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Titre Des cartes autochtones en situation coloniale : Le cas du Tonkin à la fin du XIXe siècle
Auteur Marie de Rugy
Mir@bel Revue Annales. Histoire, Sciences Sociales
Numéro vol. 75, no 2, avril-juin 2020 La savoir des cartes - Ville et religion - Crédit et histoire
Rubrique / Thématique
Le savoir des cartes
Page 189-232
Résumé À partir d'un corpus de cartes vietnamiennes conservées dans les Archives nationales de Hà Nội, cet article vise à répondre à une double interrogation, méthodologique et heuristique : comment analyser en historien des sources cartographiques détachées de leur contexte de production ; peut-on voir une spécificité du cas vietnamien dans l'appropriation des savoirs autochtones en situation coloniale ? En comparant ces cartes à celles des géographies royales vietnamiennes, en les croisant avec des sources coloniales françaises de la conquête du Tonkin (années 1880-1890), en analysant l'entremêlement des écritures – caractères chinois, vietnamien romanisé et français –, les codes visuels et la matérialité de ces documents, cette étude propose trois pistes fécondes et complémentaires pour l'histoire et l'anthropologie des savoirs. La spécificité vietnamienne réside d'abord dans l'existence de ce grand nombre de cartes, qui n'a d'équivalent ni dans les possessions coloniales en Afrique ni ailleurs en Asie du Sud-Est. Elle apparaît aussi dans les contextes de production des cartes, que la correspondance privée d'un officier, Fernand Bernard, et les journaux de marche militaires permettent de retracer : si les enquêtes orales dans les villages ou le renseignement sont des situations répandues, la sollicitation des fonctionnaires locaux, habitués à dresser des cartes pour le pouvoir, l'est moins. Finalement, l'étude de ces documents laisse entrevoir des formes de contact et une appropriation propres aux débuts de la colonisation, qui disparaissent ensuite.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Résumé anglais Based on a corpus of Vietnamese maps held in the national archives at Hà Nội, this article aims to answer a double question, both methodological and heuristic: How can historians analyze cartographic sources detached from their context of production? And was the appropriation of indigenous knowledge during colonization specific to the Vietnamese case? By comparing these maps with those of Vietnamese royal geographies, crossing them with French colonial sources from the conquest of Tonkin (1880s–1890s), and analyzing the interweaving of different writing systems—Chinese characters, romanized Vietnamese, and French—as well as the visual codes and the materiality of these documents, this study suggests three fruitful and complementary directions for the history and anthropology of knowledge. The Vietnamese case is unique because the existence of such maps, in such large numbers, was unmatched in other colonial possessions in Africa or elsewhere in Southeast Asia. It is also unusual in terms of how these maps were produced, as revealed in the private correspondence of the officer Fernand Bernard and diaries of military expeditions. Although it was common practice to conduct oral inquiries in villages or draw on military intelligence, it was far less usual to be able to solicit local functionaries accustomed to creating maps for those in power. Finally, the study of these documents reveals forms of contact and appropriation that were specific to the early stages of colonization, and which subsequently disappeared.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Article en ligne http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=ANNA_752_0189 (accès réservé)