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Titre Commémorer et contester un ordre spatial dominant
Auteur Hervé Amiot
Mir@bel Revue L'Espace Politique
Numéro no 41, 2020/2 Géopolitiques de la commémoration
Rubrique / Thématique
Géopolitiques de la commémoration
 Nationalismes
Résumé L'article étudie la manière dont la commémoration – en tant que performance se déroulant dans un lieu singulier – contribue à construire un ordre spatial dominant, traduisant et reproduisant des rapports de force politiques et mémoriels, et dans quelle mesure cet ordre peut être contesté. Il se fonde sur une observation participante des commémorations de la Deuxième Guerre mondiale au cimetière soviétique de Noyers-Saint-Martin (Oise), complétée par des entretiens avec les différents acteurs engagés dans la cérémonie et l'analyse d'archives et autres documents textuels sur la nécropole et les cérémonies. L'article montre que l'investissement du cimetière par les acteurs russes dans les années 2000 a contribué à créer un ordre spatial reposant sur la prééminence de la Russie sur les autres républiques post-soviétiques et la diffusion du mythe de la Grande guerre patriotique, instrument du soft power mémoriel russe à l'étranger. Mais le moment de la commémoration est utilisé par les acteurs ukrainiens, depuis 2014, pour contester cet ordre spatial micro-local, rendre visibles des mémoires alternatives de la Seconde Guerre mondiale et dénoncer la politique de déstabilisation menée par la Russie dans le Donbass et en Crimée. Néanmoins, la portée de cette contestation est limitée car elle s'inscrit dans un espace socio-politique plus large, où les acteurs russes possèdent davantage de ressources et des positions plus dominantes que les acteurs ukrainiens. Face aux approches englobantes, assimilant souvent commémoration et fabrique de la mémoire, l'article plaide pour une approche ethnographique de la commémoration, qui redonne de l'importance à l'analyse des spatialités des corps et des objets au moment de la cérémonie.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Résumé anglais This article examines how commemoration - as a performance located in a singular place – shapes a dominant spatial order, reflecting and reproducing relations of power, and to what extent this order can be contested. It is based on a participant observation of the World War II commemorations in the Soviet cemetery of Noyers-Saint-Martin (Oise, France), supplemented by interviews with various people involved in the ceremony, the analysis of archive and other textual documents. The article shows that, during the 2000's, Russian actors have succeeded in creating in Noyers-Saint-Martin a spatial order based on the preeminence of Russia over the other post-soviet republics and the diffusion of the Great Patriotic War myth, which is part of a “memorial soft power” strategy directed abroad by Russian authorities. However, since 2014, the moment of the ceremony is being used by Ukrainian actors to challenge this spatial order at the micro-local scale, to promote alternative memories of the Second World War and, further, to unveil the current destabilization of Ukraine by Russia in Donbass and Crimea. Nevertheless, the significance of this contestation is limited, because in the larger French political and commemorative space, Russian actors have more resources and dominant positions than Ukrainian ones. Unlike all-encompassing approaches, often assimilating commemoration and politics of memory, the article argues for an ethnographic approach of commemoration, giving weight to a detailed analysis of the spatiality of bodies and artifacts at the time of the ceremony.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Article en ligne http://journals.openedition.org/espacepolitique/8423