Contenu du sommaire : Histoire et philosophie de la médecine
Revue | Archives de philosophie |
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Numéro | tome 73, no 4, octobre 2010 |
Titre du numéro | Histoire et philosophie de la médecine |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Histoire et philosophie de la médecine - Jean-François Braunstein p. 579-583
- Problèmes de théorie des sciences - Ludwik Fleck p. 585-600 Dans cet article écrit dès son retour de déportation le grand philosophe et historien de la médecine polonais d'origine juive Ludwik Fleck (1896-1961) se sert de la « rare opportunité » que lui a offerte l'observation de travaux sur le typhus menés à Buchenwald pour tirer des conclusions épistémologiques. Il le fait à travers un dialogue entre Simplicius, qui défend une vision de la science proche de celles du cercle de Vienne, et Sympathius, son propre représentant, qui souligne la dimension sociale de l'activité scientifique, en des termes qui annoncent à bien des égards ceux de Thomas Kuhn.In this paper written just after he came back from deportation, Ludwik Fleck (1896-1961), the great polish philosopher and historian of medicine of Jewish descent, takes advantage of the « rare opportunity » he had of observing the research on typhus undertaken in Buchenwald to draw some epistemological conclusions. He does so through a dialogue between Simplicius, who defends a conception of science close to that of the Vienna circle, and Sympathius, his spokesperson, who underlines the social dimension of scientific activity in terms which in many respects herald those of Thomas Kuhn.
- L'onguent armaire entre science et folklore médical : Pour une épistémologie historique du concept de guérison - Roberto Poma p. 601-613 La guérison prouve-t-elle l'effectivité d'une théorie médicale ? Après avoir suivi un traitement médical, suffit-il d'« aller mieux » pour conclure que le médicament a été efficace ? En posant un regard épistémologique sur l'histoire de la cure à distance des blessures par l'unguentum armarium, nous analysons la manière dont la médecine philosophique des XVIe et XVIIe siècles a traité ces questions. Chez Andrea Libavius (1550-1616) la réflexion concernant les pouvoirs de l'imagination sur le corps et sur les mécanismes naturels d'autoguérison s'avère être particulièrement féconde à ce sujet. Elle souligne la différence entre les plans physiologique et fictionnel d'un traitement, tout en admettant leur complémentarité.Does the healing prove the effectiveness of a medical theory ? After completing a medical treatment, may we conclude that the remedy was effective just because we « get better » ? An epistemological approach upon the history of the magnetic treatment of wounds by the weapon salve shows how some doctors and philosophers of the 16th and the 17th centuries deal with these issues. Andrea Libavius' (1550-1616) reflection on the powers of imagination on the body and on the natural mechanisms of healing is particularly fruitful in this regard. It stresses the difference between the physiological and fictional plans of a treatment, while acknowledging their complementarity.
- Biopolitique, utilitarisme et libéralisme : John Stuart Mill et les Contagious Diseases Acts - Vincent Guillin p. 615-629 Dans le cadre de son analyse de la biopolitique, Michel Foucault avance que le développement de ce mode de contrôle sur la vie est contemporain de celui de l'utilitarisme et du libéralisme et qu'il a trouvé dans ces nouveaux cadres de la rationalité politique une caution théorique. Pour mettre en évidence la nature exacte des rapports entre biopolitique, utilitarisme et libéralisme, il est utile de s'intéresser à un épisode de l'histoire de la santé publique anglaise, à savoir la campagne pour l'abrogation des Contagious Diseases Acts à la fin des années 1860. On essaiera de montrer comment, dans les objections qu'il adresse à ces dispositions, l'utilitariste libéral John Stuart Mill a articulé motifs utilitaires et motifs libéraux quand s'est posée la question du rapport entre libertés individuelles et bien-être social.In the course of his analysis of biopolitics, Michel Foucault maintains that the development of this new mode of control over life is contemporaneous with the rise of utilitarianism and liberalism and that biopolitics found in these new frameworks of political rationality a theoretical rationale. In order to show the exact nature of the relations between biopolitics, utilitarianism and liberalism, it is useful to consider one episode in the history of English public health, namely the campaign for the abrogation of the Contagious Diseases Acts at the end of the 1860s. I will try to show how, in the objections he addressed to these provisions, John Stuart Mill has articulated utilitarian and liberal tenets when the issue of the relations between the freedom of individuals and social well being was raised.
- Une vision médicale du monde : Le « cas » Lombroso - Jean-François Braunstein p. 631-654 L'œuvre du criminologue italien Cesare Lombroso illustre le fait que la médecine, au XIXe siècle, n'est pas seulement une technique thérapeutique mais qu'elle propose bien plutôt une véritable « vision médicale du monde ». La médecine entend résoudre définitivement les problèmes philosophiques traditionnels. Pour Lombroso les références à la médecine ou à la mesure sont des moyens de valider des thèses matérialistes mais surtout ultradéterministes, et d'en tirer des conséquences politiques et sociales.The works of the Italian criminologist Cesare Lombroso illustrates the fact that medicine, in the 19th century, is not only a therapeutic technique but, first and foremost, that it suggests a genuine « medical view of the world ». It is assumed that medicine would solve, once and for all, all the traditional philosophical problems. Lombroso's references to medicine or measurement serve as evidence for materialistic and ultra-deterministic philosophical theses, and enable one to draw their political and social implications.
- « Le rêve comme argument » : Les enjeux épistémologiques à l'origine du projet psychiatrique de Ludwig Binswanger - Elisabetta Basso p. 655-686 La plupart des études actuelles sur la « psychiatrie phénoménologique » séparent assez nettement les approches historiques, philosophiques et cliniques. Cet article vise à poser la problématique d'une histoire épistémologique qui dégage les enjeux des questions à l'origine du modèle méthodologique que Binswanger élabora pour la psychiatrie dès les premières décennies du XXe siècle. Dans ce but, on a choisi de se concentrer sur un ouvrage : Changements dans la conception et l'interprétation du rêve depuis les Grecs jusqu'au présent (1928). Il offre en effet un panorama du contexte psychiatrique et psychologique dans lequel Binswanger traite de la méthodologie en psychopathologie. Mais il montre aussi le rôle que le questionnement du rêve a joué pour la réception épistémologique de la phénoménologie philosophique par le psychiatre qu'est Binswanger.For the most part, nowadays studies in the field of « phenomenological psychiatry » draw a sharp distinction between historical, philosophical, and clinical approaches. This paper aims at opening up the field for an epistemological history, which brings out the problems at stake at the origin of the methodological model that Ludwig Binswanger elaborated for psychiatry in the first decades of the 20th century. For this reason we focus on a Binswager's work of 1928 : The Dream : Changes in its Concept and Interpretation from Greeks to the Present. This work introduces us to the psychiatric and psychological context within which Binswanger dwells upon the problem of methodology in the field of psychopathology. But it also shows us the role that the questioning of dream played for Binswanger's epistemological reception of philosophical phenomenology.
- Le patient comme catégorie de pensée - Todd Meyers p. 687-701 Cet article part du compte rendu ethnographique d'un traitement clinique aux États-Unis pour examiner comment « le patient » est imaginé et réalisé dans le travail médical. L'article avance que le patient n'est ni seulement une position-de-sujet occupée par l'individu qui fait l'expérience de la maladie ou du désordre, ni purement un objet d'intervention médicale, mais plutôt que le patient est une catégorie de pensée, partagée par ceux qui cherchent une guérison et ceux qui l'offrent. De ce point de vue, comprendre la perspective médicale utilisée dans le cadre de la clinique suppose d'inclure la philosophie dans et de la médecine intégrée dans les pratiques thérapeutiques quotidiennes.The paper uses an ethnographic account of clinical treatment in the United States to examine how « the patient » is imagined and realized in medical work. The paper argues that the patient is neither solely a subject-position occupied by the individual experiencing illness or disorder, nor purely an object of medical intervention, but rather the patient is a category of thought, shared between those seeking and those offering healing. In this way, understanding the medical perspective taken up in the clinic would have to incorporate a philosophy in and of medicine embedded in everyday practices of therapeutics.
- Ouvrages envoyés à la rédaction - p. 703-704
- Bulletin de littérature hégélienne XX (2010) - p. 705-732
- Bulletin de Bibliographie Spinoziste XXXII : Revue critique des études spinozistes pour l'année 2009 - p. 733-764