Contenu du sommaire : Le laïc et le religieux dans l'humanitaire
Revue | A contrario |
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Numéro | no 18, 2012/2 |
Titre du numéro | Le laïc et le religieux dans l'humanitaire |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Éditorial
- L'humanitaire, entre l'agir et le croire - Jamie Furniss, Daniel Meier p. 3-5
Articles
- Le laïc et le religieux dans l'action humanitaire, une introduction - Jamie Furniss, Daniel Meier p. 7-36
- Religion et action dans l'espace public en Inde : le cas de l'action sociale des jésuites auprès des populations tribales du sud du Gujarat - Philippe Calia p. 37-60 Cet article fait suite à une enquête ethnographique menée en 2009 auprès de missionnaires de la Compagnie de Jésus opérant dans les zones tribales d'une région de l'ouest de l'Inde, le Gujarat. Il propose de s'intéresser à cette minorité de jésuites ayant investi le champ de « l'action sociale » et qui, par la même occasion, semblent avoir renoncé à toute ambition prosélyte. Après analyse, il apparaît clairement que ces jésuites cherchent en public à éviter toute référence à leur appartenance confessionnelle afin de mobiliser plus efficacement des individus autour d'une identité tribale dite « adivasi ». Ce cas d'étude permettra ainsi d'amorcer une réflexion plus large sur les liens complexes entre religion et implication des individus ou des groupes dans l'espace public.Religion and action in public space in India : the case of Jesuit Social Action with tribal populations of southern Gujarat. This article is the result of ethnographic fieldwork conducted in 2009, dealing with the work of missionaries from the Society of Jesus who operate in tribal areas of South Gujarat, a region located in West India. A small group of them have committed to « social action » and, at the same time, seem to have renounced any proselytising ambition. After analysis, it appears clearly that these Jesuits try to avoid any confessional reference in public, in order to mobilize individuals more efficiently around a so-called « Adivasi » tribal identity. This case study thus feeds into broader reflections on the complex relationships between religion and individual or group involvement in public space.
- Réfugiés et migrants subsahariens «en transit» au Caire : le monopole chrétien de l'assistance ? - Agathe Étienne, Julie Picard p. 61-77 Le Haut Commissariat aux réfugiés (HCR) de l'ONU au Caire, principal interlocuteur des réfugiés et demandeurs d'asile en Égypte, est aujourd'hui connecté à un réseau étendu d'organisations, confessionnelles ou non. Les restrictions politiques du HCR et de l'État égyptien conduisent à la production de migrants «sans statut», sans empêcher l'arrivée de nouveaux Subsahariens. Face aux vides institutionnels de l'assistance, des organisations et des systèmes plus informels sont façonnés par et pour les migrants subsahariens, où l'appartenance chrétienne semble jouer un rôle important. Au-delà des identités religieuses plus ou moins visibles des acteurs de l'assistance, l'état du système de l'asile en Égypte et les liens avec la société civile égyptienne méritent d'être interrogés.«Transiting» sub-saharan migrants and refugees in Cairo: a christian monopoly on the assistance? The United Nations High-Commissioner for Refugees (UNHCR) in Cairo is the leading figure for refugees and asylum seekers in Egypt. It is today connected to a wide network of organizations, faith-based or not. The political restrictions from both the UNHCR and the Egyptian government lead to the emergence of migrants with no status, without preventing the arrival of new Sub-Saharans. In view of these institutional gaps in the assistance, more informal organizations and systems are now shaped by and for Sub-Saharan migrants, with a Christian influence that seems to play an important role. Beyond the religious identities, more or less visible among the protagonists of the assistance, the state of the asylum system in Egypt and the links with the Egyptian civil society are worth questioning.
- Les catégories à l'épreuve des « associations réelles » : ni tout à fait « laïques » et développementalistes, ni tout à fait confessionnelles et de bienfaisance : Étude de cas de l'association Terre des hommes Syrie - Laura Ruiz de Elvira p. 79-96 Associations d'origine confessionnelle vs. associations laïques? ONG développementalistes vs. associations de bienfaisance et humanitaires? Les catégories visant à penser, classifier et comparer les différents types de structures associatives ont beaucoup proliféré depuis les années 1990. Mais, dans quelle mesure ces grilles d'analyse sont-elles réellement opératoires? C'est autour de ce questionnement que nous allons articuler notre réflexion dans le cadre du présent article. Dans le but d'apporter quelques éléments de réponse, nous partirons d'une étude de cas empirique à travers l'analyse de l'association Terre des hommes Syrie. Il s'agira de démontrer en dernière instance la fluidité des ces catégories ainsi que leur chevauchement dans les pratiques réelles et quotidiennes des associations.Testing categories against «real associations»: neither entirely «secular» and developmentalist, nor entirely religious and charitable. Confessional NGOs versus non-religious NGOs. Developmental NGOs versus charities and humanitarian organizations. The categories for thinking about, classifying and comparing different kinds of associative structures have significantly multiplied since the 1990s. To what extent are these analytical frames really relevant. It is around this question that we will articulate our reflection within the framework of the present article. In order to attempt to answer the question we will consider the case of the NGO Terre des hommes, Syria. Our aim is to demonstrate the flexibility of these categories as well as to show how they overlap in the actual daily practices of associations.
- Religion, humanitarianism and development: the secular materialist « mission » of soeur Emmanuelle with Cairo's garbage collectors - Jamie Furniss p. 97-123 Cet article interroge les liens entre religion et action humanitaire/pour le développement à travers le cas de la religieuse française sœur Emmanuelle. Il fait valoir que ces catégories se chevauchent et sont mutuellement constitutives. Deux arguments sont mis en avant. Premièrement, replaçant l'action de sœur Emmanuelle dans le contexte de l'évolution de la mission chrétienne, nous soutenons que son approche matérialiste laïque illustre une mutation dans la mission au cours du XXe siècle, à savoir la relégation au second plan de la conversion au profit d'une nouvelle forme de solidarité humanitaire?: la lutte pour le «développement». Deuxièmement, en examinant la mobilisation d'acteurs «religieux» et «non-religieux» par sœur Emmanuelle, une telle dichotomie est problématisée en démontrant sa porosité. La religion a joué un rôle important, surtout dans les coulisses, pour fédérer les efforts de développement avec les ramasseurs de déchets du Caire, mais elle pouvait aussi être une entrave, lorsqu'elle était trop explicite.This paper examines the inter-connection of religion and humanitarian/development work through the case of the French nun sœur Emmanuelle. It contends that those are overlapping and mutually constitutive categories. Two arguments are developed. First, contextualizing sœur Emmanuelle's work relative to evolving Christian mission, it is argued that her secular materialist approach exemplifies a shift in 20th century mission, away from conversion and toward a new form of humanitarian engagement consisting of the struggle for «development». Second, by examining sœur Emmanuelle's mobilization of both «religious» and «non-religious» actors, that dichotomy is problematized by demonstrating its porousness. Religion was an important federative force in development efforts with Cairo's garbage collectors, particularly behind the scenes, but it could also be a hindrance when too explicit.
- Les ONG au Liban : l'exemple de l'USAID - Fatiha Kaouès p. 125-141 Cet article porte sur les ONG libanaises et les liens qu'elles établissent avec l'USAID, l'Agence américaine pour le développement international, qui fonctionne comme une véritable « super-ONG ». Cette institution affirme l'indépendance totale de ses décisions ; cependant, elle est étroitement dépendante au plan financier du Congrès américain. Au Liban, les communautés religieuses/confessionnelles sont au fondement de l'ordre public et chaque confession dispose de son réseau caritatif. Dans le contexte d'un État faible, cela conduit à s'interroger sur la construction du lien social et de la citoyenneté dans ce pays. Cet article analyse, à partir de quelques projets de développement, les contextes, limites et défi du déploiement des activités de l'USAID au Liban.NGOs in Lebanon : the case of USAID. This article focuses on lebanese NGOs and their links with USAID (U.S. Agency for International Development), which acts as a veritable « super-NGO ». USAID insists that its decisions are fully independent ; however, it is closely dependent on the U.S. Congress for funding. In Lebanon, religious communities rather than the state are the foundation of public order and each denomination has its own charitable network. This raises questions concerning the definition of citizenship and the construction of social ties in this context of strong religious communitarianism and a weak state. This paper considers, through case-studies of several development projects, the contexts, limits and challenges to the activities of USAID in Lebanon.