Contenu du sommaire : Le corps du libéralisme - 2

Revue Raisons Politiques Mir@bel
Numéro no 12, décembre 2003
Titre du numéro Le corps du libéralisme - 2
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Dossier

    • Une défense de l'avortement - Judith Jarvis Thomson p. 3-24 accès libre avec résumé
      Une bonne part de l'opposition à l'avortement se fonde sur la prémisse suivant laquelle le foetus est un être humain dès l'instant de sa conception. A partir de là, les adversaires de l'avortement raisonnent de la façon suivante : toute personne a droit à la vie, et donc le foetus a droit à la vie. Sans doute la mère a-t-elle le droit de décider ce qui doit advenir de et dans son propre corps, mais le droit à la vie d'une personne est certainement plus fort et plus urgent que le droit de la mère à décider ce qui doit advenir de et dans son corps, et il l'emporte donc sur ce dernier droit. Ainsi le foetus ne peut être tué et nul avortement ne peut être pratiqué. « Une défense de l'avortement » montre en quoi ces prémisses supplémentaires sont toutes problématiques et pourquoi la conclusion des adversaires de l'avortement ne peut procéder du seul fait que le foetus est une personne.
    • Trente ans après - Laurence Thomas p. 25-30 accès libre
    • Liberté de procréation et manipulation génétique. Pour une critique d'Habermas - Speranta Dumitru p. 31-54 accès libre avec résumé
      Cet article prend position contre l'idée, récemment élaborée par J. Habermas, d'un droit à un héritage génétique non modifié. Deux thèses semblent particulièrement problématiques. La première est qu'il y aurait une compréhension universelle de la nature humaine, qui soutiendrait le caractère intouchable du génome. Incompatibles avec une vision moderne, les fondements jadis trouvés dans la nature humaine sont aujourd'hui plus susceptibles d'être saisis dans un équilibre d'une pluralité des valeurs : l'autonomie reproductive, l'intérêt de l'enfant, la justice sociale. La deuxième thèse difficile à défendre concerne la légitimité de l'éventuelle plainte de l'adolescent qui, ayant subi une amélioration génétique, éprouve, de ce seul fait, un sentiment de ne pas être « l'auteur sans partage de sa propre vie ». Toutes choses égales par ailleurs, cette plainte n'est pas valide, à moins que le domaine génétique ne jouisse d'un statut privilégié.
    • Pour X. L'inconvénient d'être né de personne - Marcela Iacub p. 55-76 accès libre avec résumé
      La loi du 8 janvier 1993, qui a fait entrer pour la première fois l'accouchement sous X dans le Code civil, a aussi donné à cette vieille institution des allures surprenantes. Loin de se limiter, comme auparavant, à tenir secrète l'identité de la femme, elle crée une fiction légale d'après laquelle l'accouchement est réputé n'avoir jamais eu lieu. Un bref rappel historique de la maternité secrète permet de rendre compte de l'invention de cette institution troublante, des fonctions qu'elle a remplies dans l'ordre de la filiation et des forces juridiques qui annoncent sa disparition certaine.
    • Louer son ventre - Bertrand Guillarme p. 77-83 accès libre
  • Actualité - Héritages féministes de Foucault

    • « Les femmes » en tant que sujet du féminisme - Judith Butler p. 85-97 accès libre
    • Judith Butler et la fabrique discursive du sexe - Bruno Ambroise p. 99-121 accès libre avec résumé
      Reprenant à son compte l'idée de la performativité introduite par J. L. Austin dans sa philosophie du langage, J. Butler propose une conception ultra-constructiviste de la sexualité humaine en renversant le rapport de dépendance genre/sexe. Elle va contester que la division sexuelle soit biologiquement fondée et montrer que celle-ci n'est jamais qu'une construction performative : elle ne serait alors que la conséquence d'un discours normatif qui réalise la sexualité en prétendant la décrire. Ce texte entend montrer que si certains énoncés peuvent bien être performatifs et faire ce qu'ils disent, cela nécessite qu'un certain nombre de conditions soient remplies que J. Butler tend le plus souvent à oublier et qui empêchent qu'on puisse jamais considérer que la performativité ait une efficacité sur la réalité biologique, même si elle peut certainement réaliser la définition sociale des identités sexuelles.
    • Le professeur de parodie - Martha Nussbaum p. 124-147 accès libre avec résumé
      La principale idée de Judith Butler, qu'elle partage avec beaucoup de féministes, est que le genre est un artifice social. Mais elle se sépare des féministes constructivistes antérieures, qui s'appuyaient toutes sur des idées telles que le refus de la hiérarchie, l'égalité, la dignité, l'autonomie, ou le traitement de la personne comme une fin pour guider l'action politique concrète. Elle est encore moins disposée à élaborer une notion normative positive : comme Michel Foucault, elle est catégoriquement opposée à des concepts normatifs comme la dignité humaine, ou le traitement de l'humanité comme une fin, au motif qu'ils sont intrinsèquement despotiques. Comme nous érotisons les structures de pouvoir qui nous oppriment, et que nous ne pouvons donc trouver le plaisir sexuel qu'à l'intérieur de leurs frontières, il nous faut abandonner l'espoir d'un changement durable d'ordre matériel ou institutionnel, et nous tourner vers la seule option qui nous reste : la subversion parodique.
  • Varia

    • Les intellectuels italiens et la politisation de leur peuple (de l'Unité aux années 1930) - Jean-Yves Frétigné p. 149-168 accès libre avec résumé
      Dans l'Italie du dernier tiers du 19e siècle aux années 1930, nombre d'intellectuels de renom élaborent des conceptions hostiles à l'idée de la politisation du peuple. Le peuple italien, qu'il soit appréhendé comme majorité inorganisée, comme foule potentiellement dangereuse ou comme masse à mobiliser doit être étroitement soumis à la classe politique minoritaire, aux élites culturelles, à un leader. Cette lecture est à ce point influente que les intellectuels socialistes et communistes, favorables à la politisation du peuple, doivent affronter ces doctrines élitistes pour mieux s'efforcer de les dépasser.
  • Lectures critiques