Contenu de l'article

Titre Le cadastre savoyard de 1738 et son utilisation pour les recherches d'histoire et de géographie sociales
Auteur Paul Guichonnet
Mir@bel Revue Revue de Géographie Alpine
Numéro vol. 43, no 2, 1955
Page 44 pages
Résumé Résumé. — L'auteur se propose d'attirer l'attention sur le cadastre savoyard de 1728-1738, incomparable instrument de recherches géographiques, économiques et sociales. Après un état des questions sur l'histoire agraire savoyarde, une introduction historique replace le cadastre savoyard dans la série des grands parcellaires européens, inventoriée par Marc Bloch. Typique réalisation du despotisme éclairé, l'arpentage de Victor- Amédèe II, dérivé du cadastre autrichien de Lombardie, est antérieur à toutes les réalisations similaires de la Péninsule italienne et des autres états européens. Il donne à la Savoie une grande supériorité sur la France d'Ancien Régime en matière de description de la propriété et de la fiscalité. Après avoir passé en revue les tentatives de cadastration esquissées dans le duché de Savoie dès la fin du XVIe siècle et surtout au début du XVIIe, l'auteur retrace les étapes de la confection du cadastre général de 1738, œuvre magistrale par sa précocité, sa bienfacture et sa rapidité d'exécution. Il décrit les nombreux documents, remarquablement conservés et complets, répartis entre les archives départementales et communales et qui ont chacun leur intérêt particulier pour le chercheur. Les principaux sont la mappe, plan parcellaire à l'échelle 1/2372, les tabelles, ou matrices et surtout les registres communaux (livre journalier et livre de mutations), servant à enregistrer les mutations foncières. Cette revue des éléments du cadastre et des autres sources servant à les éclairer (métrologie et monnaie, Tabellion, recensements et enquêtes statistiques), se termine par des indications sur les cadastres postérieurs du premier Empire et de la période française d'après 1860. La seconde partie propose des exemples pratiques d'utilisation de « l'ancien cadastre », tirés essentiellement de la province du Faucigny et replacés dans le cadre des régions naturelles de la géographie alpine. Avec une précision qui égale parfois celle des sources les plus modernes, on peut ainsi décrire le terroir savoyard du début du XVIIIe siècle : répartition des cultures, montrant la prépondérance de l'agriculture ceréalière et viticole, des biens communaux et l'exploitation extensive des pâtures et des forêts; analyse détaillée de la couverture forestière. Le cadastre est également une mine pour l'histoire sociale. Il permet de jeter un coup d'œil rétrospectif, jusqu'au début du XVIIe siècle, sur le partage du sol entre les classes sociales et de tracer le tableau exact de la structure foncière en 1738. Un horizon de recherches entièrement inédit est celui de l'évolution de la propriété, à l'aide des livres de mutations, conservant tous les changements de propriétaires, de 1738 à 1860. Deux monographies communales, consacrées à Saint-Etienne- en-Faucigny et à Thyez, retracent l'évolution foncière de chaque classe, de 1738 à 1792, en corrélation avec les fluctuations politiques et sociales du duché. On y constate d'une manière frappante la stagnation du domaine paysan, le faible accroissement des biens d'Eglise, l'essor spectaculaire des domaines des « bourgeois rassembleurs de terres » et l'effondrement de la noblesse qui, durement frappée par la baisse de ses revenus et l'affranchissement des droits féodaux, a liquidé, à la veille de la Révolution, plus de la moitié de ses possessions. Une bibliographie détaillée termine cet essai qui voudrait avoir défini une méthode pratique de travail dans un des secteurs les moins défrichés de la connaissance des Alpes du Nord.
Source : Éditeur (via Persée)
Article en ligne https://www.persee.fr/doc/rga_0035-1121_1955_num_43_2_1175