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Titre Le Japon et la Cour pénale internationale : enjeux politiques et mémoriels
Auteur Eric Seizelet
Mir@bel Revue Droit et cultures
Numéro no 58, octobre 2009 Mémoires et responsabilités de guerre. Les procès de Tôkyô et de La Haye
Rubrique / Thématique
Mémoires et responsabilités de guerre. Les procès de Tôkyô et de La Haye
Page 85-108
Résumé En juillet 2007, le Japon a officiellement adhéré au Statut de Rome de 1998 établissant la Cour pénale internationale (CP1). En rejoignant la CPI, le cabinet Abe Shinzô a confirmé la détermination sans faille du gouvernement japonais à soutenir la mise en place d'un tribunal criminel permanent, à collaborer à la poursuite des individus suspectés de génocides, de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité et de crimes d'agression, et à renforcer ainsi le droit humanitaire international. Mais, en dépit de cet engagement ancien, le gouvernement avait remis à plus tard son adhésion effective, invoquant des raisons budgétaires et la nécessité de mettre le droit interne en accord avec les dispositions du Statut de Rome. Le but de cet article est de démontrer que ce retard fut également imputable à deux autres raisons : la crainte qu'une adhésion précoce ne vienne renforcer les actions en réparation intentées par les « femmes de réconfort » et les victimes de travail forcé durant la Seconde Guerre mondiale, et l'attitude des États-Unis qui se sont opposés avec force à la création de la CPI. Il souligne également la situation inconfortable du gouvernement japonais : en tant que membre de la CPI, il aura à connaître d'affaires d'esclavage sexuel et de travail forcé à l'égard desquelles la communauté internationale lui reproche une mémoire défaillante ou sélective. En définitive, même si la participation japonaise à la CPI est de nature à conforter la légitimité de la Cour dans son caractère universel, l'attitude ambiguë des autorités japonaises ne peut qu'affaiblir l'impact de l'adhésion au Statut de Rome sur d'autres grandes puissances asiatiques telles que la Chine, l'Inde, l'Indonésie et le Pakistan soucieuses de protéger leur souveraineté contre toute ingérence de la Cour.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Résumé anglais On July 2007, Japan officially adhered to the 1998 Rome Statute setting up the International Criminal Court (ICC). By joining the ICC, the Abe Shinzô Cabinet concretized the long standing determination of the Japanese government to support the creation of a permanent criminal tribunal, to collaborate to the prosecution of individuals responsible for genocides, war crimes, crimes against humanity, crimes of aggression, thus contributing actively to the implementation of humanitarian law. But in spite of this early commitment, the government until recently postponed its effective adhesion, invoking budgetary reasons and the necessity to put the Japanese legal system in accordance with the provisions of the Rome Statute. The purpose of this article is to demonstrate that this delay was also motivated by two other factors : the fear that an early adhesion might stimulate in Japan the claims for reparations from comfort women and victims of forced labor during World War Two and the attitude of the USA which strongly opposed the creation of the ICC. It also stresses the awkward situation the Japanese government had to face : as member of the ICC, it will have to deal with issues such as sexual slavery and forced labor for which the conservative elite showed in the past a quite failing and selective memory. Finally, even if the Japanese participation to the ICC has been praised as a new step fostering the legitimacy of the ICC as an universal judicial body, the ambiguous attitude of the Japanese authorities is likely to weaken the impact of Tokyo adhesion to the Rome Statute on other Asian great powers such as China, India, Indonesia and Pakistan, anxious to protect their own sovereignty against any infringement from the Court.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Article en ligne http://droitcultures.revues.org/2106