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Revue | Annales de géographie |
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Numéro | no 650, 2006/4 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- « La rue » dans la ville africaine (Yaoundé, Cameroun et Antananarivo, Madagascar) - Marie Morelle p. 339-360 Ce travail propose d'analyser le phénomène des enfants des rues dans deux villes africaines, Yaoundé (Cameroun) et Antananarivo (Madagascar). L'espace public devient espace de vie pour une minorité. Comment les enfants des rues parviennent-ils à se l'approprier ? Nous cherchons à comprendre comment vivre dans un espace accessible à tous et à saisir le possible point de basculement d'un espace public, neutre, vers des territoires de rue. Il devient nécessaire d'appréhender les éventuels territoires qui s'y créent sous l'angle du pouvoir. Les habitants réagissent contre la présence des enfants dans les rues des centres-villes et dans celles des quartiers, pour maintenir leur pouvoir face à celui des enfants. De même, les enfants heurtent le projet urbain des autorités. Ainsi, tensions et violence participent-elles aux processus de territorialisation urbaine. Choisir l'entrée géographique pour étudier les enfants des rues conduit à une relecture des espaces publics et privés, de la dialectique dedans-dehors et de la neutralité de l'espace public en ville.City Streets in Africa (Yaounde, Cameroon, and Antananarivo, Madagascar) In this paper I propose to analyse the street children phenomenon in two african cities, Yaounde (Cameroon) and Antananarivo (Madagascar). While being a public space, the street has also become the living space of a minority. How can the children live in a space open to everybody ? Do they succeed in appropriating these public places ? Are the streets transformed in territories ? What are the consequences ? To answer those questions, and apprehend the street as territory, power relations offer the best take. In opposition to the children's power, city dwellers react against the street children's presence in the city centre and in the streets in general, to maintain their power in front of the children. Likewise, the presence of the children in the street disrupts the urban project of the authorities. Tensions and violence ensue, and take part in urban territorialisation process. Choosing the geographic entry to study the street children lead to a new reading of the separation between public spaces and private spaces, of the inside/outside dialectic and of the public space neutrality in the city.
- Le taureau marque son territoire (festivités taurines et identités territoriales du Sud-ouest européen à l'Amérique Latine) - Jean-Baptiste Maudet p. 361-387 La tauromachie, souvent confondue avec la seule corrida, regroupe en réalité une grande diversité de pratiques du Sud-Ouest européen à l'Amérique Latine. Qu'il s'agisse de la tauromachie professionnelle ou de la tauromachie participative, la fête et les taureaux semblent partout indissociablement liés. Cette relation qui mérite un examen critique peut être interprétée comme l'adaptation des fêtes taurines aux enjeux et au fonctionnement des sociétés contemporaines. Les divertissements taurins s'affichent alors comme de puissants marqueurs territoriaux à différentes échelles. La façon dont les diverses cultures taurines prennent formes et significations les unes par rapport aux autres permet d'identifier, de délimiter et de différencier une aire culturelle sous influence hispanique. Cette approche s'inscrit pleinement dans une réflexion plus générale sur la territorialité.When the bull marks its territory (tauromachy and associated festivities in Southwestern Europe and Latin America's regional identities) Often reduced to the better-known corrida de toros or bullfighting, tauromachy includes a great diversity of practices in Southwestern Europe and Latin America. Whatever are the tauromachy practices under consideration, professional or not, festivals and bulls are always associated in the stages of the regions. This systematic relation, which requires a cautious examination, can be interpreted as the tauromachy's adaptation to the stakes and functioning of contemporary societies. Moreover, on every stage tauromachy practices find a way to define and differenciate itself from the others. Tauromachy then acts as a powerful territorial marker on various geographical scales and contributes to identify, delimit and differentiate a cultural area under Hispanic influence. The chosen approach to study this phenomenon can be seen as being part of a more general investigation on territoriality.
- Le Tour de France ou le vélo géographique - Gilles Fumey p. 388-408 Le Tour de France est l'un des plus prestigieux et des plus géographiques monuments de l'identité française. Toujours en construction depuis un peu plus de cent ans. Reprenant les symboles des anciens tours, la course cycliste qui se veut d'abord une compétition sportive se mue rapidement en fête nationale dès lors qu'elle prend racine sur les frontières, dans des villes soigneusement sélectionnées pour leurs qualités géographiques. La montagne française, et ses infinies variations, forgent la légende du Tour dans l'effort et le combat que représentent ces étapes, souvent décisives pour l'issue de la course. Comme tous les héros modernes, les coureurs portent les couleurs des marques d'entreprise et des équipes nationales, mais l'internationalisation de la course a déclassé les Français ces dernières décennies, sans pour autant affaiblir le caractère français de la compétition.The Tour de France : a cycling geography The Tour de France is certainly one of the most famous and geographical symbol of the French identity. After more than a century of existence, its design remains an on-going process. At first a mere sportive event, this cycling race quickly turns into a national event as soon as it started to deal with France boundaries and the selection of significant cities. France's mountain ranges play an important part in the legend's built up. Steep slopes harden the competition and every racing cyclist needs to clear the obstacles if he hopes to win. As all modern heroes, cyclists wear trademarked shirts and national-coloured ones. During the latest decades, despite the globalization of the race has outclassed the French cyclists, it remains a French flavoured competition.
- Du paradis à Dream Park, les jardins dans le monde arabe : Damas, Le Caire, Rabat - Gaëlle Gillot p. 409-433 Évocations du paradis sur terre, les jardins arabo-musulmans, aménagés selon des règles relativement précises, ont voyagé et ont fécondé l'imaginaire de toute une région, et de l'Occident, tout en étant un élément constitutif et caractéristique des villes de cette aire géographique. Ils correspondent à une sorte d'âge d'or de la civilisation arabo-musulmane. Au XIXe siècle, un mouvement de modernisation des villes, soit recherché par les pouvoirs locaux soit imposé par les colonisateurs a introduit le jardin public et a induit dans l'aménagement urbain une rupture franche avec la tradition paysagère arabe. La représentation occidentale de la ville, hygiéniste et donc riche en jardins publics, est devenue le canon de la ville moderne. Ayant perdu leur symbolique de modernité pendant les années de croissance incontrôlée des villes, les jardins publics ont été abandonnés pour redevenir depuis les années 1970-1980, sous la forme d'espaces verts de nouvelles panacées aux maux urbains. Au cours de cette mutation de vocabulaire, ils ont également perdu leur sens d'espace public pour devenir des jardins dévoués aux distractions et ont été graduellement privatisés, ce qui a favorisé l'émergence de nouveaux types de lieux de loisirs, suréquipés, payants et sur le modèle de Disney Land. Ces trois phases des jardins correspondent à trois époques et à trois types de sociétés, et symbolisent une longue marche vers la perte de la spécificité arabe des villes.From Paradise to Dream Park, gardens in the Arab world : Damascus, Cairo, Rabat Evocation of Paradise on earth, Arab and Islamic gardens, organised according to well-defined precise rules, have reached the entire Western world and fueled its imagination ; it has also been a distinctive element of the cities in the Arab world. They are representative of a kind of “golden age” of the Arab civilisation. At the 19th century, a modernising movement in the cities, either wished or imposed by the colonizers, induced the public garden and induced in the urban organisation a clear rupture with the Arab landscaping tradition. The Western representation of the city, hygienist and rich of public gardens, became the model of a modern city. Having lost their modernity symbolic during the period of the enormous growth of the cities, public gardens were abandoned. Around the 1970's/1980's, they made a come back as green areas, new remedy for urban diseases. In this mutation of the vocabulary, they also lost their meaning as public space to become places for leisure time ; it went along the emergence of new types of leisure spaces, with a lot of equipments, paying, following the example of DisneyLand's park concept. Those three stages in garden's evolution correspond to three periods and three types of societies and symbolise a long-lasting process of lost of Arabic specificity of the cities.
- La territorialisation des politiques scolaires : l'exemple des collèges du bassin de Gap - Patrice Caro, E. Faivre, Frédéric Grosjean p. 434-448 Le bassin de Gap connaît un accroissement démographique en milieu périurbain, ce qui nécessite l'analyse de la carte scolaire afin de créer de nouveaux collèges. Ce bassin de population, marqué par des contraintes fortes, est un véritable espace vécu dans le sens où il est structuré par des aires de recrutement résultant des pratiques spatiales des élèves et de leurs familles. Une étude approfondie des structures et des dynamiques spatiales de ce bassin permet de tirer quelques leçons quant au fonctionnement d'un territoire scolaire.School policies' territorialisation : the example of junior high schools in the Gap basin The Gap area is experiencing a population growth in periurban zones, which requires the analysis of the school map in order to create new secondary schools. This population basin, marked by strong constraints, proves to be a true lived space : it is structured by recruitment areas stemming from spatial practices of school children and their families. A thorough study of the structures and spatial dynamics of this basin allows us to draw some lessons about the functioning of a school territory.