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Revue | La Revue de l'IRES |
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Numéro | no 77, 2013/2 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- L'emploi au cœur de la négociation d'entreprise : quel impact de l'accord du 11 janvier 2013 ? - Jacques Freyssinet p. 3-38 La France connaît un développement de la négociation d'entreprise qui accorde un poids croissant à l'emploi. L'accord du 11 janvier 2013 accélère ce mouvement en créant de nouvelles possibilités de dérogations au Code du travail. Dans ce contexte, il faut s'interroger sur la pertinence d'une négociation d'entreprise sur l'emploi. Quelles contreparties peuvent obtenir les salariés en échange des sacrifices qu'ils acceptent au nom de l'emploi ? Entre l'accord d'établissement et celui signé à l'échelle d'un groupe multinational, quel est le bon niveau pour négocier sur l'emploi ? Quelles protections les salariés peuvent-ils trouver dans leur contrat de travail lorsque des accords d'entreprise dérogatoires s'imposent à eux ? L'accord du 11 janvier 2013 s'inscrit dans ce mouvement et fournit un exemple de la coproduction des normes entre État et acteurs sociaux qui est devenue une caractéristique du système français de relations professionnelles.Employment at the Heart of Company Bargaining: What Is the Impact of the Agreement That Was Signed on 11 January 2013?In France, company bargaining that gives greater weight to employment is on the increase. The agreement, which was signed on 11 January 2013, has speeded up this process by creating new possibilities for granting exemptions from the Labour Code. In this context, the question of the relevance of company bargaining for employment is raised. What compensation can employees get in exchange for the sacrifices they accept in the name of employment? Which is the better level for negotiating employment - the firm or the multinational company it is part of? What protection can employees find in their employment contracts when they come under company agreements with exemptions? The 11 January 2013 agreement is part of this process and provides an example of the coproduction of labour standards by the State and social actors, which has become a feature of the French industrial relations system.
- L'évaluation sous tension : l'exemple des effets sur l'emploi des « 35 heures » - Stéphane Jugnot p. 39-78 Très présente dans les discours, l'évaluation des politiques publiques n'est pas encore entrée pleinement dans les pratiques. L'évaluation des effets sur l'emploi des 35 heures illustre les difficultés rencontrées. Elle montre comment cet exercice s'effectue sous tension, à la fois pratique, théorique et politique. Notamment, parce que les données disponibles contraignent les choix techniques de l'évaluateur, parce que le rythme de l'action publique réclame des résultats dans des délais qui ne sont pas ceux de l'évaluation et parce que la relation des acteurs politiques à l'évaluation n'est pas exempte d'instrumentalisation.Toutefois, cette instrumentalisation n'est pas une relation unilatérale : la responsabilité des chercheurs est aussi en cause. En mettant trop en avant les limites techniques de leurs travaux, ils peuvent donner des raisons de rejeter des résultats qui ne plaisent pas. À l'inverse, il leur arrive aussi d'occulter leur cadre théorique pour aboutir à des conclusions moins scientifiques que normatives, entrant alors dans le champ du politique.Assessment under Pressure: The Exemple of the Impact of the 35-hour Week on Employment
There is much talk about assessment of public policies, but it has not been fully incorporated into practice. Assessment of the impact of the 35-hour week on employment illustrates the difficulties involved. It shows how this process is carried out under pressure practically, theoretically and politically. This is especially so, because available data restrict the technical choices of those who make the assessment. It is also the case, because the pace of public action demands results in time-scales that are not the same as those of assessment and because the relationship of political actors with assessment is not free from instrumentalisation. However, such instrumentalisation is not unilateral – the responsibility of researchers is also questioned. By putting too much emphasis on the technical limits of their work, they can provide reasons for rejecting results that do not please. Conversely, they sometimes conceal their theoretical framework in order to reach conclusions that are less scientific than normative, thereby entering the field of politics. - Les « très hauts » revenus : un effort contributif bien plus faible que la moyenne - Pierre Concialdi p. 79-105 La proposition gouvernementale d'instaurer une surtaxe temporaire sur la partie des revenus d'activité excédant 1 million d'euros par an a donné lieu à des débats sur le caractère plus ou moins « excessif » de cette mesure. Ce débat s'appuie souvent sur la comparaison des taux d'imposition par niveau de revenu. On montre que cette approche comporte des limites. Pour les surmonter, on développe une méthode qui permet de comparer l'effort contributif des différentes catégories de ménages. Les résultats montrent que l'effort contributif diminue tout au long de l'échelle des revenus : il est le plus faible pour les très hauts revenus. La surtaxe temporaire envisagée par le gouvernement pour ces très hauts revenus aurait porté le taux d'effort contributif des personnes concernées au même niveau que l'effort contributif du contribuable médian, ce qui aurait permis de donner corps au principe d'égalité de tous devant l'impôt.Very High Income: a Tax Effort that is Much Lower than the Average
The government's proposal to introduce a temporary additional tax on the part of income that exceeds 1 million Euros per annum has led to debates on the more or less “excessive” nature of the measure. This debate is often based on a comparison of tax rates for each level of income. We show that this approach has its limits. In order to deal with them, we develop a method that makes it possible to compare the contributory effort of different categories of households. The results show that the contributory effort diminishes as income increases and is, in fact, smallest for those with very high income. The temporary additional tax envisaged by the government for the very rich would have increased the rate of their contributory effort to the level of median tax payers, thus making it possible to give substance to the principle of equality for everyone regarding taxation. - Les travailleurs du Web : innovation et catégories professionnelles dans la presse en ligne - Camille Dupuy p. 107-127 Les journalistes constituent un groupe professionnel dont les contours fluctuent. L'étude de la mise en place d'une innovation technique dans une entreprise de presse en ligne, Le Monde Interactif, permet d'interroger conjointement les dynamiques de l'innovation et la recomposition des identités professionnelles. L'innovation est portée par les salariés qui sont réunis dans des groupes de travail. Elle met à l'épreuve et renforce l'unité du collectif de travail qui dépasse les frontières de métier et les redessine.Web Workers: Innovation and Occupational Categories in Online Journalism
Journalists are an occupational group whose boundaries are constantly changing. Analysis of the introduction of technical innovation in a company involved in online publishing, namely Le Monde Interactif, makes it possible to examine both the dynamics of innovation and changes in occupational identities. Innovation is carried out by employees, who meet in working groups. It tests and consolidates the unity of the work collective, which goes beyond the boundaries of the occupation and reshapes them. - Les réformes des retraites dans les pays d'Europe centrale et orientale : entre influences internationales et déterminants nationaux - Slavina Spasova p. 129-163 Un des arguments majeurs lors de la mise en place des réformes visant à instaurer des systèmes de retraite à trois piliers en Pologne, Hongrie et Bulgarie était de protéger ces systèmes du « risque politique », c'est-à-dire de pressions politiques pouvant peser sur eux. Comment, dès lors, expliquer que les trois pays aient remis ces réformes structurelles en cause à peine une dizaine d'années après leur mise en place ?Les réponses se trouvent-elles dans la philosophie même de ces réformes, dans un défaut de mise en œuvre, ou encore dans des développements politiques instables ? Pour apporter des éléments de réponse, l'article se penche, d'un côté, sur l'influence idéationnelle d'une constellation d'acteurs internationaux et d'un autre côté sur l'appropriation et la mise en place de ces réformes systémiques par les acteurs nationaux. Dans le contexte européen, où les réformes des retraites sont à l'ordre du jour de plusieurs des anciens membres de l'Union européenne, comprendre la dynamique et les transformations de pays ayant conduits ces réformes systémiques en introduisant une composante importante en capitalisation permet d'éclairer certaines logiques à l'œuvre dans l'agenda européen.
- Résumés des articles - English Abstracts - p. 165-169