Contenu du sommaire : Théories du suffrage politique dans la France du XIXe siècle

Revue Revue française d'histoire des idées politiques Mir@bel
Numéro no 38, 2e semestre 2013
Titre du numéro Théories du suffrage politique dans la France du XIXe siècle
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Études

    • Présentation - Stéphane Schott p. 227-230 accès libre
    • Les listes de confiance - Pierre-Yves Quiviger p. 231-240 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      On attribue fréquemment à Sieyès la création des « listes de notabilité » qui ont marqué la période napoléonienne. En partant de la conception du suffrage développée par Sieyès dans ses projets constitutionnels de l'an VIII, on montre que la notion de confiance ne doit pas être confondue avec celle de notabilité. Sieyès permet ainsi de comprendre les phénomènes d'euphémisation propres à la perception contemporaine du suffrage, vu comme désormais universel et dénué de médiation, alors que le phénomène des partis politiques, d'une part, et la persistance d'un décalage entre habitants et votants d'autre part, consacre une pratique du suffrage moins éloignée des projets siéyèsiens qu'on ne pourrait le penser.
      Sieyès is frequently credited with the invention of the “listes de notabilité” (slates of notables), a salient feature of the Napoleonic era. In view of the conception of suffrage expressed by Sieyès in his constitutional project of the Year VIII, it can be shown that “trust” should not be mistaken for “notability”. Sieyès's views help understand how euphemized our contemporary perception of suffrage really is. Whereas we deem it universal and unmediated, our practice, with its party system and its persisting gap between residents and voters, is actually closer to the sieyesian project than what is commonly thought.
    • Le suffrage censitaire d'après les débats parlementaires du début de la monarchie de Juillet - Guillaume Bacot p. 241-255 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Les débats parlementaires du début de la monarchie de Juillet montrent que le suffrage censitaire était alors très généralement accepté, bien que certains, qui le justifiaient par la théorie de l'électorat-fonction, ne souhaitaient guère l'étendre, tandis que d'autres, qui s'en tenaient à celle de l'électorat-droit, auraient voulu l'ouvrir beaucoup plus largement. C'est cette différence qui sera à l'origine de la distinction cardinale entre souveraineté nationale et souveraineté du peuple. Mais les partisans de l'une comme de l'autre avaient de la peine, quoique pour des raisons différentes, à donner une justification parfaitement cohérente de ce système électoral.
      Parliamentary debates in the early days of the July Monarchy express a wide acceptance of census suffrage. Those who justified the census in terms of a function-based theory of suffrage, did not wish to extend it, whereas those who held to a right-based theory wanted to widen considerably its scope. This contention is at the root of the basic distinction between national sovereignty and sovereignty of the people. For different reasons, both sides, however, were at pains to pull out a perfectly consistent justification of the system.
    • L'étendue du suffrage universel sous la IIe République - Philippe Blachèr p. 257-268 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      En proclamant le suffrage universel en 1848, les constituants de la Seconde République retiennent une conception de l'égalité politique qui prend ses distances avec la théorie démocratique. Pour les républicains, il ne peut y avoir d'égalité en droit que dans la mesure où la norme juridique délimite une catégorie à l'intérieur de laquelle les citoyens sont égaux. Ainsi, paradoxalement, l'égalité politique s'accompagne de l'exclusion dès son émergence dans le droit politique. Si le suffrage universel n'implique pas nécessairement la reconnaissance du droit de vote à tous les citoyens, l'analyse des discours justifiant ce dispositif confirme que le suffrage universel est, au XIXe siècle, conçu comme un instrument, et non en tant que principe abstrait.
      As they proclaimed universal suffrage in 1848, the constituents of the Second Republic held a conception of political equality that distanced itself from the democratic theory. According to the Republicans, equality of rights was conditional on how the legal norm could circumscribe some category within which citizens would be deemed equal. Paradoxically, at the very moment when political equality was emerging in political law, it was accompanied by an exclusion process. As universal suffrage does not necessarily imply the right of all citizens to vote, a discourse analysis of the justifications of this system confirms that universal suffrage is viewed as an instrument rather than as an abstract principle during the 19th century.
    • Les candidatures officielles - Stéphane Schott p. 269-290 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Si la candidature officielle est généralement considérée comme une invention du Second Empire, il s'agit d'une pratique bien plus ancienne qui n'a d'ailleurs pas disparu avec la chute du régime de Napoléon III. Cette étude interroge plus précisément les rapports entre les candidatures officielles qui constituent une limitation de l'objet du droit de suffrage, et les différents types de discours théoriques qui se développent au cours du XIXe siècle sur la question du suffrage politique.
      Official candidacy is generally held to have been invented by the Second Empire. This practice is actually far more ancient and the fall of Napoleon III's regime did not put an end to it. The present paper studies the relations between official candidacy as a limitation of the object of suffrage rights and the various types of 19th-century theoretical discourses about political suffrage.
    • L'appel au peuple - Jean-Marie Denquin p. 291-303 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La notion d'appel au peuple est souvent utilisée exclusivement par référence à la doctrine et la pratique bonapartiste. Prise au sens habituel des termes, elle peut aussi désigner des procédures variées : vote par oui ou par non, ou des élections consécutives à une dissolution. Trois fonctions, qui s'interpénètrent, lui sont prêtées : fonder une légitimité, manifester la responsabilité des gouvernants, ou demander un avis. Le fait que l'appel soit une procédure inhabituelle, fruit d'une décision discrétionnaire des détenteurs du pouvoir, crée des ambiguïtés que seule pourrait lever une procédure symétrique d'initiative populaire.
      The notion of “appeal to the people” is often exclusively used to refer to the bonapartist doctrine and practice. In the common sense of the words, it may also denote various procedures : aye or nay voting or elections following the fall of a cabinet. Three interpenetrating functions are attributed to it : grounding legitimacy, demonstrating the accountability of governors, requesting an opinion. The fact that the appeal is an unusual procedure at the discretion of those in power, creates ambiguities which only some symmetrical popular initiative procedure could dissipate.
    • Le suffrage universel dans la république : Les débats parlementaires 1871-1875 - Pierre-Henri Prélot p. 305-328 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La période 1871-1875 est essentielle du point de vue de l'affermissement du suffrage universel en France. L'objet de cette étude n'est pas de revenir sur cette question bien connue, mais qui a eu tendance à occulter une autre réalité moins visible. Il s'agit ici de montrer, dans une perspective plus institutionnelle, à quel point les débats sur le scrutin (droit de vote et inéligibilité, domiciliation, vote familial, électorat droit ou fonction, mode de scrutin, registres électoraux, lieu du vote, référendum) sont en réalité dominés pendant ces quatre années par les enjeux constitutionnels qui restent indécis jusqu'au bout. Autrement dit, lorsqu'on débat de la loi électorale, qu'elle soit municipale ou législative, c'est encore et toujours les institutions futures, que l'on ne connaît pas encore, que l'on a en tête.
      From the viewpoint of universal suffrage in France, the 1871-1875 period proved crucial. This is a well documented topic into which it is not the purpose of the present study to delve. However, this question conceals another, less visible set of facts. In a more constitutional perspective, it can be shown that to a considerable extent, the four-years debates on suffrage (voting rights, eligibility, residency, familial vote, vote as right or as function, mode of balloting, electoral registers, polling stations, referendum) were actually dominated by constitutional issues which remained moot until the very end. In other words, when the municipal or legislative electoral law is being debated, the issue in mind is always the yet unknown future institutions.
    • La notion de suffrage universel « indirect » - Bruno Daugeron p. 329-366 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Malgré un enracinement profond dans le vocabulaire du droit constitutionnel, la notion de suffrage universel indirect, généralement utilisée pour rendre compte du rôle du Sénat, est non seulement loin d'être claire par elle-même mais présente d'importantes difficultés historiques, théoriques et juridiques. Son histoire épouse celle des rapports complexes entretenus entre le suffrage universel et le gouvernement représentatif depuis la Révolution française et ne prend tout son sens que dans une perspective de théorie constitutionnelle. Si elle révèle comment se construisent les justifications constitutionnelles, elle en dit également beaucoup sur la manière dont se forgent et se diffusent les concepts en droit constitutionnel.
      Although deeply rooted in the vocabulary of constitutional law, the notion of indirect universel suffrage, commonly used to account for the role of the French Senate, not only is far from being self evident but also raises important historical, theorical and legal difficulties. Its history accompanies that of the complex relationships between universal suffrage and representative government since the French Revolution and only adquires its full significance within the perspective of a constitutional theory. It reveals the way constitutional justifications are construed and tells a lot about the forging and the difusion of constituional legal concepts.
    • Sur les origines de la revendication proportionnelle - Olivier Ihl p. 367-388 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article s'efforce de montrer ce que peut apporter une lecture centrée sur la carrière des revendications proportionnalistes depuis le XIXe siècle. L'idée est de faire droit aux processus concrets par lesquels la question du vote proportionnalisé est parvenu à devenir une représentation sociale puis une ingénierie de gouvernement. Ce qui est notamment une manière plus réaliste de rendre compte de la notion d'« influence » en matière de procédé électif. Au final, l'entrée en jeu de chaque nouvelle régulation électorale peut être étudiée par elle-même comme les réseaux et supports de diffusion, penseurs et écrits mobilisateurs, qui ont servi à construire la légitimité de chaque réforme électorale.
      This paper attempts to show what benefits a reading centered on how proportionalist claims evolved since the 19th century can bring to scholarhip. Its purpose is to give full credit to the concrete processes which transformed the issue of proportionalized suffrage first into a social representation and then a form of government engeneering. Which, by the way, is a more realistic account of the notion of “influence” in polling matters. At bottom, each introduction of a new suffrage regulation can be studied apart, as can the networks and media, thinkers and mobilizing writings whereupon the legitimacy of each reform of suffrage was built
    • Conclusions - Daniel Gaxie p. 389-393 accès libre
  • Bibliographie