Contenu du sommaire : Débats et polémiques autour de L'Esprit des lois
Revue | Revue française d'histoire des idées politiques |
---|---|
Numéro | no 35, 1er semestre 2012 |
Titre du numéro | Débats et polémiques autour de L'Esprit des lois |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Introduction
- Débats et polémiques autour de L'Esprit des lois - Catherine Volpilhac-Auger p. 3-11
Études
- Le problème de la sécularisation chez Montesquieu : Théocratie et politique - Girolamo Imbruglia p. 13-24 Montesquieu, sans avoir recours au mot, utilise toutefois le concept de théocratie dans deux moments essentiels de sa théorie : pour expliquer le passage de la société sauvage à l'État, et la raison pour laquelle dans les États modernes (Grande-Bretagne, Hollande et Venise) la vertu (donc l'État Républicain) était impossible ; cette raison est le christianisme, qui domine les institutions et la culture. Pour penser la liberté dans les sociétés modernes, il fallait couper cette relation avec la religion et séculariser la politique.
- Voltaire contre Montesquieu ? : L'apport des oeuvres historiques dans la controverse - Myrtille Méricam-Bourdet p. 25-36 Si Voltaire a tardivement composé des textes analysant L'Esprit des lois, son véritable commentaire se trouve dans les textes historiques qui répondent aux théories de Montesquieu sur le gouvernement. Les concepts de despotisme, de monarchie absolue, d'honneur, les fondements historiques et constitutionnels de la monarchie française, la question de l'historicité des moeurs constituent les entrées de cet examen qui met en valeur les convergences thématiques des deux penseurs.
- Comment les régimes peuvent-ils être despotiques ? : Montesquieu et Boulanger - Denis de Casabianca p. 37-50 Le despotisme apparaît comme un régime autonome dans la nouvelle typologie que Montesquieu propose dans L'Esprit des lois. On peut s'interroger à partir de la lecture que Nicolas-Antoine Boulanger en fait, pour voir comment les remaniements qu'il opère dans ses Recherches sur l'origine du despotisme oriental mettent à jour les tensions qui travaillent la pensée de Montesquieu. Le despotisme dit la vérité des jeux de pouvoir qui menacent tout régime et engage ainsi à porter un autre regard sur la politique.
- L'« honneur » de L'esprit des lois un principe mal compris ? - Federico Bonzi p. 51-60 La notion d'honneur est une de celles qui a suscité le plus de polémiques lors de la parution de L'Esprit des lois. A-t-elle été vraiment comprise ? Les textes les plus connus, mais d'autres aussi sont envisagés : le point de vue moral, mais aussi la distinction entre honneur et honneurs, et la sous-évaluation du rôle de la noblesse dans la représentation de la société, font partie des questions cruciales, y compris pour Montesquieu lui-même, comme le montrent certaines additions qu'il introduit dans L'Esprit des lois.
- La critique des corps intermédiaires à Milan et à Naples : « Distinguer mes pas des siens » - Philippe Audegean p. 61-71 À Milan comme à Naples, le combat des réformateurs contre les « corps intermédiaires » s'explique par la très large autonomie dont jouissent les patriciens et les barons, notamment dans l'exercice de la justice criminelle. Pietro Verri et Gaetano Filangieri montrent ainsi, contre Montesquieu, qu'en portant atteinte à la liberté civile, c'est-à-dire à l'égalité même des droits entre les citoyens, les corps intermédiaires menacent la liberté politique, au sens justement défini par Montesquieu.
- Hume et Montesquieu : Sur deux chapitres de L'Esprit des lois traduits en anglais - Jean-Pierre Cléro p. 73-91 L'Esprit des lois a immédiatement intéressé les Anglais, qui ont très vite traduit l'ouvrage. En entier par T. Nugent ; mais auparavant, les chapitres concernant l'Angleterre ont connu une version distincte, par un auteur qui, certainement, n'est pas Nugent ; E. C. Mossner suggère que Hume a pu jouer un rôle actif dans sa publication. Sans affirmer que Hume soit l'auteur de la traduction, on peut être saisi par des concepts communs avec ceux de Hume et des traits voisins de ceux des Essais moraux, politiques et littéraires concernant l'Angleterre et la France.
- La peine de mort dans l'Encyclopédie et ses suppléments - Luigi Delia p. 93-107 Cette étude porte sur la réception des idées de Montesquieu et de Beccaria en matière de droit de punir par la mort dans la grande Encyclopédie et dans les Suppléments. Sans fournir une réponse unique à la question de savoir si la société a ou non le droit de vie et de mort, l'encyclopédisme des Lumières reconsidère et véhicule le réformisme des auteurs les plus marquants de la culture juridique du XVIIIe siècle. Ce faisant, il oeuvre pour une justice sociétale à la veille de la Révolution.
- L'Église funeste à la population ? : Une controverse sulfureuse autour du célibat ecclésiastique - Christine Théré p. 109-122 L'Esprit des lois fait du célibat un des grands principes de destruction de la population. Montesquieu, quoiqu'il s'en défende, ouvre ainsi une discussion sur les fondements du célibat ecclésiastique qui prend un tour polémique dans les années 1750. L'argument démographique conduit à réévaluer l'utilité sociale du clergé catholique et de ses institutions, et suscite des essais de quantification inédits pour en démontrer l'incidence durable sur le nombre des hommes et la distribution des richesses.
- Montesquieu dans l'Histoire des deux Indes - Muriel Brot p. 123-133 « Montesquieu dans l'Histoire des deux Indes » étudie la présence de la figure et de l'oeuvre du président dans l'histoire de la colonisation publiée par l'abbé Raynal de 1770 à 1780. L'article analyse les traces explicites et implicites, reprises et réfutations de l'oeuvre, éloges et critiques de l'auteur, éclaire leur emploi philosophique et politique, souligne leur valeur historiographique. Il situe enfin la position des auteurs de l'Histoire des deux Indes dans les polémiques autour de Montesquieu.
- Le débat Rousseau/Montesquieu dans le premier Discours : réception et médiations - Catherine Labro p. 135-145 Les considérations sur le luxe du Discours sur les sciences et les arts ne sont étrangères ni à L'Esprit des lois de Montesquieu ni aux Réflexions sur quelques parties d'un livre intitulé De L'Esprit des lois de Claude Dupin. Rousseau, alors au service de l'épouse de ce dernier, découvre L'Esprit des lois en même temps que sa patronne souhaite en faire la critique. Sa propre appréciation du luxe subit-elle par conséquent son influence ou procède-t-elle, au contraire, d'une approche autonome ?
- De Montesquieu à Rousseau : les Anglais sont-ils libres ? - Gabrielle Radica p. 147-157 Rousseau critique le régime anglais dans le Contrat social, et la vertu que Montesquieu lui prête, à savoir d'empêcher la concentration des pouvoirs pour favoriser la liberté politique. Mais au-delà de cette position tranchée, il reconnaît l'importance de certains des facteurs de la liberté politique que l'Esprit des lois a rendus saillants à propos du cas anglais, notamment quand il approuve que l'on divise le pouvoir du gouvernement, et plus encore, quand il rappelle l'importance des libertés individuelles dans les Lettres écrites de la Montagne.
- Autour du livre XIX : La France, l'Angleterre et la politesse - Philippe Raynaud p. 159-169 Dans le livre XIX de L'Esprit des lois, Montesquieu suggère une comparaison entre la France et l'Angleterre qui s'inscrit dans un débat classique sur la valeur de la politesse. Il montre pourquoi la liberté politique anglaise n'est pas favorable aux formes les plus raffinées de la politesse, mais il voit aussi dans la politesse française une expression de l'« esprit général » de la nation française qui s'accorde avec les principes du régime monarchique sans pour autant être réductible aux moeurs serviles qui accompagnent le despotisme.
- Bentham et Montesquieu - Jean-Pierre Cléro p. 171-182 Curieusement, les thèses juridiques et politiques de Montesquieu, que Bentham pouvait s'imaginer avoir vaincues sur les fronts différents mais cohérents des passions, de la preuve en droit, de la liberté individuelle et de la division des pouvoirs, l'utilitarisme les retrouvera en face de lui, quand Stuart Mill, quelques décennies plus tard, s'avisera d'en tenter une synthèse avec le libéralisme qui invoque comme valeur irréductible, quoiqu'elle soit très vague, la liberté individuelle.
- Le problème de la sécularisation chez Montesquieu : Théocratie et politique - Girolamo Imbruglia p. 13-24
Bibliographie
- Lectures critiques - p. 183-194