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Revue | Annales de géographie |
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Numéro | no 648, 2006/2 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Articles
- Le patrimoine foncier du Conservatoire du littoral et le changement climatique : scénarios d'évolution par érosion et submersion - Christine Clus-Auby, Roland Paskoff (†), Fernand Verger p. 115-132 Résumé Une accélération de la vitesse d'élévation du niveau de la mer ainsi qu'un accroissement de la fréquence et de la force des tempêtes sont attendus au cours de ce siècle en liaison avec le réchauffement planétaire. Il pourrait en résulter d'une part une accentuation de l'érosion des plages et des falaises, d'autre part une extension des submersions littorales. Une telle conjoncture ne laisse pas indifférent le Conservatoire du littoral, établissement public de l'État qui a pour mission d'acquérir et de protéger des terrains côtiers. Actuellement, en France métropolitaine, il possède 59 000 ha et l'achat de 116 000 ha supplémentaires d'ici à 2100 a d'ores et déjà été décidé. Aussi a-t-il lancé une étude pour évaluer les effets sur ses terrains de scénarios d'érosion et de submersion à l'horizon 2100. On a pris ici comme hypothèse une élévation de 44 cm du niveau de la mer, valeur présentée comme la plus probable par le Groupe intergouvernemental d'évaluation du climat (GIEC, 2001). Les résultats obtenus sont nécessairement entachés d'incertitudes, aussi ne s'agit-il que de scénarios susceptibles de rendre compte des effets de cette élévation. Ils permettent néanmoins de penser qu'en 2100, le recul des plages et des falaises pourrait avoir fait perdre au Conservatoire 647 ha, soit 1, 2 % de ses biens fonciers actuels et 1 514 ha, soit 1 % de son patrimoine futur. En ce qui concerne la submersion des marais maritimes, 1 350 ha, soit 3 % de ses biens actuels et 3 073 ha, soit 2,6 % de son patrimoine futur pourrait être affectés. Mais, si à ces marais maritimes on ajoute les terrains endigués, la surface potentiellement submersible passe à 5 000 ha, soit 10 % de ses biens fonciers actuels et à 30 000 ha, soit 21 % de son patrimoine futur.Accelerated rate of sea level rise and increased storminess are expected in the next century due to global warming. As a result, beach and cliff erosion as well as coastal lowland flooding will increase. This is of great concern for the Conservatoire du Littoral, a governmental body in charge of acquiring and protecting natural coastal sites. In metropolitan France, the Conservatoire already owns 59 000 hectares, while the purchase of 116 000 more hectares by 2100 has already been decided. It prompts the Conservatoire to launch a research project whose main objective is to evaluate the effects of erosion and to elaborate flooding scenarios on its lands. For this study, we assumed a sea level 44 cm higher than the present, a data seen as the best estimate by the Intergovernmental Panel on Climate Change (IPCC, 2001). Results must be considered in light of possible scenarios. They indicate that beach and cliff erosion on lands already owned by the Conservatoire would produce a 647 hectares loss, which is 1,2 % of the entire land holdings. In addition, if the forthcoming coastal properties are taken into account, the loss would be 1 514 hectares, or 1 % of the entire surface area. As far as salt marshes are concerned, it appears that by 2100, 1 350 hectares, i.e. 3 %, of the present holdings, would be flooded. And, if the future property is added, these figures would be respectively 3 073 hectares and 2,6 %. However, if salt marshes and low-lying reclaimed areas are combined, the surface of potentially submerged areas increases to 5 000 hectares, or 10 % of the present property. The total is more than 30,000 hectares, 21 % of the total property, when future acquisitions are included.
- Les évolutions en France dans la théorie et les pratiques d'une gestion territoriale du risque : l'application au cas des inondations - Catherine Carré p. 133-153 Résumé L'auteur part du constat du caractère incertain et évolutif de la gestion des risques, dans sa théorie et dans sa pratique. Cela est en partie dû à l'aspect très récent d'une véritable gestion des risques, la prise en main de cette gestion par les acteurs territoriaux se combinant difficilement à une action traditionnelle de l'État et des collectivités territoriales de sécurité civile. Les plans de prévention des risques ont été d'abord perçus par les collectivités territoriales comme une tentative de reprise en main centralisatrice de l'État. Actuellement, dans un contexte de retour d'expérience, plusieurs formes d'actions accompagnent et complètent les PPR. Il s'agit de redéfinir les compétences et les moyens entre l'État et les collectivités territoriales, à l'intérieur des collectivités, et entre les acteurs publics et privés. L'enjeu est de permettre l'intégration du risque inondation dans le développement des territoires pour qu'il ne soit plus seulement un frein au développement mais aussi un moteur de projets.The aim of this paper is to reexamine hazard policy in France, which has been perceived as relaying on a strong public doctrine and practice. To the contrary, this paper will show that public hazard policy is at its start and has been deeply changed for the past ten years. The present lack of a real preventive policy is certainly the first explanation. Central and local governments have developed a civil security policy through the last century, based on crisis responses but in a total ignorance of preventive actions and hazard culture applied to a territory. The local and regional communities are in an almost complete lack of civil evacuating plans and public information. Since 1995, the State has decided to limit the urbanization in the river bed and its flooding area. This has been done without any kind of real negotiation with the local authorities, in a climate of mutual suspicion and hostility. Recently, the central government has been promoting different actions to help the local communities in maintaining their development, based on short term and long term actions, in a sustainable perspective.
- Les enjeux géographiques d'un impératif agronomique majeur : le « repos du sol » - Yves Poinsot p. 154-173 Résumé Les pratiques de jachère s'expliquent généralement en géographie par des impératifs de repos d'un sol « épuisé ». Les travaux agronomiques montrent que ce concept recouvre des réalités variables suivant les conditions écologiques. En milieu équatorial, son origine réside dans la crainte des adventices. Sous les tropiques, la restauration de la fertilité, par transferts souvent, apparaît essentielle. Dans les milieux frais des altitudes andines, la prévention des infestations parasitaires devient primordiale. Dans tous les cas, une mobilité spatiale des affectations agricoles en découle dont on analyse certaines modalités. C'est une voie de lutte anti-parasitaire qu'on retrouve dans les campagnes occidentales sans jachère, mais contrecarrée par des impératifs économiques ou réglementaires. Ils imposent aux exploitants un recours massif aux pesticides, interdisant que les rotations dans l'espace, plus « durables » mais moins commodément « administrables », soient plus systématiquement mises en œuvre.In geography, the practices of fallow are generally explained by the necessity of resting an “exhausted” soil. The agronomical works show that this concept covers different realities according to the ecological conditions. In the equatorial environments, it is often linked with the fear of weed plants. In tropical countries, the recovery of fertility, often by transfers, seems essential. In the fresh environment of the Andean highlands, the prevention of parasite infestations becomes paramount. In all the cases, the result is a space mobility of the agricultural appointments whose forms are here analyzed. It is a parasite-destroying way of fight that can be found in the Western countryside without fallow, but thwarted by the economic or prescribed necessities. That's why farmers have to turn to a massive use of pesticides, prohibiting that the turnovers in space, more lasting but less easily administered, to be more systematically implemented.
- Les acteurs économiques et le régionalisme lorrain de la Belle Époque - Annie Sevin p. 174-196 Résumé Ministre du Commerce et de l'Industrie, Étienne Clémentel attache son nom à une première expérience française de régionalisation. En 1917, il initie la création de régions économiques à partir de regroupements de chambres de commerce. La réforme se définit dans l'ordre de l'économie. Elle participe d'un redéploiement des interventions de l'État dans ce domaine. Le découpage régional tend à intégrer les logiques spatiales de l'activité économique. Sa négociation prend en compte les contours dessinés, depuis le début du XXe siècle, par les pratiques des acteurs économiques locaux que l'on apparente alors au mouvement du régionalisme économique. La première région économique mise en place, celle de l'Est, constitue un observatoire privilégié. Les initiatives régionalistes lorraines qui précèdent la réforme ont valeur de modèle. La conduite offensive de la Chambre de commerce de Nancy en témoigne. Les opérations qu'elle engage apportent un éclairage précieux sur la régionalisation de la capitale, Nancy. Leur conception permet de préciser les enjeux et les usages de la dimension régionale, à l'œuvre.In August 1917, Etienne Clémentel, Minister of Commerce and Industry, took the initiative in the first French experience of regionalization. Twenty economic regions were created out of a regional cluster of Chambers of Commerce and Industry. Economy played an important part in the conception of this reform. Clémentel's action shows the reorganization of state intervention in this domain. The regional division aimed at taking spatial logics of economic activity into account. Chambers of Commerce were a part in the negotiation of regional groups. Since the beginning of the 20th century, some of these Chambers have developed strategies of regional unions, and we can see the design of their regionalist initiatives in the outline map of economic regions. The Chamber of Commerce of Nancy, very energetic in this regard, presents a good observatory. The analysis of a few of its initiatives shows an important perspective both to the regionalization of Nancy, and to the genesis of the Eastern economic region, which was the first to be created.
- Les ressources du département et du canton dans la « petite fabrique des territoires » - Frédéric Tesson p. 197-216 Résumé « La petite fabrique des territoires » (M. Vanier, 1995) à l'échelle locale est un processus qui se généralise dans un contexte législatif très favorable. De nouveaux territoires (EPCI, Pays), construits de toutes pièces, viennent se surimposer à ceux déjà existants et leurs acteurs s'appliquent à les construire en légitimité. Dans ce contexte, alors qu'on se questionne sur la nécessité de maintenir les découpages plus anciens (canton et département notamment), il est intéressant de regarder de plus près les ressources dont ces territoires disposent pour garantir leur pérennité. Alors que P. A. Landel (2004) se demande si nous assistons à la fin des fiefs, nous cherchons à montrer ici que ces territoires hérités résistent, portés par l'idéologie territoriale dominante. À partir d'études réalisées dans le grand Sud-Ouest, nous montrons comment le département et le canton continuent de se construire en territoire en se servant des entités supposées les faire disparaître. En cherchant à cumuler les mandats de conseiller général et de président d'EPCI, sur des structures à périmètres quasi identiques, l'élu local se donne les moyens d'agir sur son territoire d'élection et, au final, de construire ses deux territoires de référence : EPCI-canton et département. Véritables prophéties autoréalisatrices (Merton, 1997 [1953]), ces discours marquent, selon nous, la prégnance de l'idéologie territoriale et la difficulté pour l'élu local de penser son rapport à l'espace selon d'autres modalités.In France, the legitimacy of the “department” and the “canton” has been questioned since the day of their creation. They are known as being territorial limits imposed by the central government. They represent the Jacobinism State at its best. Moreover, they are in competition with the territories (intercommunalities (EPCI) and “country”), created and reinforced by the laws promulgated in 1995. However they are recognized by the population. They also represent the territorial model which marks the comportment with space of the “local councilor”. This article shows how the “councilor of department” builds these territories. Speeches of councilors, analyzed like self-fulfilling prophecies, give to the canton and the department an image of immutable territories. We analyze several indicators which show the effectiveness of the work of the “councilor of department” in the construction of these territories. Initially we show the importance of the cantonal model in the delimitation of the “EPCI”. Then, we consider the respect of the departmental and regional limits in the construction of the “EPCI” and the “countries”. To finish, we look at the plurality of functions, which is when the Department councilor is at the same time the President of EPCI, which transforms the territory of election — the canton — into the territory of action —the EPCI. Thus, the Department councilor has the total control of the process of territorial construction and holds the legitimacy which guarantees the performance of its speech.
- Le patrimoine foncier du Conservatoire du littoral et le changement climatique : scénarios d'évolution par érosion et submersion - Christine Clus-Auby, Roland Paskoff (†), Fernand Verger p. 115-132
Comptes rendus
- Comptes rendus - p. 217-224