Contenu du sommaire : Frontière des hommes, frontière des plantes cultivées : diffusions et recompositions de l'agro-biodiversité
Revue | Les Cahiers d'Outre-Mer |
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Numéro | no 266, avril-juin 2014 |
Titre du numéro | Frontière des hommes, frontière des plantes cultivées : diffusions et recompositions de l'agro-biodiversité |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Introduction - Christine Raimond, Thierry Robert, Éric Garine p. 119-126
- Des rituels au service de la conservation de l'agro-biodiversité (Nord du Cameroun) - Christian Seignobos p. 127-140 Un grand nombre de sorghos sont ou ont été la propriété de groupes particuliers, jumeaux ou de cercles d'individus ayant commis des faits de bravoure. Plus souvent il s'agissait de sorghos liturgiques attachés à certains cultes ou à leurs desservants ou encore des sorghos de chefferie. Dans les monts Mandara, ces sorghos sont révélateurs d'un contrôle des semences et de leur circulation à partir de grands centres rituels et de leurs relais.Many sorghum landraces are, or have been, thought as belonging to specified groups or individual statuses such as twins or brave men. Most of the time, it used to be landraces identified to specific rituals and ritual servants or specific to chiefdoms. In the Mandara mountains, seeds of these ritually marked sorghum were controlled and their movements followed the paths between important religious centers.
- Histoire d'une innovation agricole récente à l'échelle régionale : quelle différenciation des sorghos repiqués dans le bassin du lac Tchad ? - Abdoul-Aziz Saïdou, Christine Raimond, Clélia Soler, Tuong-Vi Cao Hamadou, Richard Kenga, Laure Benoit, Jean Wencelius, Oberline Fokou, Camille Chauvin, Souaybou Ekeke, Hélène I. Joly p. 141-168 Le sorgho repiqué a fait l'objet d'une large diffusion dans le bassin du lac Tchad au XXe siècle. Cette culture présente une forte diversité variétale. Les nomenclatures paysannes suggèrent des groupes géographiquement distincts, subdivisés en variétés locales selon des critères qui peuvent varier en fonction des sociétés. À partir d'une taxonomie simplifiée en langue véhiculaire (fulfulde) et de la structure des diversités agro-morphologique et génétique du sorgho repiqué, nous montrons que la variation repose moins sur la définition de catégories taxonomiques intermédiaires (groupes variétaux) que sur celle, plus fine, de taxons terminaux en langues locales (types nommés). Cela est expliqué à l'échelle locale par les pratiques de sélection et de gestion variétale des agriculteurs. La proximité génétique des sorghos repiqués avec certaines populations de sorgho pluvial apporte de nouveaux éléments soutenant les hypothèses sur l'histoire évolutive des sorghos repiqués. L'association du sorgho repiqué à plusieurs clusters génétiques et plusieurs haplotypes chloroplastiques, la circulation régionale relativement récente ainsi que le statut de vivrier marchand du sorgho repiqué ne permettent pas de tracer des frontières géographiques ou culturelles dans la répartition actuelle du sorgho repiqué.A large expansion of dry season sorghum (transplanted sorghum) was noticed in the Lake Chad basin over the last century. A high level of landraces diversity is associated to this crop. We could identify geographical groups of dry season sorghum according to farmers' nomenclatures; these groups are subdivided into local landraces according to criteria specific to each rural society. Following an ad hoc taxonomy and according to the structure of the agro-morphological variation and genetic diversity of dry season sorghum, we showed that diversity is mainly structured according to the terminal level of the taxonomy (landrace or cultivar). We explained this pattern as the effect of local practices of seed and field management by farmers. Dry season sorghum populations are genetically close to some populations of rainy sorghum; this supports the known hypotheses of dry season sorghum evolutive history. Dry season sorghum belongs to more than a single genetic cluster and exhibited many chloroplastic haplotypes; this is congruent with recent movement of seeds at the regional level and the use of dry season sorghum for both house consumption and markets. This does not allow for the delimitation of geographical and/or cultural boundaries for the use of given landraces of this crop.
- Les influences de l'urbanisation sur la répartition régionale des plantes cultivées au Tchad et au Nord-Cameroun - Dieudonné Bouba, Goltob Mbaye Ngaressem, Robert Madjigoto, Christine Raimond p. 169-194 L'urbanisation observée en Afrique depuis les Indépendances se caractérise par une augmentation et une diversification ethnoculturelle de la population des villes. Contrairement aux idées reçues dénonçant la tendance à une forte consommation de produits importés (riz, blé, pâtes alimentaires), les citadins restent au Tchad et dans le Nord-Cameroun encore très conservateurs pour leur nourriture de base. Aussi leur régime alimentaire reste-t-il très proche de celui des ruraux et, en conséquence, requiert des produits vivriers qui sont cultivés « au village ». La réponse à cette demande urbaine diversifiée constitue un facteur de dynamisation et d'innovation agricoles en milieu rural. On observe la création de filières sur une grande diversité de produits, y compris sur des plantes anciennes qui font la spécialité de certains terroirs (pois de terre, anciens tubercules par exemple). Intermédiaires majeurs entre la campagne et la ville. Les commerçants ont un rôle majeur dans l'évolution et le maintien de cette diversité spécifique et infra-spécifique sur les marchés et dans les champs.Urbanization observed in Africa since independence is characterized by an increase in the number and ethno-cultural diversification of the urban population. Contrary to the ideas gotten denouncing this trend in favour of high consumption of imported products (rice, wheat, canned food), urban dwellers in Chad and in the north of Cameroon, are still very much attached to their staples. In addition, their feeding habits are still very close to those of rural dwellers, and as such, their food supply is based on what is cultivated in the villages. The answer to this diversified urban demand constitutes a factor of agricultural dynamic and innovation in the rural area and we find the creation of several subsectors including traditional crops that accounts for the specificity of some areas (bambara goundnut, old tubercule for example). The main intermediaries between the rural and urban milieu, the role of traders in the evolution and the maintenance of this specific and infra-specific diversity on the market and the farms are cleared brought out.
- Migrations des agriculteurs et de leurs plantes : une recomposition de l'agro-biodiversité à l'échelle régionale - Christine Raimond, Hecheked Boukar, Dieudonné Bouba, Simon Boubakary, Flora Pennec p. 195-224 La progression des fronts pionniers soudaniens génère le déplacement de personnes provenant de régions et de sociétés variées, venues s'installer sur de nouvelles terres dans l'espoir de produire pour leur famille mais aussi pour le marché. Dans ces communautés de migrants récents, nous mettons en évidence trois origines différentes des semences : celles de la région d'origine, celles obtenues dans la région d'installation via les autochtones et les marchés, et celles provenant de l'encadrement agricole. Loin de s'exclure mutuellement, ces plantes se cumulent pour aboutir à la composition d'un cortège de plantes cultivées très diversifié, parfois plus étendu que dans des agrosystèmes autochtones enclavés. L'approvisionnement en semences dépend de différents réseaux d'échanges où le marché joue un rôle primordial, ainsi que les retours réguliers des migrants dans leur région d'origine. Par ces voyages, ils facilitent la diffusion de plantes entre des régions bioclimatiques très différentes et entre des sociétés qui par ailleurs échangent très peu. Ce type de diffusion des plantes cultivées est essentiel pour comprendre les dynamiques de la période contemporaine… mais n'a-t-il pas joué un rôle à des périodes plus anciennes ?The progress of soudanian pioneers fronts generates migrations from diverse regions and societies, and settle down on new lands to produce for their family and also for the market. In these communities of recent migrants, we highlight three different origins from seeds: those of the native region, those obtained in the region of installation via the autochtones and the markets, and those coming from the agricultural management. Far from being mutually excluded, these plants accrue to obtain very diversified panels of cultivated plants, sometimes more important than some enclosed autochtonous agrosystem. Seed supply depends on various networks of exchanges where market plays an essential role, as well as the regular returns of the migrants in their native region. By these journeys, they facilitate plant diffusion between very different bioclimatic regions and between societies which besides exchange little. This type of cultivated plant diffusion is essential to understand the dynamics of the contemporary period… but did-it not play the same role in older periods?
- Rakoto-Ramiarantsoa Hervé et Blanc-Pamard Chantal, 2014 - Biodiversités en partage. Reconfiguration de ruralités dans le corridor forestier betsileo tanàla (Madagascar). Marseille. IRD, 264 p. - Christian Bouquet p. 225-228