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Titre Correspondance sur la religion entre un Russe et un Anglais (1686-1687)
Auteur Petr Sergeevič Stefanovič
Mir@bel Revue Cahiers du monde russe
Numéro volume 50, no 2-3, avril-septembre 2009 L'Europe orientale, 1650-1730
Rubrique / Thématique
Europe orientale et Occident
Page 453-463
Résumé L'auteur étudie ce qu'on pourrait appeler les « archives russes » d'un marchand anglais, qui a vécu, fait ses affaires et appris le russe à Pskov dans les années 1680. Ces papiers, actuellement reliés dans un recueil factice de la British Library, constituent l'un des rares témoignages que nous possédions sur les contacts informels entre Russes et étrangers à la veille des réformes de Pierre le Grand.La partie la plus intéressante est une correspondance entre un certain Roman Vilimovič et un certain Pëtr Ignat´evič. Le premier est anglais, venu probablement de la colonie anglaise de Narva, alors florissante, le second un citadin (posadskij čelovek) qui enseigne le russe à Roman Vilimovič et l'a même logé un moment chez lui.Leurs lettres abordent toutes sortes de sujets, des menus détails de la vie quotidienne aux problèmes religieux. Le plus étonnant est qu'ils aient trouvé un terrain d'entente dans le domaine extrêmement délicat de la foi. L'Anglais s'intéresse beaucoup à la tradition orthodoxe orientale, et notamment aux rites, le Russe n'hésite pas à faire profiter son élève de son savoir et lui communique des écrits édifiants, dont on trouve des copies manuscrites parmi les documents de la British Library. Tous deux sont d'accord pour dire que « les chrétiens sont nés sur la Terre d'un même Père » (Roman Vilimovič, faisant écho à son correspondant) et devraient s'aimer les uns les autres.Qu'un tel dialogue ait été possible suffit à ébranler les clichés habituels sur la méfiance et l'hostilité réciproques entre les Russes et leurs visiteurs d'Europe occidentale. Les deux correspondants évitent délibérément les questions conflictuelles des icônes, des saints, des rituels, pour se concentrer sur les valeurs qu'ils partagent. Bien qu'ils soient rares, il existe d'autres exemples de ce genre de relations entre des Russes et des Occidentaux – ce qui tend à montrer que les réformes de Pierre Ier n'étaient pas soutenues seulement par l'élite nobiliaire, mais aussi par certains milieux urbains appartenant aux classes moyennes. Pskov, ville-frontière et place de commerce, caractérisée par une certaine ouverture d'esprit et un environnement multi-culturel, a sans doute favorisé ces échanges.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Résumé anglais Correspondence between an Englishman and a Russian regarding religion (1686-1687)The author explores the “Russian archive” of an English merchant, Roman Vilimovich, who lived, ran his business and studied Russian in Pskov in the 1680s. The Englishman's papers (now part of a convolute in the British Library) provide rare evidence of informal contacts between Russians and foreigners on the eve of the Petrine reforms. The most thrilling part is the correspondence between Roman Vilimovich and a certain Piotr Ignat´evich. The former had probably come to Pskov from Narva's then thriving English colony. The latter was a Pskovian townsman (posadskii chelovek) who taught Roman Vilimovich Russian and temporarily hosted him. In their letters the two men discussed a wide variety of topics, from minutiae of everyday life to religious issues. The most striking fact is that they found common ground in the sensitive area of faith. The Englishman shows a great deal of interest in Eastern Orthodox tradition and rites, while the Russian trustingly shares his knowledge and provides religious literature, some copies of which are included in the “archive”. Both men agree on the fundamental idea that “Christians were born into this world from the same Father” (as Roman Vilimovich puts it, echoing Piotr Ignat´evich's words) and should love each other. The very possibility of such a dialogue in Muscovite Russia shatters the stereotype of mutual mistrust and dislike between Russians and West-European visitors. It is significant that the two men should avoid such issues as icons, saints, and ritualistic differences so as to leave the path of conflict and seek shared values. Examples of relationships between a native Russian and a visitor from Western Europe are rare, but they do exist – which means that the Petrine reforms enjoyed “grassroots support” not only among the boyar elite but also in certain circles of the urban middle class. The author suggests that this dialogue was greatly encouraged by the multicultural, rather open-minded environment of the Russian border market town.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Article en ligne http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=CMR_502_0453