Contenu du sommaire : Dossier : Nouveaux regards sur le gaullisme et les gaullistes
Revue |
20 & 21. Revue d'histoire Titre à cette date : Vingtième siècle, revue d'histoire |
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Numéro | no 116, novembre-décembre 2012 |
Titre du numéro | Dossier : Nouveaux regards sur le gaullisme et les gaullistes |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Articles
- Présentation - François Audigier, Bernard Lachaise p. 3-8
- L'Europe des gaullistes : Essai sur la place des gaullistes au sein des assemblées européennes (1948-1979) - Christine Manigand p. 9-21 Les relations entre les groupes politiques gaullistes et les institutions parlementaires européennes n'ont jamais été analysées en profondeur. Afin de les éclairer, l'auteur s'attache à scruter le comportement des représentants gaullistes qui siégèrent dans les différentes assemblées européennes après le congrès de La Haye, en 1948, et jusqu'à 1979, date de l'élection au suffrage universel du Parlement européen. Si l'attitude gaulliste face à la construction communautaire ne fut pas univoque ou monolithique, cet article révèle qu'elle fut plus complexe encore qu'il n'y paraît de prime abord, influencée peut-être par l'atmosphère plus conviviale des premières assemblées européennes.Europe and the Gaullists: essay on where Gaullists stand in European assemblies. Relations between political groups and the Gaullist European parliamentary institutions have never really been analyzed. In an attempt to enlighten these relations, the author thoroughly examines the behavior of the Gaullist representatives in exercise after the Hague Congress of 1948 and until 1979, marking the elections by direct universal suffrage of the European Parliament, in the diverse European assemblies. If the Gaullist attitude regarding the European construction was never monolithic or univocal, this article strives to illuminate the even greater complexity than it already seems at first sight, perhaps influenced by the more friendly atmosphere of the first European assemblies.
- Gaullistes et socialistes au prisme du pouvoir local : L'exemple de Marseille (1947-1977) - Anne-Laure Ollivier p. 23-35 Si l'histoire des relations entre socialistes et gaullistes est connue, le prisme local en donne une autre image. À partir du cas marseillais, cet article montre combien les hommes, les cultures et les configurations politiques locales façonnèrent cette histoire : au temps de l'opposition, lorsque les gaullistes emportent la mairie en 1947, succède le temps de l'alliance, entre 1953 et 1965, après la victoire du socialiste Gaston Defferre. Dès lors, la scène politique marseillaise constitue le négatif de l'histoire nationale : les gaullistes dans l'opposition, les socialistes au pouvoir. Cette histoire « par le bas » montre donc comment la Section française de l'Internationale ouvrière (SFIO) est parvenue à surmonter l'épreuve de la Cinquième République, en se repliant sur ses positions locales. A contrario, l'incapacité des gaullistes à reconquérir la mairie après 1953 est examinée à l'aune des difficultés du gaullisme à pénétrer les pouvoirs locaux.Gaullists and socialists as seen through the lens of local power: the example of Marseille. While the history of socialist and Gaullist relations is well known, the local scene reveals another view. Through the example of Marseille, this article shows how people, culture, and local politics shaped this history: in opposition to each other when the Gaullists won city hall in 1947, Socialists and Gaullists became allies after Gaston Defferre's electoral victory, between 1953 and 1965. From then on, the Marseillaise political scene was the opposite of the national one: Gaullists in the opposition, and Socialists in power. Finally, local history shows how the SFIO overcame the challenge of the Fifth Republic by retreating to local positions. Conversely, the Gaullists' failure to regain city hall after 1953 is seen as symptomatic of that movement's difficulties to win power locally.
- Le gaullisme des hauts fonctionnaires (1958-1974) - Luc Rouban p. 37-51 Le gaullisme de la haute fonction publique entre 1958 et 1974 est faible. L'utilisation de banques de données empiriques permet de souligner tout d'abord que les hauts fonctionnaires sont moins attirés par le gaullisme en 1958 que par la gauche ou le centrisme. Après 1958, la proportion de députés hauts fonctionnaires n'est pas plus importante chez les gaullistes que chez les centristes ou les socialistes. Contrairement à ce qui a été souvent soutenu, la « fonctionnarisation du politique » sous la Cinquième République ne passe pas par les hauts fonctionnaires. La pratique gaulliste laissant une grande autonomie aux services, les hauts fonctionnaires ne s'engagent pas de manière partisane et jouent surtout la carte de leur professionnalisme. L'étude prosopographique du corps préfectoral comme de l'inspection des Finances montre que l'engagement gaulliste reste très rare. Les hauts fonctionnaires se sont servis du gaullisme pour conforter leur pouvoir social.Gaullism and high civil servants (1958-1974). Gaullism in High Civil Service between 1958 and 1974 was not prevalent. The use of empirical data banks shows that the high civil servants were less interested in Gaullism in 1958 than in the left or the center. After 1958, the proportion of MPs coming from the senior civil service was about the same as that coming from the Centrists and the Socialists. Contrary to what has often been argued, the “bureaucratization of politics” in the Fifth Republic was not the work of the high civil servants. Moreover, the Gaullist approach was to grant a lot of autonomy to the different departments and so the civil servants did not play party politics, preferring to focus on their professionalism. The prosopographic study of the prefects as well as the “Inspection of Finances” shows that the Gaullist involvement was very limited. The high civil servants used Gaullism to advance their social power.
- Le gaullisme d'ordre des années 68 - François Audigier p. 53-68 Traumatisés par la crise de mai 1968 qu'ils lisent comme un plan organisé et secret de sédition, certains gaullistes organisent autour de cette menace de subversion une partie importante de leur action militante et de leur réflexion théorique. Avec l'appui du conseiller élyséen Jacques Foccart, ces gaullistes d'ordre assurent une veille et préparent la riposte autour d'associations et d'individus réunis en réseaux. Ils exercent, auprès du parti gaulliste, du gouvernement, du Parlement, des médias, une certaine influence, jouant le rôle de lobby afin de promouvoir, avec une efficacité inégale, une action répressive. Si ces réseaux manquent trop de cohérence pour être qualifiés totalement de courant politique, ils forment au sein du gaullisme des années 68 une tendance originale différente de l'anticommunisme classique de l'époque du Rassemble du peuple français (RPF).Law and order gaullism in 1968. Traumatized by the May 1968 crisis that some Gaullists saw as an organized and secret plan of insurrection, they organized much of their activism and theoretical planning around this subversive threat. These law and order Gaullists, backed by the President's advisor Jacques Foccart, monitored alerts and prepared counterattacks with associations and individuals set up in networks. They wielded some influence over the Gaullist party, the government, Parliament and the media, acting as a lobby to further, more or less effectively, repression. Although these networks were too disparate to be considered a real political wing, they did constitute within the Gaullism of 1968 an original current different from classic anti-Communism of the RPF (Rassemblement du people français) period.
- La « petite lanterne du progrès » : Instituteurs et éducation populaire aux marges de Paris (1890-1914) - Christophe Granger p. 69-80 Entre 1890 et 1914, l'école primaire, centre laïcisé des existences locales, forme aussi le cœur d'une intense œuvre d' « éducation populaire », celle des adultes autrement dit. Le soir, après la classe, les instituteurs accueillent la population locale et s'efforcent, en favorisant l'accès de chacun à la compréhension du monde et au débat d'opinion, de faire naître le « citoyen éclairé » que les républicains appellent de leurs vœux. La banlieue « ouvrière » qui s'organise alors aux portes de Paris se révèle d'une particulière vivacité. Outre les cours du soir, les maîtres y multiplient les conférences, auxquelles les projections lumineuses confèrent un succès considérable. Marqués par l'idéal d'une société solidaire, ils animent aussi de nombreuses amicales d'anciens élèves de l'école, qui assurent une importante entraide locale et la socialisation des jeunes par les aînés. Cette éducation populaire n'a rien de simples restes du festin scolaire de la République. Elle dit l'implication sociale des instituteurs, la plasticité de leur métier et l'inventivité pratique dont ils faisaient montre. Elle dit aussi l'intensité passée d'une croisade nationale, où se dessinaient les interrogations de la démocratie moderne.The “small lantern of progress” (magic lanterns) primary school teachers and adult education in the outskirts of Paris (1890-1914). Between 1890 and 1914, primary education, the secular heart of local life, also formed that of an intense work of “popular education”, i.e. of adults. In the evening, after school, the teachers taught the local population, trying to ensure everyone's access to understanding the world and debating the issues in order to foster the “enlightened citizen” that the republicans were calling for. The “workers'” suburbs at the doors of Paris were particularly active. In addition to night school, the teachers organized lectures accompanied by very appreciated luminous projections. Out of their belief in solidarity, they also led many alumni associations that provided local aid and the socialization of the young by their elders. This education was not merely the remains of the Republic's school parties. It was the result of the teachers' involvement in social life, of the flexibility of their profession and of the practical creativity they were able to bring to bear. It also shows how intense the national crusade was in which modern democracy was emerging.
- Michel Debré et les avatars du libéralisme français (1936-1945) - Jérôme Perrier p. 81-95 Haut fonctionnaire devenu homme politique, Michel Debré a toujours attaché une grande importance aux idées, préalable indispensable à l'action politique. Ses riches archives personnelles en témoignent et permettent de retracer avec précision son cheminement intellectuel entre 1936 et 1945, moment où les valeurs libérales fondatrices du modèle républicain français sont mises à rude épreuve. Jeune technocrate, Michel Debré vit avec douleur la crise du régime parlementaire jusqu'à l'effondrement de 1940, qui suscite chez lui une brève tentation autoritaire. Avant que son entrée dans la Résistance ne coïncide avec une forme de synthèse néolibérale visant à réconcilier liberté et autorité, aux antipodes du citoyen opposé aux pouvoirs incarné par le philosophe Alain, mais dans la lignée d'un libéralisme par l'État, hérité notamment des grands fondateurs de la Troisième République. Analyser en détail ce parcours fournit dès lors une contribution inédite à l'étude de la genèse de la Constitution de 1958.Michel Debré and the various forms of French liberalism (1936-1945). As a high-ranking official turned politician, Michel Debré had always given much importance to ideas, which are the necessary prelude to any political action. His rich personal archives bear witness to that and make it possible to pinpoint his intellectual progression between 1936 and 1945, at a time when the liberal values at the core of the French republican model were being severely tested. When he was a young technocrat, Michel Debré painfully experienced the crisis undergone by the parliamentary régime until its collapse in 1940 and was triggered into a short-lived desire for authoritarianism. That was before he joined the Resistance movement, a period which coincided with a form of new liberal synthesis aiming at linking liberty and authority. He was as such the exact contrary of the citizen opposed to any form of power embodied by the philosopher Alain but rather in agreement with the definition of “state liberalism” coming from the great founders of the Third Republic. Hence, a thorough study of Michel Debré's progression would bring a new outlook to the study of the genesis of the 1958 Constitution.
- Pour une autre histoire des Chantiers de la Jeunesse (1940-1944) - Christophe Pécout p. 97-107 L'historiographie des Chantiers de la Jeunesse est dominée par le résistancialisme. Or leur histoire ne se résume pas à ces épisodes, si glorieux soient-ils. Cette organisation d'État au service de Vichy a activement servi sa politique, et ce jusqu'à leur dissolution en décembre 1944. Cette autre histoire des Chantiers, totalement occultée par les anciens et peu étudiée, se manifeste par des faits et des comportements explicites : une lutte contre les menées antinationales, un soutien au Service du travail obligatoire (STO), la traque des réfractaires et la délation de maquisards.For another history of the Chantiers de la Jeunesse (Youth Camps) (1940-1944). The historiography of the Chantiers de la Jeunesse is characterized by “Resistancialism” but these work groups can't be reduced to episodes of resistance, however glorious they might be. This State organization served Vichy actively until its dissolution in 1944. This other history of the Chantiers, totally concealed by the old guard and not well researched, can be seen through explicit facts and behaviors: a fight against anti-national activities, support to the STO (Obligatory Work Service), the hunt for dissenters and the denunciation of the Resistants.
- La fin d'un monde ? : Les dockers de Loire-Atlantique et la réforme de 1992 - Manuella Noyer, Christophe Patillon p. 109-120 Depuis 1947, les dockers bénéficiaient d'un statut particulier qui leur apportait une garantie de rémunération en cas d'inemploi, situation fréquente, les trafics maritimes étant par nature soumis à fluctuation. Rendu responsable de la faible compétitivité des ports français, ce statut fut régulièrement remis en cause par les autorités publiques et le patronat, mais la puissance du syndicalisme CGT sur les quais lui fit traverser les décennies. Il faut attendre 1991 pour qu'un gouvernement ose le remettre en cause, arguant que, sans une réforme de l'organisation du travail dans la manutention portuaire, les ports français ne pourront faire face à la concurrence internationale. En Loire-Atlantique, les dockers CGT de Nantes et de Saint-Nazaire, bien qu'opposés à la réforme, se divisent quant à la stratégie de défense à mettre en œuvre. Au-delà du statut, c'est l'identité d'une corporation singulière qui s'est jouée cette année-là.Loire-Atlantique dockworkers and the 1992 reform: the end of a world ?. From 1947 to 1992, dockworkers enjoyed a special status which guaranteed their wages even when they were not working, a quite common situation as maritime traffic always fluctuates. Blamed for the low competitiveness of French harbours, this status was regularly questioned by public authorities and private employers, but the power of the CGT trade unions on the docks allowed it to remain untouched for decades. In 1991, the French government finally dared to challenge it; it argued that, if cargo handling in the port was not reformed, French harbours would not be able to cope with international competition. In the Loire-Atlantique region, Nantes and Saint-Nazaire CGT dockworkers, although opposed to the reform, were divided about the best defense strategy to implement. Beyond the question of the dockworkers' status, it was the whole identity of a specific group that was played out in 1992.
- De nouvelles sources pour l'histoire politique de la « première Chine populaire » (1949-1976) - Jean-Luc Domenach, Xiaohong Xiao-Planes p. 121-135 Les changements politiques intervenus en Chine depuis 1976 ont entraîné un renouvellement de la politique officielle en matière historique qui a favorisé la publication de nouvelles sources sur l'histoire de la première Chine populaire. Pour l'essentiel, il s'agit de recueils documentaires, de biographies, de mémoires et de témoignages de toutes sortes, parmi lesquels les plus novateurs sont ceux des épouses et des enfants de dirigeants, et ceux plus récents de victimes des calamités. Bien que la plupart d'entre elles se situent à l'intérieur de la vulgate officielle, ces sources autorisent des progrès incontestables dans la connaissance de l'histoire du régime chinois, de la société formée par ses chefs et de certaines dissidences locales.New sources for the political history of the “first People's China” (1949-1976). The political changes in China since 1976 brought about a renewal of official policy in terms of history that has led to the publication of new sources on the history of the first People's China. For the most part, they concern documentary collections, biographies, memoires and first-hand testimonies of all sorts, among which the most revealing are those from the leaders' wives and children, and the more recent ones of the victims of calamities. Although most of them can be placed within the official Vulgate, these sources provide incontestable progress in the knowledge of the history of the Chinese regime, of the society formed by its leaders and of some of the local dissent.
Rubriques
- Archives - p. 137-142
- Avis de recherches - p. 143-147
- Images, lettres et sons - p. 149-161
- Vingtième Siècle signale - p. 163-172
- Librairie - p. 173-203