Contenu du sommaire : Objets en crise, objets recomposés

Revue Etudes rurales Mir@bel
Numéro no 167-168, 2003
Titre du numéro Objets en crise, objets recomposés
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Crise et recomposition des objets : les enjeux de l'archéogéographie : Introduction - Gérard Chouquer p. 13-31 accès libre
  • La part de l'indigène et du vernaculaire dans les textes des arpenteurs romains - François Favory p. 33-54 accès libre avec résumé
    Parce que les textes des arpenteurs romains sont des textes qui commentent des situations locales observées lors de la révision d'archives fiscales, et non pas des textes modélisant la planification agraire en vue de l'assignation, on pose l'hypothèse qu'ils sont de bons témoins de situations concrètes : mesures locales, modes de bornage, délimitation des terres dites occupées et des terres soumises au vectigal, prise en compte de la mobilité des paysages sous l'effet de l'alluvionnement, respect des variétés locales d'arbres et de végétaux, notion, assez étrange, de « comparaison des cultures ». Il est donc précieux que les arpenteurs aient consacré de longs développements à décrire ce paysage agraire local, si variable dans le temps et dans l'espace. Leurs textes montrent un caractère qu'on ne leur reconnaissait pas : ils sont une source tant sur le paysage agraire antique que sur l'arpentage et sur la division des terres à assigner aux colons.
  • Réflexions sur le modèle de la cité antique : l'exemple de Pax Iulia (Beja, Portugal) - Maria da Conceiçã Lopes p. 55-67 accès libre avec résumé
    À partir d'une critique raisonnée des modes habituels de définition et de délimitation de l'espace de la cité antique, l'auteur propose d'envisager un modèle moins confiné, accordant une place essentielle à la question des héritages et des aspects locaux, et ne cherchant pas à faire à tout prix de la cité locale une petite Rome. À Pax Iulia, cité prise comme support de la réflexion, le discours a longtemps été prisonnier de ces modes identitaires de définition du territoire antique. Il s'agissait, en fait, de justifier de choix actuels par l'utilisation et la mise en perspective des réalités antiques. Pour terminer, l'auteur suggère de donner une plus grande souplesse à l'étude des espaces frontaliers où se jouent des associations et des conflits intéressants.
  • L'espace des sociétés antiques, entre projet et expérience - Gérard Chouquer p. 69-91 accès libre avec résumé
    Les connaissances et les conceptions du territoire et de l'espace des sociétés antiques sont en pleine évolution. On ne peut plus poser comme allant de soi le principe d'identité entre le territoire assigné et le territoire de la cité. Des exemples désormais bien documentés démontrent la complexité et l'indépendance relative des deux réalités. L'organisation spatiale de la fiscalité, mieux comprise grâce à une relecture des textes des arpenteurs romains, gagne à être envisagée du point de vue de la souplesse des solutions administratives. La question est de savoir comment étaient organisés la perception et l'enregistrement de l'impôt des terres non centuriées. L'enquête archéologique attire l'attention sur un décalage intéressant : le projet de géométrie cadastrale des arpenteurs ne se retrouve pas tel quel sur le terrain. Ces diverses remarques mettent à mal le schéma simple hérité de la géographie historique et de la géographie politique, de même qu'elles permettent d'interroger les méthodes encore employées pour l'étude de l'espace de l'Antiquité.
  • Des centuriations plus belles que jamais? : Proposition d'un modèle dynamique d'organisation des formes - Claire Marchand p. 93 accès libre avec résumé
    Les études morphologiques du paysage se sont longtemps appuyées sur l'idée que les formes pouvaient être lues comme des pages d'histoire que les historiens se répartissaient en fonction de l'époque de prédilection de chacun. Toutefois récemment on a montré que la structuration en réseau est un processus majeur de l'organisation des formes, reposant sur une dynamique complexe, non linéaire un enchevêtrement d'histoires. Il faut donc renoncer étudier les formes à l'aide des concepts habituels qui, en dissociant les éléments et dans le temps et dans l'espace, nient cette dynamique. Un changement de perspective est nécessaire : à partir du concept d'auto-organisation, les processus d'évolution des systèmes spatiaux font apparaître un objet morphologique nouveau : dynamique, complexe, transmis, transformé.
  • Comment les formes du passé se transmettent-elles ? - Sandrine Robert p. 115-131 accès libre avec résumé
    Dès la fin du XIXe siècle, géographes, architectes et archéologues ont fait le constat de la permanence de formes anciennes du paysage dans le parcellaire. Aux principes de transmission traditionnellement invoqués comme le maintien d'une trace matérielle ou le rôle du juridique et de l'adaptation technique, il faut ajouter une logique topologique des formes en plan. Des emprises sont réactivées et se maintiennent, dans un changement incessant des constructions. La dynamique est produite par une interaction entre un potentiel de formes et la société qui les réinvestit tout en les transformant.
  • De nouveaux objets d'histoire agraire pour en finir avec le bocage et l'openfield - Cédric Lavigne p. 133-185 accès libre avec résumé
    Depuis Marc Bloch, l'opposition entre champs ouverts et champs clos est donnée comme clé d'interprétation de l'organisation des paysages. Les résultats récents de la morphologie dynamique et de l'archéologie préventive, tout comme la caractérisation des formes de la planification agraire médiévale des arpenteurs s'inscrivent en faux contre cette qualification traditionnelle des objets de l'histoire agraire. On montre, ainsi, qu'au-delà d'une typologie fondée sur les modelés paysagers modernes, la morphologie de la trame de base renvoie, dans de nombreux cas, à une trame auto-organisée, de caractère uchronique et hystéréchronique, extrêmement mobile dans le détail de ses formes, et pour laquelle il est difficile de fixer un état type pour le Moyen Âge. En conséquence, le bocage et l'openfield ne peuvent être présentés comme les formes emblématiques des paysages médiévaux, et l'openfield, comme la forme représentative de la planification agraire médiévale.
  • Le plan radio-quadrillé des terroirs non planifiés - Magali Watteaux p. 187-214 accès libre avec résumé
    L'article propose de considérer que la plus grande partie des formes parcellaires des villages français est de type radio-quadrillé, associant un réseau de voies polarisé par un habitat villageois à une trame parcellaire auto-organisée et héritée, de type le plus souvent quadrillé. Cette modélisation, fondée sur de nombreuses observations de formes, nécessite la révision des opinions émises par les historiens médiévistes à propos de l'organisation de l'espace médiéval. Celui-ci n'est pas de type radio-concentrique, et il n'émerge pas de façon tranchée à l'occasion de la polarisation et de la « naissance » du village. Quand elles existent, les formes radiales ou concentriques ne sont pas organisatrices sur de grands espaces, et elles peuvent toujours être rapportées à des nécessités spécifiques. Le terroir radio-concentrique est donc une expression abusive et réductrice d'une réalité géographique et dynamique plus riche.
  • La nature des médiévistes - Joëlle Burnouf p. 215-226 accès libre avec résumé
    S'interrogeant sur la Nature des médiévistes, c'est-à-dire sur le rapport que les médiévistes entretiennent avec l'histoire de l'environnement, et sur la nature de ce rapport, l'auteur relève la contradiction suivante : malgré plusieurs évolutions intéressantes auxquelles l'archéologie a fortement contribué depuis vingt ans, rien ne bouge ou ne semble bouger, et les paradigmes que les archéologues médiévistes ont hérités des disciplines mères que sont l'histoire et la géographie sont toujours en place. L'auteur s'attache à relire les héritages et à rechercher les véritables enjeux de la recherche. Ceux-ci paraissent se situer dans la mise en oeuvre de nouvelles associations et dans la délibération des conflits de réalités. Sur la base d'assez nombreux travaux interdisciplinaires, capables de traverser les frontières des périodes historiques classiques, il est possible de montrer que les éléments sont existants et doivent être réunis pour recomposer de nouveaux objets de recherche.
  • Dynamique d'un corridor « fluviaire » sur la commune des Maillys (Côte-d'Or) - Mélanie Foucault p. 227-245 accès libre avec résumé
    Au sud de la plaine des Tilles, dans un coude de la Saône, le secteur des Maillys révèle une dynamique paysagère tout à fait étonnante. La documentation planimétrique montre au lieu-dit la Noue de Lépinge les mutations, dans un désordre apparent, d'un corridor paysager qui, d'un chenal tardiglaciaire, s'est transformé en village protohistorique puis en ruisseau moderne, et s'est changé en forêt aux XIXe et XXe siècles, avant de devenir des champs, après les années soixante-dix. Aujourd'hui les grandes parcelles géométriques qui structurent l'espace des Maillys ont gommé la trace du corridor, niant la réalité de cet objet dynamique. Pourtant, en hiver, les sols gorgés d'eau qui accompagnent les crues de la Saône le font réapparaître avec l'humidité. L'étude archéogéographique, en privilégiant les dynamiques et non pas les périodes, ou les diverses natures de cet objet, révèle que c'est le lieu qui fait l'unité.
  • Changer la carte, c'est changer l'objet - Caroline Pinoteau p. 247-262 accès libre avec résumé
    En cherchant à caractériser, à l'aide des procédures classiques de la photo-interprétation, l'organisation spatiale ancienne et héritée d'un paysage ordinaire situé à Sorigny (37), l'auteur se heurte à une impasse et suggère une autre méthode d'identification des processus morphologiques, axée sur la combinaison d'éléments physiques et sociaux et l'articulation des objets des différentes disciplines. Elle identifie deux réseaux imbriqués l'un dans l'autre : un réseau « fluvio-parcellaire » et un réseau « hydro-parcellaire » à partir desquels se connectent et s'organisent la plupart des autres éléments spatiaux. L'élaboration cartographique met en valeur le rôle de « connecteurs géométriques » joué par certains habitats et parcellaires. Le travail se prolonge par une réflexion sur la genèse et la dynamique des formes permettant de se demander en quoi cette élaboration de type écogéographique intéresse l'historien et l'archéologue.
  • Association de formes et de dynamiques dans le bassin-versant de l'Aubrière (Indre-et-Loire) - Caroline Pinoteau, Francesca Di Pietro p. 263-284 accès libre avec résumé
    Dans le contexte d'une archéogéographie émergente sont ici présentés les résultats d'une démarche exploratoire de croisement de la morphologie paysagère avec l'écologie du paysage. L'étude des éléments structurants du paysage a été réalisée sur l'actuel site de l'Aubrière sur lequel ont été testées les notions de corridor et de bassin-versant. L'articulation des approches des deux disciplines s'avère possible par l'identification d'une organisation paysagère spécifique : un réseau fluvio-végétalo-parcellaire constitué de corridors morphologiques émergents dans lesquels s'insèrent les principaux habitats biologiques. Ce réseau induit le réseau viaire et des formes parcellaires ponctuelles. La spatialisation des fonctions agricoles du site montre que ce réseau est prégnant encore aujourd'hui car il accueille prairies et exploitations laitières.
  • Perceptions et représentations de l'espace à travers les analyses archéobotaniques - Claire Delhon, Fanny Moutarde, Margareta Tengberg, Stéphanie Thiébault p. 285-294 accès libre avec résumé
    Cette contribution montre à travers quatre exemples comment une liste floristique obtenue par l'identification de macrorestes peut être interprétée en termes de lieux d'exploitation et de modes de gestion, suivant que l'on a affaire à des sites archéologiques en grotte, en plein air, ou à des séquences naturelles. Dans les premier et dernier cas, une vision verticale de l'espace prévaut (étagement des formations végétales des plus hygrophiles dans la vallée vers les plus montagnardes sur les hauteurs), alors que dans le cas de sites de plein air on opte pour une représentation concentrique des zones d'approvisionnement. Les groupements végétaux sont ainsi replacés dans l'espace physique en fonction non seulement de leurs exigences écologiques, mais aussi de schémas mentaux préétablis. Cette représentation reste toutefois biaisée par notre méconnaissance des systèmes socioculturels régissant la récolte des végétaux (gestion des ressources, partages, tabous, territorialité...).
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