Contenu du sommaire : Varia
Revue | Revue d'économie politique |
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Numéro | volume 125, mai-juin 2015 |
Titre du numéro | Varia |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Débats / Opinions
- Réflexions sur le logement, la hausse des prix de l'immobilier et les inégalités en réponse à l'ouvrage de Thomas Piketty, Le capital au XXIe siècle - Odran Bonnet, Pierre-Henri Bono, Guillaume Chapelle, Etienne Wasmer p. 317-346 Dans son ouvrage, Le capital au XXIe siècle, Thomas Piketty souligne les risques d'une explosion des inégalités de patrimoine, car le capital augmenterait plus vite que le revenu dans plusieurs pays, dont la France. Dans cette note, nous montrons que cette conclusion n'est pas plausible. Elle dépend de la hausse d'une seule des composantes du capital : le capital logement. Le capital dit « productif », hors immobilier, n'a que légèrement augmenté dans les dernières décennies, et sur le long terme, n'est pas en hausse tendancielle. Ensuite, si la valeur du capital immobilier mesurée dans les comptabilités nationales a augmenté sur cette période, c'est en raison de la hausse des prix de l'immobilier, qui ont crû beaucoup plus vite que les loyers et que les revenus depuis 2000. Or, les prix de l'immobilier ne sont pas nécessairement corrélés aux revenus du capital logement. Ce sont au contraire les loyers qui le sont, et donc qui importent pour la dynamique des inégalités : ils représentent à la fois les revenus du capital des propriétaires-bailleurs et les dépenses économisées des propriétaires-occupants. Cela ne signifie pas que les prix de l'immobilier n'ont aucun impact sur les inégalités.Reflections on housing, property price booms and inequality in response to Thomas Piketty's Capital in the XXIst century In his book, Capital in the 21st Century, Thomas Piketty highlights the risk of an explosion of wealth inequality because capital is accumulating faster than income in several countries such as France. Our work challenges the conclusions of the author. First, the author's result depends on the rise of only one of the components of capital, namely housing capital, and due to housing prices. In fact, housing prices have risen faster than rent and income in many countries. It is worth noting that “productive” capital, excluding housing, has only risen weakly relative to income over the last few decades. Over the longer run, the “productive” capital/income ratio has not increased at all. Second, rent, not housing prices, should matter for the dynamics of wealth inequality, because rent represents both the actual income of housing capital for landlords and the dwelling costs saved by “owner-occupiers” (people living in their own houses). This does not mean that housing prices do not contribute to other forms of inequality.
- Réflexions sur le logement, la hausse des prix de l'immobilier et les inégalités en réponse à l'ouvrage de Thomas Piketty, Le capital au XXIe siècle - Odran Bonnet, Pierre-Henri Bono, Guillaume Chapelle, Etienne Wasmer p. 317-346
Bilan / Essai
- Essai sur l'économie de « l'égalitarisme libéral . Une combinaison sélective des travaux de Rawls, Sen et Kolm - Claude Gamel p. 347-392 Dans The Idea of Justice [2009], Sen formule une critique systématique des théories « transcendantales » de la justice, dont l'archétype se trouve dans l'œuvre de Rawls et propose de leur substituer une approche « comparative », plus pragmatique. Dans Macrojustice [2005], Kolm défend une conception du « choix social endogène » qui le conduit, lui aussi, à se démarquer des notions rawlsiennes trop abstraites de « position originelle » et de « voile d'ignorance ». Quant à Rawls lui-même, la formulation philosophique qu'il a pu donner de son second principe de justice (« juste égalité des chances » et « principe de différence ») semble trop floue pour contenir à elle seule des propositions précises de politique économique et sociale. En dépit des profondes différences d'ordre épistémologique sur le sens qu'ils donnent à leur réflexion normative respective, Sen, Kolm et Rawls sont pourtant tous des représentants d'un « égalitarisme libéral », dont l'économie générale reste toutefois à préciser (1) : si la hiérarchie rawlsienne des principes de justice fournit à notre essai son armature générale (2), l'approche des capacités de Sen légitime une conception plus ambitieuse de l'égalité des chances (3) et les transferts redistributifs « ELIE » de Kolm constitue une traduction possible du principe de différence (4). Portée et limites de notre essai font l'objet en conclusion d'un premier examen (5).An essay on economics of “liberal egalitarianism” A selective combination of Rawls's, Sen's and Kolm's works In The Idea of Justice [2009], Sen firmly criticizes “transcendental” theories of justice, the archetype of which is to be found in Rawls' works and he suggests substituting for them a more pragmatic “comparative” approach. In Macrojustice [2005], Kolm defends his conception of an “endogenous social choice”, which induces him to keep at a distance Rawlsian concepts, such as “original position” and “veil of ignorance”, he considers as too abstract. Concerning Rawls himself, he has offered a philosophical formulation of the second principle of justice (“fair equality of opportunity” and “principle of difference”) but that sole formulation remains too vague to contain precise proposals in the field of economic and social policy. In spite of real differences at an epistemological level about the meaning of their own normative ideas, Sen, Kolm and Rawls can be considered as “liberal egalitarians”, but economics of this school of thought is still to be specified (1): The Rawlsian hierarchy between the principles de justice would give our essay its general framework (2), whereas Sen's “capability approach” would legitimize a more ambitious conception of “fair equality of opportunity” (3) and Kolm's distributive “ELIE transfers” would be a suitable application of the “principle of difference” (4). As a conclusion, the scope and limits of our essay are subject to a first examination (5).
- Essai sur l'économie de « l'égalitarisme libéral . Une combinaison sélective des travaux de Rawls, Sen et Kolm - Claude Gamel p. 347-392
Articles
- Les échelles d'équivalence complètes : une estimation intégrant les dimensions monétaire et temporelle des dépenses des ménages - François Gardes, Imen Sayadi, Christophe Starzec p. 393-414 L'appariement statistique d'une enquête de Budgets des Famille et d'une enquête de Budgets-Temps (enquêtes INSEE 2000) permet d'estimer, après valorisation du temps, les dépenses complètes des ménages, qui intègrent leur usage du temps disponible pour une production domestique à leurs dépenses monétaires. Le coût complet des enfants qui s'en déduit par les méthodes classiques d'estimation d'un système de demande s'avère supérieur au seul coût monétaire, ce que l'on observe également dans une moindre mesure pour le coût du second adulte. Les économies d'échelle semblent plus fortes donc dans la dimension temporelle que pour les dépenses monétaires. Le calcul des revenus complets que cet appariement permet d'opérer montre enfin que l'inégalité est moindre dans cette double dimension monétaire et temporelle que pour les seuls revenus monétaires.The full equivalence scales: an estimation integrating the monetary and time dimensions of households' expenditures The statistical match of a Family Budgets survey and Time Use survey (INSEE 2000) makes possible, once evaluated the cost of the time, the estimation of the full expenditure of household integrating the value of the domestic production and the monetary expenditure. The full cost of the child computed using the classic methods of demand systems estimation is higher than the child cost obtained by the monetary approach. To a lesser extent the same result is obtained for the cost of a second adult. The economies of scale seem to be stronger in the time use dimension than for monetary expenditure. Also, the inequality of the full incomes obtained by the matching is lower than those computed on monetary incomes only.
- Optimal and Equilibrium Investment in the Intermittent Generation Technologies - Sébastien Rouillon p. 415-452 Cet article étudie le déploiement des technologies utilisant les énergies renouvelables intermittentes pour produire de l'électricité, sous la concurrence de capacités de génération utilisant les technologies conventionnelles préalablement en place. Plusieurs scénarios sont envisagés s'agissant du pouvoir de marché du secteur historique. Sous l'hypothèse de concurrence pure et parfaite, nous décrivons un système complet de marchés spots et forward, capable de décentraliser un état optimal de l'économie. Lorsqu'on suppose qu'une firme unique gère les capacités conventionnelles préalablement en place, on montre au contraire que l'investissement dans les technologies utilisant les énergies renouvelables intermittentes sera en général inadapté. Si les firmes investissant dans les technologies renouvelables intermittentes viennent concurrencer le monopole historique sur un système complet de marchés spots et forward, on montre que cette frange concurrentielle du marché électrique investira de manière excessive dans les capacités renouvelables, si la part des consommateurs connectés au réseau au moyen d'un compteur intelligent et intervenant sur les marchés spots est importante. Si le monopole historique gère le réseau de transmission et de distribution de l'électricité, de sorte que les firmes de la frange concurrentielle utilisant les technologies renouvelables intermittentes n'ont pas d'autre choix que de lui vendre leur électricité directement, on montre à l'inverse que la frange concurrentielle investira de manière insuffisante dans les capacités renouvelables.The paper analyses the development of the intermittent technologies to generate electricity, given the competition of incumbent generators using the conventional technologies. Various assumptions are considered regarding the market power of the incumbent generators. The paper shows that an optimal investment in the intermittent technologies can be implemented under perfect competition, provided that a complete system of competitive spot and forward markets exists. By constrast, if a single incumbent firm owns the conventional generators and has market power, the paper shows that the investment in the intermittent technologies will in general be inappropriate. If the conventional and the intermittent generators compete on the the spot and forward markets, the competitive fringe will invest too much in the intermittent technologies, if a large fraction of the consumers are on smart meters and intervene on the spot market. However, if the incumbent firm owns the transmission and distribution network, implying that the intermittent generators can only sell their electricity to the incumbent firm, the intermittent generators will not invest enough in the intermittent technologies.
- Information sur l'hétérogénéité de la terre et délégation de la régulation foncière - Jean-Sauveur Ay p. 453-474 Cet article étudie l'effet de l'hétérogénéité de la terre sur les coûts privés et les bénéfices sociaux associés à la régulation d'une externalité environnementale spatialisée. Nous définissons la régulation foncière comme un ciblage de certaines unités de terre pour en retirer le secteur privé et ainsi augmenter la qualité de l'environnement. Les régulations foncières analysées vont se distinguer selon deux critères : l'information disponible au régulateur et la structure de délégation, c'est-à-dire la nature des objectifs qui lui sont fixés (des surfaces à atteindre, un budget disponible ou une obligation de résultat). Il apparaît qu'un ensemble réduit de conditions sur les paramètres de l'hétérogénéité de la terre suffisent pour pouvoir déduire les meilleurs choix de ciblage dans l'espace. En outre, une information partielle sur l'hétérogénéité ne présente pas toujours une valeur positive pour la régulation, et l'efficacité économique associée à l'utilisation d'une information, même partielle, est en général robuste à la structure de délégation.Information about land heterogeneity and delegation of land policy This paper studies the effects of land heterogeneity on the private costs and social benefits associated with the regulation of a spatial externality. Land regulation consists in targeting some land units and remove the private sector from them to increase the quality of the environment. Land regulation is analyzed under two separate criteria: the information available and the delegation structure, i.e., the nature of its objectives (acreages, costs or benefits). It appears that a small number of conditions on the heterogeneity parameters are sufficient to deduct the best regulatory choices. A partial information about land heterogeneity does not always have a positive economic value. The overall efficiency associated with the use of information is in general invariant with the nature of the regulator's objectives.
- Les échelles d'équivalence complètes : une estimation intégrant les dimensions monétaire et temporelle des dépenses des ménages - François Gardes, Imen Sayadi, Christophe Starzec p. 393-414