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Titre De l'économie émotive de la Terreur
Auteur Sophie Wahnich
Mir@bel Revue Annales. Histoire, Sciences Sociales
Numéro vol. 57, no 4, septembre 2002 Culture de la terreur
Rubrique / Thématique
Culture de la terreur
Page 889-913
Résumé Une approche anthropologique de la Terreur, en particulier l'analyse des notions réflexives de vengeance et de sacré, conduit à proposer une interprétation en termes d'économie émotive et de fondation symbolique. Si le tribunal révolutionnaire créé le 10 mars 1793 vise à ne pas répéter les massacres de septembre 1792, il convient de revisiter ce dossier pour réinterpréter la Terreur. Les acteurs de septembre 1792 reprennent le « glaive de la loi ». Or, dès le 20 juin 1792, dans un contexte d'effroi et de rupture du sacré, des porte-parole populaires expriment la crainte d'avoir à le faire. Si les législateurs, à l'image du roi parjure, rompaient leurs serments de défense indéfectible de la souveraineté du peuple, celui-ci pourrait légalement « résister à l'oppression ». Le 10 août, l'Assemblée, qui a largement désavoué ces porte-parole, n'est plus sollicitée. Du 10 août au 2 septembre, la « juste vengeance du peuple » pour les crimes commis lors du 10 août est réclamée en vain. Elle s'effectue lors des massacres dans un hors lieu institutionnel. En 1793, « la vengeance nationale est toujours aussi juste que sacrée, et peut-être plus indispensable que l'insurrection elle-même. » Le système vindicatoire de la Terreur met alors face-à-face le peuple souverain et ceux qui lui dénient cette souveraineté. Cependant, à travers la vengeance instituée, se redéfinit l'ordre symbolique, et la vengeance fonde des valeurs : égalité, justice, liberté, bonheur. On comprend alors que la Terreur ait été perçue à la fois comme farouche et sublime.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Article en ligne http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=ANNA_574_0889