Contenu du sommaire : Féminismes décoloniaux, genre et développement
Revue | Revue Tiers-Monde |
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Numéro | no 209, janvier-mars 2012 |
Titre du numéro | Féminismes décoloniaux, genre et développement |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Dossier
- Féminismes décoloniaux, genre et développement : Histoire et récits des mouvements de femmes et des féminismes aux Suds - Christine Verschuur, Blandine Destremau p. 7-18
- Feminism in India : The Tale and its Telling - Maitrayee Chaudhuri p. 19-36 Cet article donne un aperçu du féminisme en Inde qui soulève en même temps des questions d'ordre théorique. La théorie postcoloniale ne tient pas compte du fait que ce qui est considéré comme « marginal » pour l'occident a souvent joué un rôle central dans le reste du monde. Privilégiant l'analyse des textes, les études postcoloniales négligent l'analyse historique des contraintes liées aux institutions sociales et des possibilités d'action des individus dans ce cadre. On suivra, sous cet angle, le féminisme à travers l'histoire : de la colonisation anglaise aux affrontements nationalistes et aux conflits de genre ; du développement initié par l'État dans une Inde indépendante aux changements apportés par la mondialisation ; jusqu'à l'Inde contemporaine marquée à la fois par une affirmation des communautés marginalisées et par l'émergence d'une « classe moyenne globale » avec son impact paradoxal sur le féminisme.
- De la périphérie vers le centre : origines et héritages des féminismes latino-américains - Márgara Millán p. 37-52 Cet article porte sur les origines des féminismes et sur les mouvements de femmes en Amérique latine, le féminisme étant un processus en cours regroupant différentes pratiques et théories. Les origines anarchistes, socialistes et libérales du mouvement féminin/féministe et ses liens avec les mouvements populaires ruraux et urbains sont mis en évidence par l'étude des alliances et des publications de la première moitié du XXe siècle. L'article porte ensuite sur les tendances de la fin du siècle dernier et sur l'empreinte laissée par les révolutions nationalistes et par les mouvements latino-américains de gauche radicale sur les féminismes. La fin de l'article traite de la crise du féminisme des femmes ayant été éduquées et de son ouverture au dialogue pluriculturel et multiethnique, qui correspond à la complexité du sujet du féminisme et de sa critique sociale.
- Féminismes islamiques et postcolonialité au début du XXIe siècle - Stéphanie Latte Abdallah p. 53-70 Au début des années 1990, en produisant de nouvelles théologies, le féminisme islamique a ouvert une troisième voie dépassant les dichotomies sur les droits et les mouvements de femmes dans la région, issues du discours colonial ou du discours de décolonisation. Cette théologie féministe illustre une appropriation de l'islam par les femmes et une individualisation du rapport au religieux. Depuis les années 2000, en se diversifiant, le féminisme islamique a influencé les actrices de l'islam politique et a participé des mobilisations féministes de la troisième vague dans les mondes arabes et musulmans. Des mobilisations qui sont avant tout hybrides et pragmatiques et, en ce sens, profondément ancrées dans ce temps du postcolonial. En renouvelant le féminisme et les lectures de l'islam, cette troisième vague appuie une affirmation démocratique à l'oeuvre depuis les années 1990, dont les révolutions arabes sont la manifestation la plus visible.
- Féminismes israéliens et palestiniens : questions postcoloniales - Élisabeth Marteu p. 71-88 La continuation du conflit israélo-palestinien a indéniablement pesé sur les formulations féministes des Israéliennes et des Palestiniennes qui se sont structurées en parallèle, en miroir, souvent en opposition et, parfois, dans le dialogue. Une étude croisée de ces mouvements permet d'abord de réinterroger la formation des féminismes anticoloniaux et anti-hégémoniques en révélant les imbrications mais également les formes de renversement des rapports dominants/dominés entre des mouvements féministes ancrés dans les luttes de libération nationale. Cette approche comparative vise ensuite à étudier in situ la façon dont la coextensivité des rapports de pouvoir est saisie par les actions collectives féministes, notamment en limitant les formes de solidarité transfrontalières.
- Le féminisme en République populaire de Chine : entre ruptures et continuités - Tania Angeloff p. 89-106 En Chine, où le féminisme a été dès le début étroitement mêlé au Parti communiste par le biais de son principal représentant, la Fédération des femmes chinoises, quels sont les enjeux, limites, et spécificités du mouvement féministe depuis ses origines ? À la suite des travaux de plusieurs féministes et de l'étude d'actions concrètes à l'échelle locale, on se demandera quelle est la part de « féminisme d'État » en Chine et dans quelle mesure il existe un militantisme « autonome » tel qu'il se revendique dans l'existence de plusieurs organisations non gouvernementales, depuis la quatrième Conférence de l'ONU sur les femmes en 1995 et dans le contexte d'un socialisme de marché.
- Idéologie de genre et héritage communiste : L'exemple de la Mongolie en l'an 2000 - Anna Jarry-Omarova p. 107-124 Dans les années 1990, à la suite de la perestroïka, le nouvel espace public de la Mongolie est investi par un mouvement associatif de femmes qui surprend par son dynamisme et son objectif majeur de promotion des femmes en politique. On découvre alors que les femmes mongoles, y compris non militantes, quelle que soit leur classe sociale, leur génération ou même leur identité « clanique », développent un discours revendicatif à l'encontre des hommes révélateur d'une véritable « conscience de classe de sexe ». Pour hypothèse explicative, l'article explore l'idéologie de genre communiste, distillée par le Parti durant les 70 années de communisme, qui a eu besoin des femmes pour « la construction du progrès ». Plus encore, l'organe féminin du Parti, le Comité des Femmes, bien que contrôlé par les dirigeants, a permis aux femmes de concevoir une action politique, en tant que femmes, pour l'ensemble de la Nation. Ceci permet de comprendre l'émergence et l'activité du mouvement des associations de femmes mongoles, et leur inclusion immédiate au sein du mouvement des femmes à l'échelle internationale, avec par exemple l'appropriation et l'utilisation du terme de « genre ».
- La contribution des études postcoloniales et des féminismes du « Sud » à la constitution d'un féminisme renouvelé : Vers la fin de l'occidentalisme ? - Pierre Lénel, Virginie Martin p. 125-144 Cet article, à partir de la polémique qui s'est déroulée en France autour du « foulard islamique », s'efforce de dessiner les contours d'un nouveau paradigme du féminisme, international et mondialisé. S'appuyant sur une critique radicale du féminisme historique qui se réduit bien souvent à un universalisme par trop dogmatique et comportant parfois des relents racistes, les auteur(e) s font émerger un nouveau féminisme mettant au coeur de son analyse le paradigme de l'intersectionnalité. Au croisement des études de genre, des études postcoloniales et des queer studies, ce concept méthodologique permet de construire une nouvelle configuration qui autorise à penser ensemble le sexisme et le racisme tout en dépassant les apories des féminismes occidentaux contemporains.
- Mouvements féministes en Afrique - p. 145-160
- Dialogues Sud-Sud : Une lecture latino-américaine des féminismes postcoloniaux - Rosalva Aída Hernández Castillo p. 161-178 Cet article analyse les défis méthodologiques et politiques posés par la décolonisation de la pensée et de la pratique féministe en dialoguant avec la production théorique des études subalternes des dénommés féminismes postcoloniaux. Dans un effort pour établir des dialogues Sud-Sud constructifs et pour confronter la fragmentation politique, l'auteure propose d'aborder la production théorique des féministes postcoloniales dans une lecture de leurs contributions à partir de leur propre perspective historique et géographique, et des réalités politiques et culturelles vécues par les femmes en Amérique latine.
Varia
- La Méditerranée comme concept et représentation - Jean-Yves Moisseron, Manar Bayoumi p. 179-196 Depuis presque un demi-siècle, la Méditerranée est la référence centrale de l'action publique européenne en direction des pays riverains de la Méditerranée. On constate cependant des difficultés récurrentes de ces ambitions régionales qui sont encore accentuées par le contraste avec les progrès réalisés par la construction européenne dans la même période. Notre papier défend la thèse qu'une partie de l'échec provient précisément du choix du cadre géographique. La Méditerranée comme concept et comme représentation est à l'origine d'une partie de l'échec de l'intégration régionale euro-méditerranéenne. L'utilisation du mythe méditerranéen conduit à faire l'impasse sur les véritables dynamiques sur lesquels pourrait s'adosser la construction d'un espace commun entre l'Europe et le monde arabe.
- La Méditerranée comme concept et représentation - Jean-Yves Moisseron, Manar Bayoumi p. 179-196
Piques et polémiques
- L'aide au développement ne marche pas à la canonnière ! - Jean Copans p. 199-212
Analyses bibliographiques
- Analyses bibliographiques - p. 213-227