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Titre Le peuple des chansons : La voix des femmes
Auteur Joëlle Deniot
Mir@bel Revue Sociétés & Représentations
Numéro no 8, 2000 Le Peuple en tous ses états
Rubrique / Thématique
I. Études
Page 83-100
Résumé Fin du XIXe siècle, les cadres du divertissement populaire urbain se multiplient au gré d'un marché peu contrôlé. Sur fond de crise économique, les « faiseurs » de spectacle recrutent. Quelques chanteurs, chanteuses tout à la fois saltimbanques et prolétaires passent de la rue à la scène. Mais, ce sont désormais des femmes interprètes, et non plus des paroliers de la chanson militante, qui vont incarner les figures vocales du peuple et de son destin. Car, si la veine comique continue, et si le music-hall va bientôt installer ses décors de paillettes, c'est une Damia, une Berthe Sylva, une Yvone George, une Fréhel, plus tard une Piaf qui porteront très haut cet imaginaire d'énergie tragique émergeant de l'épopée et de l'héroïsme populaires.Dans le cercle lumineux et l'épure du spectacle s'imposent des silhouettes et ce timbre particulier de goualeuse. Il porte trace de la voix nue, celle qui, projetée dans le masque, s'élance pour vaincre l'espace et l'indifférence des passants. Dans cette couleur vocale, les paroles s'estompent quelque peu. C'est la voix qui sculpte le sens, qui prend corps, qui fait œuvre. A fleur d'un lyrisme du malheur et du drame, se regroupent et se reconnaissent des compagnons de destinée... « petit peuple » hâbleur proche d'une Fréhel « grand peuple » rassemblé sous les intonations, parfois plus solennelles, les accents, parfois plus nationaux, d'une Damia ou d'une Piaf.Voix-sève, voix-flamme, voix-plainte... nous touchons là à quelque universalité des puissances invocantes de la langue. Ces figures du passé ont aussi leurs descendantes connues et moins connues qui s'inscrivent dans ce chanter féminin et populaire de la passion.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Résumé anglais At the end of the 19th century, the bounds of urban popular entertainment multiply within a not much controlled market. In a background of economic crisis, entertainment producers recruit. A few male and female singers, both performers and proletarians, go from the street to the stage. But, the ones who are going to incarnate the vocal figures of the people and its destiny are not writers of militant lyrics any longer, but female singers. For, even though the comic genre remains popular and music-halls start to use sequinned sets, the singers who will carry that imaginary tragic energy very high, full of popular epic and heroism, are women like Damia, Berthe Sylva, Yvonne George, Fréhel, and later Edith Piaf.In the light spot of a sober show, figures and that peculiar bantering kind of voice assert themselves. A voice in the nude, projected in the mask, soar to break the space and the indifference of the passers-by. In that vocal hue, words tend to tone down. It is the voice that sculpts the meaning, that takes shape, that works. In a lyricism about ill-fate and drama, people gather and recognise one another as fellows of destiny... Boasting « small people » close to Fréhel, « big people » gathered under the sometimes more solemn intonations and sometimes more national accents of Damia or Piaf.Sap-voice, flame-voice, moan-voice... we reach here some universality of the invoking forces of the language. These figures of the past also have their line of descent -famous or unknown- among this popular female singing of passion.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Article en ligne http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=SR_008_0083