Contenu du sommaire : Après l'esclavage

Revue Annales. Histoire, Sciences Sociales Mir@bel
Numéro vol. 59, no 3, juin 2004
Titre du numéro Après l'esclavage
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Légitimité dynastyque et formes de l'État

    • Les « règles familiales des ancêtres » : Autorité impériale et gouvernement dans la Chine médiévale - Deng Xiaonan, Christian Lamouroux p. 491-518 accès libre avec résumé
      Basé sur un important corpus de textes des Song, cet article définit la notion de « règles familiales des ancêtres » apparue durant cette période comme le patrimoine idéologique de la dynastie. Fait de précédents historiques, cet héritage fixait des normes de conduite et des principes de gouvernement qui devaient permettre à chaque empereur de faire face à deux types de contraintes : le respect des usages antérieurs; la nécessité d'adapter son gouvernement aux évolutions de la situation. Les « règles » permirent d'intégrer le principe dynastique à la nouvelle organisation de la parenté et de fonder l'autorité impériale sur une gestion centralisée et standardisée des affaires publiques. Elles devinrent une des composantes essentielles de la nouvelle culture politique. La centralisation des Song est ainsi analysée d'un point de vue interne, celui de la constitution d'un savoir partagé entre le souverain et les lettrés fonctionnaires.
  • Après l'esclavage. Terre, citoyenneté, mémoire

    • Le « droit d'avoir des droits » : Les revendications des ex-esclaves à Cuba (1872-1909) - Rebecca J. Scott, Michael Zeuske p. 521-545 accès libre avec résumé
      À Cuba, l'émancipation progressive permit à un grand nombre d'hommes et de femmes, esclaves ou récemment libérés, d'accéder à certaines formes de la culture juridique. Les revendications, qui, quelques années plus tôt, seraient peut-être restées des défis verbaux ou physiques, prirent la forme d'actions en justice et, dans ce but, les esclaves et les exesclaves se sont alliés avec ceux qui pouvaient les aider dans leur combat juridique. Ces initiatives suggèrent l'émergence d'une conviction du « droit d'avoir des droits », qui allait bien au-delà du simple refus de son propre asservissement. C'est ainsi que les bureaux des notaires et les tribunaux de première instance sont devenus des lieux où la liberté s'affirmait par l'exercice d'actions en justice entraînant la reconnaissance publique de revendications. De fait, faire valoir sa « qualité pour agir », c'est-à-dire son statut de personne susceptible d'être entendue par la justice et d'avoir un « intérêt » pour agir, était parfois aussi important qu'obtenir un résultat positif à l'issu de son procès.
    • Droit, justice et dépendance dans les Antilles françaises (1848-1852) - Myriam Cottias p. 547-567 accès libre avec résumé
      L'instauration, par le gouvernement provisoire de la IIe République, des jurys cantonaux, juridiction paritaire entre anciens esclaves et anciens maîtres, avait pour objet de régler les conflits de travail et de maîtriser les sentiments violents liés à la mémoire de l'esclavage. Cependant, en vertu du droit positif, la pragmatique de la sentence délivrée par les jurys cantonaux a surtout produit une retraduction normative de l'état d'esclave à celui d'individu dépendant.
    • L'héritage de l'esclavage : La mémoire du sol en Jamaïque occidentale - Jean Besson p. 569-587 accès libre avec résumé
      L'article examine l'héritage de l'esclavage, du marronage et de l'émancipation dans la Jamaïque occidentale, démontrant qu'un regard porté spécifiquement sur la propriété (essentiellement la terre) et la race permet de proposer une méthode pour faire se croiser passé et présent, celui-ci éclairé par celui-là. Reposant sur un travail de terrain mené entre 1968 et 2003, cette approche méthodologique est ici testée sur neuf communautés paysannes fondées par des esclaves, des anciens esclaves et des Marrons, et basées sur l'acquisition de terres. Ces communautés, qui sont liées à des diasporas raciales en Europe et en Amérique du Nord, se situent dans le contexte d'une structure agraire post-coloniale et dans le cadre d'un monopole euro-américain sur le sol, reflet d'une rémanence de l'esclavage. Les différences entre villages s'explicitent par les différents modes de liens entre trois points : la terre, la race, la mémoire du passé et en continuité avec celui-ci.
    • « Sentirse negro » : Empreintes du passé et mémoire collective au Chocó - Anne-Marie Losonczy p. 589-611 accès libre avec résumé
      L'exploration ethnographique des registres culturels sur lesquels se construisent la narration, l'évocation, l'occultation et la transmission du passé dans les groupes noirs de la côte Pacifique colombienne ainsi que l'analyse de leur rôle dans la genèse des sociabilités noires mettent en cause l'imputation généralement acceptée d'une mémoire collective et d'une tradition unitaire à toute société non nationale. Mémoire et tradition unifiées apparaissent au contraire comme une construction savante délibérée, suscitée et médiatisée par la nouvelle définition multiculturelle de l'État colombien, emblèmes et légitimation du statut juridique et territorial de minorité ethnique. Mais cette nouvelle insertion juridique dans l'espace national s'accompagne, dans les territoires - auparavant isolés - de groupes noirs, de l'irruption brutale d'une violence multiforme, insurrectionnelle et contre-insurrectionnelle, expérience fondatrice qui sert de ciment identitaire et politique aux citoyens non ethniques de la nation. L'article examine leurs stratégies de survie et de reconstruction, en petits groupes et en réseaux, puis leur singularité historique en Colombie, fondées sur une « mémoire marron » qui, toujours, réactualise l'expérience fondatrice de la fuite et de la mise à distance de la contrainte et de la violence, et dessine les contours de ce nouveau régime de mémoire.
  • La valeur des femmes

    • Esclavage et prix de la fiancée : La société thrace au risque de l'ethnographie comparée - Alain Testart, Jean-Louis Brunaux p. 615-640 accès libre avec résumé
      Dans cet article, nous nous proposons de relire les sources ethnographiques antiques, surtout grecques, à propos des Thraces, qui habitaient l'actuelle Bulgarie. Les auteurs proposent de nouvelles traductions et s'appuient sur quelques recherches nouvelles en anthropologie comparée pour étudier les coutumes relatives aux prestations matrimoniales (prix de la fiancée) et à l'esclavage interne (vente des enfants en esclavage, esclavage pour dettes). Ils montrent le lien entre elles et en dégagent les implications, en particulier politiques.
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