regained and reinforced their political and social influence with the help of technical (Aesopian method) and practical (samizdat and tamizdat) means developed since the 1960s. Furthermore, by the expression of unorthodox ideas and the development of new esthetics, these writers have contributed to the evolution of their art.
Source : Éditeur (via Persée)
Article en ligne http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/receo_0338-0599_1987_num_18_3_1322