Contenu du sommaire : Palestine
Revue | Etudes rurales |
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Numéro | no 173-174, 2005 |
Titre du numéro | Palestine |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Après Gaza ? : Introduction - Bernard Botiveau, Édouard Conte p. 11-38
- Saisir l'initiative, retrouver sa voix : L'intifâda d'al-Aqsâ ou la révolte des marginalisés - Roger Heacock p. 39-66 L'histoire palestinienne, plus que d'autres, est en général présentée sous une forme éminemment politique où domine la dichotomie ami/ennemi. Cette perspective néglige les multiples mutations sociales qui ont marqué l'émergence de la Palestine moderne. Elle occulte en particulier la place et le rôle déterminants des secteurs marginalisés (réfugiés, villageois, journaliers) de la société. Inspiré par les travaux d'historiens du Subaltern Studies Group, cet article propose une relecture de l'histoire contemporaine de la Palestine. Il met en avant l'analyse des relations entre le peuple, l'occupant et l'Autorité palestinienne et tente ainsi de rendre aux marginalisés la voix dont ils ont été privés durant l'intifâda d'al-Aqsâ.
- Effacer la Palestine pour construire Israël : Transformation du paysage et enracinement des identités nationales - Christine Pirinoli p. 67-85 La construction d'un État requiert la nationalisation du territoire. Dans le cas d'Israël, cette appropriation territoriale s'est caractérisée, depuis 1948, par un remodelage du paysage afin que ce dernier dénote l'identité et la mémoire sionistes tout en excluant l'identité et la mémoire palestiniennes. À travers un parcours historique, cet article examine la façon dont ce processus a éliminé tout ce qui, dans l'espace, exprimait la relation palestinienne à la terre. Parmi les stratégies utilisées, l'arbre revêt une importance particulière pour signifier l'identité enracinée dans le territoire : arracher l'une pour mieux (ré)implanter l'autre, tel semble être l'enjeu de nombreuses politiques, passées et présentes.
- Gestion des espaces et contrôle politique : Israël au coeur du processus décisionnel local (1993-2000) - Aude Signoles p. 87 L'étude de l'aménagement des espaces urbains palestiniens entreprise ici montre en quoi la réorganisation territoriale issue des accords d'Oslo n'a, en rien, supprimé le poids, largement dominant, d'Israël dans la gestion des affaires locales, qui prévalait durant l'occupation des Territoires. L'État hébreu demeure toujours un acteur majeur, sinon inévitable, pour toute prise de décision concernant le quotidien des habitants (qu'il s'agisse d'obtenir une autorisation pour construire son domicile, ériger une école ou creuser un puits). Les modalités de la domination ont toutefois changé : le contrôle israélien n'est plus assuré principalement par les armes ; il s'effectue par l'intermédiaire d'un « centre » politique en construction (l'Autorité palestinienne) et de son administration.
- Le mur : Analyse d'une décision de la Cour internationale de justice - Claudie Barrat p. 109-126 En juin 2002, l'armée israélienne débute la construction d'un mur en Cisjordanie et autour de Jérusalem. Le 9 juillet 2004, la Cour internationale de justice, l'organe judiciaire principal des Nations unies, rend un avis sur la légalité de sa construction. Cet article étudie le régime juridique du mur et ses conséquences pour les Palestiniens. Il analyse les principaux arguments juridiques israéliens et palestiniens ainsi que les conclusions de la Cour. Celle-ci, en particulier, apporte des réponses importantes sur les questions que soulèvent le statut des Territoires palestiniens, le droit international applicable à ces Territoires et le droit des Palestiniens à l'autodétermination. L'auteur se penche sur les développements internationaux, notamment sur la décision de la Cour suprême israélienne relative à la légalité des ordonnances portant sur la construction du mur, et tâche de mesurer l'impact de l'avis consultatif.
- L'autre mur : Mariages bannis et citoyennetés fragmentées en Israël-Palestine - Édouard Conte p. 127-152 Par la loi du 31 juillet 2003, la Knesset interdit aux Palestinien(ne)s des Territoires occupés (hormis Jérusalem-Est) qui épousent un(e) Israélien(ne) ou un(e) résident(e) permanent(e) d'Israël d'élire domicile dans cet État (ou à Jérusalem-Est). D'abord présenté comme une mesure de sécurité, ce statut cherche en réalité à réduire le nombre d'Arabes présents en Israël au titre du regroupement familial. Il est censé parer ainsi aux conséquences démographiques à long terme que poserait le maintien d'un tissu étroit de liens matrimoniaux entre Palestiniens de tous lieux, sociologiquement centré sur l'État juif. Dans cette perspective, la nouvelle loi constitue une mesure d'accompagnement clé de la construction du mur de séparation. Face à l'impossibilité d'interdire tout court le mariage entre Palestiniens domiciliés de part et d'autre de ce rempart, les autorités tentent de régler par la restriction du droit d'établissement le « cas » de personnes optant malgré tout pour le mariage « ultra-muros ». Si cette loi temporaire est transformée en statut permanent, comme cela est probable, elle minera toute prétention d'égalité devant la loi en matière de citoyenneté.
- Les paradoxes du mariage précoce à Gaza - Nahda Shehada p. 153-181 À Gaza, 42 % des femmes se marient avant 18 ans. Par ailleurs, cette province, où la moitié de la population a moins de 15 ans, affiche un taux de fertilité parmi les plus élevés au monde. La pratique toujours plus fréquente mais inexpliquée du mariage précoce peut apparaître comme une stratégie permettant d'échapper aux dures conditions de vie sous l'occupation et le soulèvement. Elle peut également être attribuée au fait que ce type de mariage améliore la qualité de vie plus que ne le ferait une formation avancée. Si les filles sont, plus que les garçons, susceptibles de se marier tôt quand elles sont exclues de l'enseignement secondaire, c'est lorsqu'ils travaillent comme manoeuvres en Israël que les fils tendent à se marier très jeunes. Cette pratique matrimoniale complexe est ainsi conditionnée par toute une série de variables telles que les circonstances politiques, la résidence, le statut de réfugié, l'accès à l'éducation et au marché du travail. Toutefois, à ces facteurs - objectifs - se mêlent les expériences personnelles, les émotions, les métaphores politiques et les prétentions morales, toutes choses que cette contribution tente d'éclaircir sur fond d'intifâda.
- Alliances et exclusions au Liban : Les mariages libano-palestiniens - Daniel Meier p. 183-199 L'auteur étudie les effets sociaux et identitaires des unions matrimoniales libano-palestiniennes dans l'après-guerre civile du Liban. Il suppose que l'on peut voir dans ces mariages des formes spécifiques d'intégration des Palestiniens, lesquels se heurtent à une exclusion économique et juridique qui vient s'ajouter à une auto-exclusion de leur propre groupe d'origine. L'article s'intéresse au cadre général des relations sociales et matrimoniales au Liban, y compris au poids de la communauté sur les statuts personnels. Il dégage des profils d'acteurs de ces unions mixtes entre Palestiniens et Libanais.
- Surmonter l'intifâda d'al-Aqsâ : Entraide sociale et clientélisme en Palestine - Majdi Al-Malki p. 201-217 À partir d'études de terrain conduites en 2003 dans plusieurs localités de Cisjordanie et de Gaza, ce travail s'intéresse à la relation qui lie la population palestinienne à l'un des aspects caractéristiques du système politique : le néo-clientélisme. Dans le contexte de la seconde intifâda, incapables d'apporter aide et protection aux citoyens, les institutions nationales exacerbent le sentiment de frustration de ces derniers. Aussi la mise en place d'institutions au niveau national, la lutte contre la corruption et la participation au processus démocratique sont-elles, aux yeux du public, autant de causes vides de sens. De vastes couches de la société palestinienne tentent donc de s'assurer un minimum vital en faisant appel aux réseaux de solidarité clientélistes présents à l'échelle locale.
- Pouvoir local et droit à la résidence : L'exemple de la maison de l'Orient à Jérusalem - May Maalouf Monneau p. 219-234 La Maison de l'Orient a vu le jour au début des années quatre-vingt-dix, lors des premières négociations de paix israélo-palestiniennes. Elle est dirigée par Faysal Husayni, principale figure politique des Territoires occupés. Avec la signature des accords d'Oslo en 1993 et le retour de l'Autorité palestinienne dans les Territoires, la Maison de l'Orient centralise ses activités à Jérusalem. Parallèlement à son pouvoir politique, elle engage un dynamisme social de résistance à l'occupation israélienne de Jérusalem-Est. L'exemple de sa lutte pour la préservation du droit à la résidence des Palestiniens démontre sa capacité à combler le vide politique engendré par les accords d'Oslo.
- Urgence et développement : L'action des ONG pendant la seconde intifâda - Caroline Abu-Sada p. 235-249 L'Autorité palestinienne s'est profondément affaiblie lors de la deuxième intifâda, qui a debuté en septembre 2000. La politique de destruction des structures par l'armée israélienne, le bouclage des Territoires et la construction du mur empêchent l'Autorité de soutenir efficacement la population. C'est pourquoi les ONG palestiniennes ont actuellement un rôle si important à jouer. Affectées par les conditions difficiles, elles ont adopté de nouvelles stratégies. Le PARC (Palestinian Agricultural Relief Committees), une ONG de développement agricole, est un bon exemple de ces changements de stratégie. Il tente d'organiser la population palestinienne tout en étendant son pouvoir et en s'adaptant aux exigences des bailleurs de fonds internationaux.
- Quelques réflexions à propos des processus coercitifs dans les Territoires occupés - Vincent Romani p. 251-272 À partir d'une ethnologie d'universitaires palestiniens des Territoires occupés, cet article se propose de rendre compte de certaines dimensions, peu évoquées, de la violence à l'oeuvre dans cet espace. Nous pensons qu'aux lieux et moments de violence les plus immédiats correspondent des logiques médiates d'expérience de la violence par les acteurs. Cette mise en relation de l'expérience quotidienne des individus avec les dispositifs de contrainte permet de saisir la portée sociale des phénomènes coercitifs en évitant les registres réducteurs de la victimisation, de l'héroïsme ou bien de l'institutionnalisme dépersonnalisé. L'analyse de l'enfermement spatial renvoie ainsi à une logique d'enfermement chronologique, où différentes temporalités - individuelles et collectives, passées et présentes - s'entrechoquent.
- Des accords d'Oslo à la seconde intifâda : l'espace public palestinien en question - Bernard Botiveau p. 273-293 À un moment où la société palestinienne doit faire face à une désorganisation de ses institutions et à une perte de ses repères, après plusieurs années de soulèvement contre l'occupation de son territoire, quelles peuvent être les chances d'une expression politique plurielle au sein de cette société ? Cet article examine comment la notion d'espace public a été utilisée pour étudier les sociétés arabes contemporaines et comment elle permet de saisir les mutations récentes de la vie politique en Palestine. Considéré dans sa dimension spatiale (les lieux publics) et temporelle (les moments privilégiés comme les élections), l'espace public se caractérise aussi par un ensemble discursif dans lequel s'inscrivent les acteurs pour mettre en jeu les valeurs centrales de la société. Les exemples développés ici portent en particulier sur les statuts personnels, la participation des femmes au débat politique, la question de la corruption et les comportements électoraux.
- Une année d'exception pour l'archéogéographie - Gérard Chouquer p. 295-324