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Titre « Une péripétie du gouvernement » : la sociologie soviétique entre incitation et répression
Auteur Alexander Bikbov
Mir@bel Revue Actes de la recherche en sciences sociales
Numéro no 243-244, septembre 2022 Qui a peur des sciences sociales ?
Page 46-61
Résumé Après la mort de Staline, en 1953, la réouverture de l'Union soviétique à l'international permet la naissance et l'institutionnalisation progressive d'une sociologie qui intègre des apports des sciences sociales américaines, sous la surveillance du marxisme orthodoxe. Cet article décrit le développement et les crises de cette sociologie jusqu'au début des années 1970. L'auteur propose ensuite une ouverture synthétique sur les périodes ultérieures, jusqu'à celle de la Russie de Poutine. L'analyse s'attache particulièrement à l'ambiguïté qui caractérise les relations de la sociologie soviétique avec les autorités politiques. Et montre l'hybridation entre deux raisons d'État contradictoires et portées par des fractions opposées de l'appareil du Parti communiste : l'une, héritée de l'ordre politique stalinien, consiste en une pédagogie hégémoniste des masses reposant sur une doctrine des classes sociales opposant les sociétés socialistes et bourgeoises ; l'autre a un rapport direct avec les fonctions expertes de la gestion des populations. Sous tous ces rapports, la sociologie soviétique et russe donne à voir, de façon particulièrement visible, un trait général et structurant de la discipline : la cohabitation, souvent tendue, d'un pôle critique, aux prises avec l'autorité politique, et d'un pôle plus professionnalisé, tourné vers des usages « utiles » des méthodes et des connaissances sociologiques.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Résumé anglais Following the death of Stalin in 1953, the Soviet Union's rekindling of international relations fostered the genesis and gradual institutionalization of a sociological discipline reflective of inputs from the US social sciences while being constrained by orthodox Marxism. This article traces the expansion and crises of this discipline until the 1970s. It then briefly sketches subsequent developments, up to Putin's regime. It underscores that the ambiguous relationship between Soviet sociology and political authorities reflected the hybridization of two contradictory “raisons d'État” (reasons of state) fostered by competing fractions of the communist party. The first, inherited from the Stalinist political order, propounded a hegemonic pedagogy of the masses, leaning on a doctrine of the social classes opposing socialist and bourgeois societies. By contrast, the second fostered sociology's function as a population management expertise. These tensions within Soviet and Russian sociology constitute a petri-dish of a wider structuring feature of the discipline: the often-strained cohabitation between a critical pole grappling with political authorities, and a more professionally oriented pole engaged in “useful” usages of sociological methods and knowledge.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Article en ligne http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=ARSS_243_0046 (accès réservé)