Contenu du sommaire : Varia

Revue Cahiers d'études africaines Mir@bel
Numéro no 208, 2012
Titre du numéro Varia
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Nécrologie

  • Études et essais

    • Djenné, « la ville aux 313 saints » : Convocation des savoirs, « lutte des classements » et production d'une ville sainte au Mali - Gilles Holder p. 741-765 accès libre avec résumé
      Ce texte analyse les conditions de production de la « ville sainte » de Djenné, au Mali, à travers un processus d'institutionnalisation de la mémoire qui s'engage au début des années 1980, de concert avec la politique de valorisation économique du patrimoine culturel. On observe un véritable travail sémantique autour des notions de « ville bénie » et de « ville sacrée » qui se fonde sur la concrétion de mises en récits effectuées aux XVIIe, XIXe et XXe siècles par des érudits locaux, passés et présents, des agents de l'administration coloniale, des fonctionnaires maliens, des ethnographes, des journalistes, et jusqu'à l'UNESCO qui classe la vieille ville de Djenné « Patrimoine mondial » en 1988. La civilisation urbaine exemplaire de la ville, sa permanence historique, ses effets de mémoire, ses chroniques, sa baraka, ses listes de saints, ses personnages tutélaires intimes du prophète Muhammad et son postulat paradisiaque sont autant de ressources que les gens de Djenné mobilisent dans les savoirs islamiques - mais aussi profanes - pour faire de Djenné une « ville sainte ».
    • Contribution à l'étude d'un mot voyageur : Chleuh - Rachid Agrour p. 767-811 accès libre avec résumé
      Dans la langue française, on usait, durant la Seconde Guerre mondiale, d'un terme particulier pour désigner l'occupant allemand : le Chleuh. Ce mot vient du Maroc où il est utilisé, par les arabophones, pour désigner les berbérophones. Tout au long de l'histoire, de nombreux termes ont été utilisés pour désigner les Berbères et leur langue. Un élément déclencheur particulier a amené à l'émergence de ce « néologisme » qui apparaît plus clairement après l'étude étymologique dudit terme. Ce dernier connaît un vif succès puisqu'on le retrouve aujourd'hui aussi bien au Maroc, qu'en Tunisie ou en France.
    • Discovery of the earliest royal palace in Gao and its implications for the history of West Africa - Shoichiro Takezawa, Mamadou Cisse p. 813-844 accès libre avec résumé
      L'histoire de Gao a été reconstruite à partir des deux tarikhs de Tombouctou. Et pourtant, les premiers jours de la fondation de Gao qui n'y furent pas décrits précisément ont fait l'objet de féroces polémiques. Nos excavations réalisées à Gao-Sané et Gao-Ancien depuis 2001 ont procuré de nouvelles données qui pourront servir de base pour la réécriture de l'histoire des premiers jours de Gao. D'après ces données, le site archéologique de Gao-Sané aurait été occupé par des commerçants mais aussi par des artisans venant de l'Afrique du Nord. Cette occupation a eu lieu entre le VIIIe et le Xe siècle, c'est-à-dire deux siècles plus tôt que ce qui a été généralement considéré d'après les épitaphes du cimetière voisin. Nos excavations ont également mis au jour d'immenses immeubles en pierres. Nous croyons que ceux-ci formaient une résidence royale protégée par un fort et que leur construction date du début du Xe siècle et leur abandon de la fin du même siècle. Ainsi, nos excavations sont parvenues, pour la première fois, à démontrer l'existence des deux cités de Gao, mentionnées par les auteurs arabes des Xe et XIe siècles.
    • Transformations d'une élite musulmane en Afrique de l'Ouest : Le cas des Dioula de Darsalamy (Burkina Faso) - Katja Werthmann p. 845-876 accès libre avec résumé
      Darsalamy est l'une des rares localités du Burkina Faso fondées uniquement par et pour des musulmans dans l'intention de maintenir à distance les non-musulmans et les pratiques considérées comme païennes. Les musulmans dioula qui quittèrent Bobo-Dioulasso vers la fin du XIXe siècle pour fonder Darsalamy aspiraient à habiter un lieu non « contaminé » par des modes de vie non musulmans comme les danses des masques. Cette émigration coïncida avec des événements qui bouleversèrent toute la région : le djihad de Oumar Tall, les guerres de Samori Touré et l'arrivée des Européens. Ces événements transformèrent les relations entre les érudits musulmans, leurs alliés et protecteurs et les élites locales de Bobo-Dioulasso.
    • Grandeurs villageoises : La politique des ressources et des appartenances au centre du Bénin - Pierre-Yves Le Meur p. 877-903 accès libre avec résumé
      La longue histoire de mobilité des populations du centre du Bénin a produit une société de frontière fonctionnant comme une sorte de « laboratoire sociétal » en matière de formes de la citoyenneté, de contrôle des ressources et de politique des appartenances. À partir du récit et de l'analyse de moments-clés des relations entre « autochtones » et « étrangers » dans la mobilisation de ressources locales à des fins publiques, l'organisation socio-spatiale du peuplement et les débats et les évolutions relatifs à la nature des prélèvements (rente, contribution, quasi-impôt) sur les « étrangers », ce texte propose un cadre interprétatif permettant de situer la notion de grandeur villageoise comme un élément structurant de la gouvernementalité de frontière qui caractérise la zone étudiée.
    • La modernité dans l'historiographie du Soudan : Usages convenus d'un concept nébuleux ? - Iris Seri-Hersch p. 905-935 accès libre avec résumé
      Cet article propose une réflexion critique sur les usages de la catégorie « modernité » dans l'historiographie du Soudan contemporain. Attentive à la distinction heuristique entre catégories analytiques et catégories normatives, l'étude revient sur des conceptualisations européennes de la modernité avant d'examiner ses usages dans la production académique soudaniste des cinquante dernières années. En dépit de la diversité de leurs approches et de leurs objets, la plupart des travaux analysés endossent explicitement ou implicitement l'une ou l'autre des théories de la modernisation et de la dépendance. L'argumentaire débouche sur la nécessité, pour les chercheurs en sciences sociales, de sortir des impasses épistémologiques de la modernité « modernisatrice » et des modernités « multiples ».
    • Contribution à l'histoire des paysages en Afrique de l'Ouest : Les Rivières du Sud des explorateurs et des résidents européens de la période 1830-1910 - Vincent Leblan p. 937-973 accès libre avec résumé
      La région des Rivières du Sud constitue avec le Dahomey Gap un domaine historiographique privilégié pour l'écologie historique du gradient forêt-savane en raison de son contact avec le littoral et de l'ancienneté des implantations européennes sur les côtes. L'examen du contexte politique et professionnel des écrits publiés par les explorateurs de la fin du XIXe siècle rend compte de l'orientation de leur regard sur les paysages. Contrairement aux nomenclatures scientifiques de l'écologie contemporaine, leurs descriptions recèlent des informations sur l'expérience sensorielle des milieux qui permettent d'inférer la physionomie de la végétation. Une évolution en dents de scie de l'extension du couvert arboré peut être retracée à partir des inventaires de ressources naturelles dans les espaces en cours de colonisation. Ces oscillations, dont les causes sont recherchées dans une conjonction de facteurs démographiques, économiques et politiques perceptibles dans ces textes, sont comparées avec les dynamiques antropiques du couvert végétal dans d'autres régions occidentales du gradient forêt-savane au XXe siècle. La superposition de l'opposition entre « forêt » et « savane » à celle d'une nature à préserver et de cultures à civiliser qui détermine les politiques de conservation actuelles paraît correspondre à une sensibilité environnementale qui s'exprime déjà dans les écrits de certains explorateurs.
  • Notes et documents

    • Between Mosque and Palace : Defining identity through ritual practice in Ngaoundéré, Cameroon - Mark Dike DeLancey p. 975-998 accès libre avec résumé
      Cet article examine la relation entre l'architecture et la pratique rituelle pendant la prière du vendredi dans la ville nord-camerounaise de Ngaoundéré. Chaque vendredi, le souverain de Ngaoundéré, un sous-émirat du califat de Sokoto dans le Cameroun contemporain, traverse à l'heure dite la place publique qui se trouve devant son palais pour diriger la prière dans la mosquée centrale. Après la prière, le souverain retourne au palais entouré de la fanfare et de l'apparat, puis reçoit les notables réunis pour une réunion du conseil. La mosquée et le palais qui encadrent physiquement ces cérémonies hebdomadaires représentent les principales populations de Ngaoundéré ? les ex-nomades, les pasteurs, les musulmans ful?e et les sédentaires, agricoles, non musulmans mboum. Le lien de la mosquée au palais, à travers le rituel, reflète le rôle du souverain comme consolidateur des populations représentées par ces monuments, et comme point d'appui pour la construction d'une identité locale unique.
  • Chronique bibliographique