Contenu du sommaire : Constructions européennes

Revue Actes de la recherche en sciences sociales Mir@bel
Numéro no 166-167, mars 2007
Titre du numéro Constructions européennes
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Constructions européennes

    • Esprits d'Etat, entrepreneurs d'Europe - Antonin Cohen, Yves Dezalay et Dominique Marchetti p. 4 accès libre
    • Le "père de l'Europe" - La construction sociale d'un récit des origines - Antonin Cohen p. 14 accès libre avec résumé
      Par quelle construction sociale d'un récit des origines, la déclaration du 9 mai 1950 apparaît-elle comme l'acte fondateur de la construction européenne, et de Jean Monnet le « père de l'Europe » ? En restituant les différentes activités et les multiples transactions qui, à l'intersection des champs politique, bureaucratique, journalistique et académique, ont simultanément contribué à la production et à la reproduction de ce récit, cet article entend ainsi rendre compte des médiations concrètes par lesquelles cet événement est entré dans la geste politique de l'Union européenne. Un tel retour à l'histoire permet d'expliquer les fonctions symboliques de ce récit des origines, qu'enregistre une « journée de l'Europe » désormais célébrée le 9 mai de chaque année, et érigée à l'article I-8 du projet de Constitution européenne au rang des « symboles » de l'Union.
    • La "société civile" dans la "gouvernance européenne" - Eléments pour une sociologie d'une catégorie politique - Hélène Michel p. 30 accès libre avec résumé
      Parmi les nombreuses publications sur la « société civile » au niveau européen, peu s'interrogent sur les processus ayant contribué à la genèse et à la réalisation de cette catégorie. Dans une telle perspective, cette note de recherche accorde une place privilégiée à la sociologie politique des différents agents qui, au sein des institutions européennes et de différents collectifs militants, ont investi la catégorie, moins selon une ligne stratégique qu'en fonction des moyens dont ils disposent et des opportunités d'action qu'ils ont pu saisir. Les usages différenciés qu'ils font de la « société civile » donnent à voir comment se traduisent, dans la lutte pour la définition des contours de « société civile » et de ses relations avec les institutions européennes, les enjeux relatifs à l'accès au champ politique européen et à la redéfinition constante de ses règles de fonctionnement.
    • Genèse et structure d'un capital institutionnel européen - Les très hauts fonctionnaires de la Commission européenne - Didier Georgakakis et Marine de Lassalle p. 38 accès libre avec résumé
      Ce texte rend compte d'une enquête sur les hauts fonctionnaires européens et, plus particulièrement, d'une étude prosopographique des directeurs généraux et directeurs généraux adjoints de la Commission européenne. Celle-ci peut être analysée comme un espace de positions relativement structuré, notamment par la production et l'inégale distribution d'un crédit d'institution pour partie autonome. Une telle perspective va au rebours des interprétations qui en font une « multi-organisation » mouvante et imprévisible et permet de poser en d'autres termes la question des « orientations » politiques collectives ou individuelles de ses agents. La première partie de l'article revient sur les processus socio-historiques de démarcation d'un corps de fonctionnaires communautaires et sur l'émergence d'un crédit spécifiquement européen. La seconde porte sur les oppositions qui s'instaurent entre des pôles communautaires/nationaux et généralistes/sectoriels et sur le renversement tendanciel des hiérarchies au sein de cet espace au profit des pôles communautaires et généralistes.
    • Une élite d'intermédiaires - Naissance d'un capital juridique européen (1950-1970) - Antoine Vauchez p. 54 accès libre avec résumé
      Plutôt que de supposer a priori l'existence d'une « raison juridique européenne », improbable dans des espaces communautaires largement dominés par des logiques politiques et des allégeances nationales, cet article montre que l'émergence d'une autorité juridique transnationale incarnée par un petit groupe de « juristes européens » ne se joue pas sans le « politique » ou le « national » mais au travers de divers jeux sociaux (politiques, administratifs, professionnels, économiques, académiques) constitutifs de cette première phase de construction. L'analyse des conditions de formation d'un premier capital juridique européen au cours de la période 1950 – 1970 permet d'appréhender le rôle d'intermédiaires que jouent collectivement les juristes dans la politique communautaire.
    • De la défense de l'environnement au développement durable - L'émergence d'un champ d'expertises des politiques européennes - Yves Dezalay p. 66 accès libre avec résumé
      La courte histoire des institutions et des politiques d'environnement en Europe est marquée par la réorientation radicale de ces politiques, dont les promoteurs s'étaient inspirés initialement du modèle classique de l'État-gendarme. À partir des années 1990, ces dispositifs de contrôle administratifs sont de plus en plus critiqués de nouvelles coalitions d'experts, proches des grandes entreprises, qui prônent désormais une régulation négociée sur la base d'incitations financières. C'est en analysant la genèse et les recompositions de cet espace d'expertises qui se construit autour de Bruxelles dans la concurrence entre des modèles d'intervention politique, inscrits dans des histoires nationales, que l'on peut saisir les raisons, tant internes qu'externes, de ce revirement. En effet, les renversements d'alliance sont facilités par l'hétéronomie de cet espace-carrefour, où se retrouvent des agents nationaux qui, de surcroît, sont issus de milieux aussi opposés que le militantisme radical, le monde académique, la bureaucratie ou les entreprises multinationales.
    • L'Europe du savoir contre l'Europe des banques ? La construction de l'espace européen de l'enseignement supérieur - Sandrine Garcia p. 80 accès libre avec résumé
      Cet article montre comment la construction de l'espace européen de l'enseignement supérieur a permis aux institutions « décisionnelles » européennes (Conseil de l'Union, Conseil de l'Europe, Commission européenne) de s'approprier une autorité politique en matière d'enseignement supérieur qu'elles ne possèdent pas officiellement. Pour les membres de ces institutions, ce domaine s'intègre dans une politique économique plus globale – formalisée à travers les « objectifs de Lisbonne » – qui fait de la souveraineté des États en matière d'éducation supérieure un obstacle à contourner. Mais ce processus (dit « de Bologne ») a aussi limité l'autonomie professionnelle des universitaires grâce aux divisions internes du monde académique et aux intérêts d'une partie des universitaires à construire une hiérarchie favorable à leurs propres investissements professionnels.
    • L'impossible "modèle social européen" - Cécile Robert p. 94 accès libre avec résumé
      Revenant sur la marginalisation et le manque de légitimité des enjeux sociaux dans le contexte de l'élargissement, cet article suggère de les mettre en relation avec la position occupée, au sein de la Commission, et plus généralement dans l'espace politique européen, par les services de l'administration communautaire en charge des affaires sociales. À partir d'une enquête conduite auprès de ces agents pendant la préparation des négociations d'adhésion, il observe comment la situation de domination relative de ces services sur les plans institutionnels, matériels et symboliques est perçue et incorporée par leur personnel et oriente leurs modes de mobilisation. Conformisme institutionnel, logiques d'autocensure, ou encore relecture à la baisse des ambitions originelles de l'UE dans ce domaine vont faire obstacle à la défense d'un modèle social européen opposable aux pays candidats. À travers leur intériorisation de l'illégitimité de l'Europe sociale, ils contribuent ainsi à son non avènement.
    • "En être ou pas" - Les logiques de l'entre soi à Bruxelles - Olivier Baisnée p. 110 accès libre avec résumé
      Le modèle d'excellence professionnelle qui a longtemps prévalu au sein des correspondants de presse relatant les activités de l'Union européenne valorise très fortement leur capital social. Les réseaux sociaux des journalistes les plus anciens de ce groupe leur ont historiquement permis d'incarner « le » correspondant à Bruxelles. Cette situation tient en effet beaucoup à l'histoire du corps de presse et aux trajectoires des premiers correspondants qui, pour quelques-uns, sont encore en activité. Le contexte historique dans lequel ils firent leur apprentissage du poste rendait possible et nécessaire une telle proximité sociale et intellectuelle. Cette dimension de « l'entre-soi » communautaire, qui va bien au-delà du seul exemple des journalistes, doit aussi beaucoup au contexte urbain dans lequel il s'inscrit. L'installation des institutions européennes a en effet recomposé la ville de Bruxelles, favorisant simultanément le renforcement des clivages socio-économiques et un accroissement de la polarisation spatiale. Aussi le « Bruxelles » des correspondants et, plus largement, de l'élite communautaire qui y vit, est circonscrit à quelques espaces restreints dans lesquels ces agents travaillent et résident. Outre la proximité sociale, ce recouvrement des sphères privée et professionnelle entre correspondants et personnel politique et administratif de l'Union européenne vient nourrir et conforter la communauté de leurs représentations.
    • Le Non français au traité constitionnel européen (mai 2005) - Sur deux lectures "polaires" du scrutin - Patrick Lehingue p. 122 accès libre