Contenu du sommaire : Filières de produits tropicaux

Revue Les Cahiers d'Outre-Mer Mir@bel
Numéro no 2120, octobre-décembre 2002
Titre du numéro Filières de produits tropicaux
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Filières agricoles des produits tropicaux - Bernard Charlery de la Masselière p. 1 accès libre
  • Le commerce international de la banane : marché, filière, système - Jean-Claude Maillard p. 2 accès libre avec résumé
    Marché, filière, système, ces trois points de vue nous semblent de nature à rendre un compte exact des réalités géographiques, techniques, économiques et humaines du commerce quel que soit le produit concerné, même si l'on a en général tendance à privilégier le premier d'entre eux parce qu'il est sans doute le plus aisément accessible à partir d'enquêtes directes auprès des producteurs et consommateurs ou des ressources de l'outil statistique. Or, qu'on le veuille ou non, ce sont en fait les intermédiaires qui font la réalité du marché par leur insertion dans une filière commerciale plus ou moins longue et rigide, et leur participation à un système d'échanges qui s'affine peu à peu. L'objet de cette communication est de propo- ser ici quelques clés de lecture à partir d'un cas concret, le marché bananier, sans doute modeste, mais dont la forte cohérence rend mieux sensible l'interrelation de ses composants et permet de parvenir en conséquence à une modélisation acceptable.
  • La conquête de la caféiculture par les petites exploitations agricoles dans le district de Xuan Loc, province de Dong Nai, Vietnam - p. 3 accès libre avec résumé
    Depuis 1986, la politique d'ouverture et le mouvement de décollectivisation au Vietnam ont permis un développement des cultures d'exportation, le café figurant parmi les plus appréciées. A côté des grandes plantations et fermes d'Etat, les petites exploitations caféières illustrent une nouvelle stratégie des familles rurales. Le caféier s'est vite étendu au delà de son territoire traditionel qui est Dak Lak et Lam Dong pour occuper les nouveaux espaces de la moyenne région de Dong Nai dont Xuan Loc fait partie. Xuan Loc est classé premier en superficie de caféiculture dans le Dong Nai. Cette nouvelle culture (la caféiculture) s'est implantée à Xuan Loc grâce à des facteurs favorables : conditions naturelles favorables (terres basaltiques, ressources en eau), politique d'encouragement au défrichement et aux cultures d'exportation, dynamique des exploitants, potentiel du marché. En fonction de leur disponibilité, les exploitants ont différentes stratégies : exploitants à part entière, exploitants à temps partiel, propriétaires citadins absentéistes, exploitants sans terre travaillant pour le compte des propriétaires absentéistes. Bien que le rendement soit plus faible que dans le Dak Lak, entre 2 et 2,5 tonnes / ha, le café reste une culture qui rapporte un revenu croissant aux familles. Plusieurs d'entre elles ont utilisé les revenus générés par le café pour investir dans les études universitaires de leurs enfants. Les exploitants ont aussi participé au développement communautaire, la construction de l'infrastructure et des routes en particulier. Cependant, les exploitants ont besoin d'aide et d'information pour faire face aux fluctuations du marché du café.
  • Une filière peut en développer une autre : commercialisation des légumes et plantations de théiers dans les Nilgiri (Inde du Sud) - Jean-Marc Quitte p. 4 accès libre avec résumé
    Cette intervention examine une interaction dans la filière des légumes européens et de la filière du thé dans des montagnes du sud de l'Inde, les Nilgiri, cette interaction qui passe par un représentant villageois d'un groupe de producteurs de légumes auprès des courtiers-marchands de la plaine. Le nombre relativement important de courtiers-marchands sur le marché de Mettupalaiyam leur impose une stratégie visant à s'assurer des arrivages réguliers de légumes dans leur entrepôt de la plaine. Dans la majorité des cas, les marchands s'assurent ces arrivages en accordant des avances en numéraire sur la production des légumes qu'ils commercialiseront. Ils limitent ainsi directement le fonctionnement de la coopérative marchande régionale. Par conséquent, la majorité des producteurs des montagnes préfèrent commercialiser leurs produits dans les agences privées. Le rôle du représentant villageois prend alors toute son importance. Il s'agit en effet pour ce dernier de préserver la liberté des producteurs qu'il représente, en matière de gestion des avances faites par les marchands. Cela passe bien évidemment par le maintien des relations économiques et sociales avec le courtier marchand, qui n'accorde les avances qu'en fonction de ses résultats commerciaux. Or, la distance spatiale qui sépare les lieux de production du centre de commercialisation favorise la liberté d'action des acteurs de la filière maraîchère. Dans ce contexte, les petits producteurs des Nilgiri ont profité de la montée des cours du thé pour se lancer, grâce aux aides du gouvernement et surtout aux avances en numéraire des courtiers-marchands de la filière des légumes, dans la plantation de théiers. Mais le contexte institutionnel de la filière du thé, qui passe par les fabriques de thé implantées sur les terroirs villageois, a entraîné de nouvelles pratiques de l'espace agricole. Ainsi, une nouvelle organisation des espaces agricoles et des communautés villageoises s'impose aux petits producteurs de la région. Nous sommes alors amené à nous interroger sur les répercussions que ces changements risquent d'entraîner, à la fois dans les relations marchandes au niveau de la commercialisation des légumes, mais aussi, sur l'organisation générale des activités agricoles de la communauté des petits producteurs Badaga que nous étudierons plus parti- culièrement.
  • Filière coton, émergence des organisations de producteurs et transformations territoriales au Mali et au Burkina Faso - Alain Bonnassieux p. 5 accès libre avec résumé
    Au Mali et au Burkina Faso, le rôle des organisations paysannes s'est accru dans les aires cotonnières pendant la dernière décennie. Des groupements et associations créés à l'origine sur une base villageoise se sont restructurés pour constituer de puissantes organisations fédératives qui participent à la gestion des filières coton. Cette évolution est en partie liée à l'évolution des politiques publiques. Elles ont contribué à la réduction de la place de l'Etat dans le développement avec la mise en ?uvre de programmes d'ajustement structurel. Mais les dynamiques sociales au niveau local ont exercé aussi une influence importante sur ces mutations. Ainsi l'émergence d'organisations au niveau régional et national est due à l'affirmation d'un mouvement paysan au Mali et d'une élite paysanne fortement intégrée au marché au Burkina Faso. Cette expansion traduit la volonté de beucoup de paysans d'être associés aux politiques de développement rural. L'arrivée sur le devant de la scène du développement de nouveaux acteurs pose le problème de la place de l'Etat et des institutions de la coopération internationale. L'analyse des évolutions montre qu'il faut s'interroger sur la portée du retrait des acteurs institutionnels dans la définition et la mise en ?uvre des politiques de développement. L'autonomie des principales organisations fédératives est souvent réduite et leurs bases sont fragiles. L'appui des bailleurs de fonds et l'intérêt que leur porte l'Etat s'avèrent souvent déterminants pour les consolider. Le processus d'expansion des organisations paysannes s'inscrit dans un contexte d'incertitude marqué par la fluctuation des cours du coton, la baisse de la fertilité des sols et l'indétermination des stratégies d'une bonne partie des producteurs.
  • Les producteurs de coton face à la libéralisation de la filière : le cas Centre-Afrique - Mohamed Gafsi, Emmanuel Mbetid-Bessane p. 6 accès libre avec résumé
    En Afrique francophone, la culture du coton rencontre un succès inégal. Les filières coton africaines connaissent, sous l'effet conjugué des crises successives du marché mondial et de leurs modèles et pratiques de gestion, des difficultés financières énormes. Cette situation de crise a conduit, depuis la seconde moitié des années 1980, à un processus de restructuration de ces filières pour rétablir les équilibres financiers, avec comme corollaire le désengagement de l'Etat. Ce processus de restructuration a fait l'objet d'un débat intense entre la coopération française, qui défend la logique de filière intégrée, et la Banque mondiale, qui soutient la libéralisation complète. Aujourd'hui, la libéralisation complète des filières coton africaines semble être inéluctable. Quelles sont leurs marges de man?uvre et les stratégies dans ce contexte ? La question est abordée ici avec le cas de Centrafrique. L'objectif est d'apprécier les stratégies des agriculteurs et leurs perspectives d'évolution en cas de privatisation de la filière coton. Cela favorisera l'efficacité de l'accompagnement de ces producteurs dans le processus d'adaptation. L'analyse de l'évolution du processus de libéralisation de la filière coton centrafricaine et des travaux de terrain auprès des producteurs de coton, ont permis l'identification des stratégies adoptées par ces producteurs. Les résultats montrent que, dans ce contexte d'incertitude, les agriculteurs cherchent à se protéger des risques du marché, en développant des stratégies permettant d'assurer la stabilisation qui était assurée jusque là par l'Etat et les mécanismes de filière intégrée. Il s'avère que cette stratégie a un coût social très élevé et nécessite un certain nombre de conditions techniques et socio-économiques.
  • Histoire du parc à Néré sur le plateau d'Abomey (Bénin) : De sa conservation pour la production et la commercialisation d'un condiment, l'Afitin - Marie-Laure Gutierrez, Dominique Juhé-Beaulaton p. 7 accès libre avec résumé
    En Afrique occidentale, au Bénin sur le plateau d'Abomey, plusieurs paysages végétaux se distinguent, dominés chacun par des espèces végétales dominantes, à savoir le karité, le néré (Parkia biglobosa Jacqu. Benth.) et le palmier à huile. Actuellement, le plateau d'Abomey se divise en deux zones : au Nord d'Abomey se rencontrent des peuplements dominés par des karités et des nérés, et au Sud de cette ville jusqu'à la dépression de la Lama, des palmiers à huile et des nérés. D'après les documents historiques, l'expansion du palmier à huile dans cette région a entraîné le recul du néré qui a cependant continué à être conservé au cours des défrichements car c'est une espèce utile : ses fruits sont utilisés dans la confection d'un condiment, l'afitin, et toutes les parties de l'arbre, des feuilles aux racines, sont employées dans la pharmacopée. Le condiment préparé est fort apprécié des populations locales qui l'emploient dans la préparation des sauces. Ce produit est commercialisé non seulement sur les marchés locaux, mais aussi dans les grands centres urbains et même à l'étranger. Notre objectif est de présenter l'état actuel de ce parc à néré en partant de l'analyse des sources historiques et d'étudier l'organisation de la filière commerciale du condiment préparé à partir du fruit. Cette approche abordera la notion de territoire, définie en se posant notamment la question de la territorialisation d'une production. Enfin, la consommation de la préparation alimentaire obtenue à partir de ces fruits semble représenter pour les Fon du Sud Bénin une forte valeur identitaire. Cette étude ouvre aussi des perspectives de recherches et devra être approfondie par des études spécifiques en économie (organisation de la filière de commercialisation, réseaux, conditionnement?) et en agroforesterie (état du parc, protection de l'espèce).
  • Enjeux et contraintes du développement de la filière huile de palme au Bénin : une approche par les systèmes agro-alimentaires localisés - Stéphane Fournier, José Muchnik, Denis Requier-Desjardins p. 8 accès libre avec résumé
    Un secteur artisanal, constitué d'unités familiales de petite taille, assure les 4/5es de la production d'huile de palme au Bénin. Ce secteur a depuis toujours pu s'adapter aux évolutions survenues dans la filière (variations des quantités de matière première offertes par les planteurs ; jusqu'à diversification de la demande), et couvrir l'essentiel du marché local. Nous montrons que cette capacité d'adaptation repose sur un dispositif organisationnel flexible, capable de fournir à ces petites unités main-d'?uvre, crédit ou facilités de commercialisation en cas de besoin. Ces organisations, qui demandent une certaine confiance entre les membres, se constituent sur la base d'une proximité territoriale. Cette adaptation est également passée par des processus d'innovation. Ces processus sont différenciés au niveau spatial : des régions se spécialisent dans l'huile « de qualité », tandis que d'autres produisent en masse une huile « standard ». Nos analyses de ces différents procédés montrent des performances techniques très différentes, et les incitations à produire de l'huile « de qualité » ne peuvent pas être seulement marchandes. Ces processus d'innovation doivent alors être vus comme résultant des interactions au sein de systèmes territoriaux, impliquant productrices et consommateurs. Il s'ensuit que le développement de la filière ne s'explique qu'en prenant en compte ses interactions avec certains territoires. Pour conceptualiser ces interactions, une approche en termes de système agroalimentaire localisé est pertinente. Par une telle approche, les forces et faiblesses des systèmes locaux apparaissent, ainsi qu'un certain nombre d'actions collectives à mener. Le secteur artisanal est en effet menacé par les ateliers semi-mécanisés. Si les planteurs investissent dans ces ateliers, ils vendront de moins en moins de fruits aux artisanes. Celles-ci n'ayant pas la possibilité de posséder leur propre plantation, une partie d'entre elles pourrait être exclue du secteur. Cette évolution « naturelle » est problématique dans le sens où l'activité d'extraction d'huile de palme fournit actuellement une part de leurs revenus à bon nombre de femmes rurales du Sud-Bénin. Il importe donc de valoriser les ressources spécifiques des Syal, qui se situent au niveau des savoir-faire. Le renforcement de l'identité des produits, par une amélioration des réseaux de commercialisation, semble donc souhaitable. Une baisse des coûts de production est également réalisable par l'introduction d'une mécanisation partielle. Mais ces deux actions demandent une structuration des filières artisanales par des organisations socioprofessionnelles. L'émergence de ces dispositifs institutionnels pourrait être soutenue par les pouvoirs publics.