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Titre Le temps du crédit : Endettement et stratification sociale en Illinois dans les années 1910
Auteur Simon Bittmann
Mir@bel Revue Annales. Histoire, Sciences Sociales
Numéro vol. 75, no 2, avril-juin 2020 La savoir des cartes - Ville et religion - Crédit et histoire
Rubrique / Thématique
Crédit et histoire
Page 283-319
Résumé Cet article étudie les pratiques d'agences offrant aux travailleurs américains la possibilité d'accéder à des liquidités sur la base de leurs futurs revenus. L'historiographie a tour à tour associé ces prêts aux classes moyennes naissantes et à un crédit « moderne » ou à la classe ouvrière, associant la dette à la gestion d'urgences. Les données analysées, qui portent sur l'Illinois des années 1910, mettent plutôt en évidence trois types d'attitudes à l'égard du temps économique : à celui contraint des dettes pressantes s'oppose celui de la gestion budgétaire quotidienne et, enfin, celui de l'investissement. Loin de faire du crédit le marqueur d'une appartenance de classe et de dispositions économiques a priori, l'auteur considère l'attribution du crédit comme une épreuve de stratification. Ce prisme permet de dégager trois pôles au sein de l'espace social : un groupe modal et deux groupes extrêmes. Le premier est constitué d'ouvriers qualifiés, d'artisans et de salariés du public pour qui ces prêts représentent un substitut liquide et contractualisé au crédit affecté ou interpersonnel ; le deuxième est associé aux manœuvres et aux domestiques, à des faibles montants et à une forme d'instabilité salariale ; le troisième fait apparaître un crédit commercial, d'investissement ou destiné à couvrir des imprévus, octroyé à des salariés supérieurs et à des propriétaires de commerce. Cependant, ces trois groupes ne peuvent être statistiquement associés aux attitudes temporelles mises en exergue, ce qui souligne la coexistence d'horizons économiques différents au sein de chaque classe d'emprunteurs.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Résumé anglais This article studies the credit practices of agencies offering small cash loans to American workers based on their future earnings. Recent historiography has associated these loans either with a nascent middle class and the birth of “modern” credit, or with the working class, equating debt with emergencies. In fact, the data analyzed here, based on Illinois agencies and borrowers in the 1910s, reveal three types of economic temporality: the bounded time of pressing debts contrasts with the continuous time of daily expenses, and, finally, the future time of investment. Far from associating credit with a predefined social class and economic dispositions a priori, this article considers credit allocation as a stratifying device. This analysis brings to light three distinct social groups: a large, modal group composed of skilled workers, craftsmen, and civil servants, who resorted to small loans as a contractual alternative to either affected or interpersonal credit, can be distinguished from two smaller groups at opposite ends of the spectrum. The first is associated with laborers and domestics, smaller amounts of money, and wage instability, whereas the second is linked to commercial credit, used by upper-level salaried workers and business owners for investment purposes or to meet an unforeseen liability. However, these three groups cannot be statistically associated with any one temporal rationality, emphasizing a complex layering of economic horizons within each class.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Article en ligne http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=ANNA_752_0283 (accès réservé)