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Titre Culte des saints et histoire environnementale dans l'Égypte des XIXe et XXe siècles
Auteur Catherine Mayeur-Jaouen
Mir@bel Revue Histoire@Politique
Numéro no 48, septembre-décembre 2022 Ressources naturelles et tensions d'empire : Maghreb, Proche-Orient, Afrique (XIXe-XXe siècle)
Rubrique / Thématique
Dossier
Résumé Le culte des saints juifs, musulmans et chrétiens – qui inclut les pratiques vouées aux tombes et les croyances aux djinns – est intimement lié à la façon d'habiter un paysage, de l'expliquer comme un monde animé, historiquement et dans ses caractéristiques naturelles principales (montagnes, grottes, fleuves, arbres), et finalement de le transformer ou de l'apprivoiser. Toutes sortes de pratiques l'accompagnent, pratiques thérapeutiques ou propitiatoires généralement liées à la fertilité. Parmi les sources majeures de l'histoire environnementale au Moyen-Orient, on compte la littérature hagiographique, les écrits favorables ou hostiles à de telles pratiques, les guides de pèlerinage et de visites pieuses, la littérature de voyage musulmane à l'époque médiévale et moderne, et enfin la littérature ethnographique d'époque coloniale. Après des rappels généraux, on étudiera sur une longue durée le cas de l'Égypte. On rappellera comment le culte des saints coptes et musulmans a longtemps permis, dans un pays très majoritairement rural, d'expliquer les transformations périodiques ou séculaires de l'environnement : rapports entre désert et vallée, rythmes de la crue du Nil déterminant l'emplacement des cimetières, grottes occupées par des couvents et des églises, culte d'arbres sacrés, puits. L'évolution du culte des saints et sa relative sécularisation depuis la fin du XXe siècle sont intimement liées à la destruction de l'environnement et du paysage : explosion démographique, urbanisation planifiée ou sauvage, artificialisation galopante des sols et disparition de la terre agricole, malgré la conquête de nouvelles terres. Le désert est peuplé ou contrôlé par l'armée, les puits inaccessibles, les arbres coupés. Au début du XXIe siècle, les menaces pesant sur le Nil lui-même achèvent de dissoudre le lien entre environnement et culte des saints, condamné par le réformisme musulman, tout en faisant apparaître une nostalgie nouvelle.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Résumé anglais The cult of Jewish, Muslim and Christian saints — considered in a broad sense, including practices dedicated to tombs and the belief in jinns — is intimately linked to a way of living in a landscape, of interpreting it as an inhabited world, both historically and as embodied by its main natural features (mountains, caves, rivers, trees), and ultimately of taming or transforming this landscape. All sorts of practices have historically accompanied this cult of saints, including therapeutic or propitiatory practices generally linked to fertility. Among the major sources of environmental history in the Middle East, one can therefore include a vast hagiographic literature, texts favorable or hostile to such practices, guides to pilgrimages and other pious visits, Muslim travel literature in the medieval and modern periods, and finally ethnographic literature of the colonial period. After a general overview, we shall look at the case of Egypt over a long period of time. We will explain how the cult of Coptic and Muslim saints has long made it possible, in a predominantly rural country, to explain various transformations of the environment: the relationship between the desert and the valley, the frequency of Nile flooding determining the location of cemeteries, the caves occupied by convents and churches, the cult of sacred trees, the wells that determine the location of the saints' tombs, etc. The evolution of the cult of the saints and its relative secularization since the end of the 20th century are intimately linked to the destruction of the Egyptian environment and landscape: population explosion, planned or uncontrolled urbanization, rampant artificialization of soils and the disappearance of arable land, despite expansion into new lands. The desert is populated or controlled by the army, the wells are inaccessible, and trees are cut down. At the beginning of the 21st century, threats to the Nile itself dissolved the link between the environment and the cult of the saints, while at the same time giving rise to a nostalgia for a cult condemned by Muslim reformism.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Article en ligne https://journals.openedition.org/histoirepolitique/8374