Contenu du sommaire : La fabrication du soignant au travail
Revue | Travail et emploi |
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Numéro | no 141, janvier-mars 2015 |
Titre du numéro | La fabrication du soignant au travail |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- La fabrication du soignant au travail : Introduction - Florent Schepens, Emmanuelle Zolesio p. 5-7
- La formation de l'objet du travail médical : L'exemple de la médecine générale et de la gynécologie obstétrique - Anne-Chantal Hardy p. 9-24 L'objet du travail peut être défini par ce qui donne du sens à une activité, compris à la fois comme sa direction et sa signification. Est-il possible de caractériser un objet commun du travail médical pour l'ensemble de la profession, dans un contexte où tous les médecins sont spécialistes et exercent des métiers très différents ? Après une interrogation sur l'objet du travail et les différentes façons de l'interroger, l'auteure tente de se saisir de la partie commune de cet objet, celle qui s'enseigne durant les six premières années d'études. Dans un second temps, l'étude de deux spécialités médicales, la médecine générale et la gynécologie obstétrique, montre deux formes d'évolutions différentes des objets du travail médical, fortement articulées à leur formation. Cela permet une problématisation de l'articulation entre formation pratique et formation théorique qui pourrait s'appliquer à l'ensemble des métiers de la santé, voire au-delà.The “work object” can be defined as what gives a sense and direction to a professional activity. So, can a common work object be determined for the medical profession as a whole, given that all doctors are specialists and perform very different jobs? After examining and questioning the concept, the author attempts to capture the common element of this object, taught during the first six years of study. She then analyzes two medical specialities, general medicine and obstetrics, and demonstrates two different developments of the medical work object, strongly based on their training. We can then question the relationship between practical and theoretical training as it applies to all health professions, if not other professions.
- Des modalités d'apprentissage brutes et brutales en chirurgie - Emmanuelle Zolesio p. 25-35 Rigueur morale de l'apprentissage et apprentissage de la rigueur technique sont indissociables en chirurgie, contribuant à centrer les débuts de formation des internes sur la seule dimension techniciste du métier. Ce n'est que dans un second temps que les chirurgiens apprennent à devenir soignants, notamment auprès d'autres soignants, infirmiers notamment. Mais, dans un premier temps, être socialisé à l'univers chirurgical, c'est inévitablement être socialisé aux rapports hiérarchiques et à la « sacro-sainte » rigueur professionnelle. La rigueur de l'apprentissage, qui passe à la fois par une exigence technique et une pression morale de chaque instant, est telle que l'on peut parler d'apprentissage « par claques » ou d'enseignement « à la dure » que les internes en formation ne manquent pas de ressentir violemment. Il s'agit dans cet article de rendre compte du processus de socialisation que les internes connaissent au cours des stages hospitalo-universitaires, socialisation qui est à la fois brute – s'exprimant avec peu d'euphémisation et de façon peu policée – et brutale – comprenant une part de violence psychologique et/ou verbale ressentie comme telle. À travers l'observation d'interactions in situ, nous verrons les modalités de l'apprentissage chirurgical dans des services hospitalo-universitaires.Educational rigor and technical rigor characterize the teaching of surgery and contribute to making students focus exclusively on the technicist dimension of their jobs. It is only at a second stage of their careers that surgeons learn to become healthcarers, thanks to other healthcarers, notably nurses. But first, to be socialized to the surgical environment means to be socialized to hierarchical relationships and to the “so famous” professional rigor. The educational rigor is both a technical requirement and a moral pressure of every moment, so that one can speak of learning “by slapping” or rough learning, that students have to put up with. This paper underlines the process of socialization that students go through during their training course in French hospitals called “CHU” (centre hospitalo-universitaire). This surgical socialization is carried out through rough and brutal methods, in an explicit and indisputable way and is made up of acknowledged verbal or/and psychological violence. This paper is based on observations in “CHU” hospitals.
- Le devenir des femmes en chirurgie : La diversité des mondes de socialisation - Régine Bercot p. 37-52 Comment expliquer que la chirurgie soit si peu attractive pour les femmes ? Dans quelle mesure leur absence est-elle rédhibitoire ? Les femmes de la génération actuelle entretiennent un rapport au travail très différent de leurs aînées. Majoritaires au concours d'entrée en médecine, elles sont peu attirées par la chirurgie, en tous les cas par certaines spécialités chirurgicales. On peut de fait y distinguer deux « mondes sociaux », se caractérisant par deux ethos différenciés dans lesquels les femmes s'insèrent puis font carrière. Le premier monde, celui de la chirurgie traditionnelle, est incontournable car il est au centre de la formation. D'autres spécialités développent, quant à elles, un ethos alternatif plus favorable à l'entrée des femmes, auxquelles elles ne peuvent toutefois accéder que par la suite. Étant donné les modalités d'un apprentissage effectué sur le mode du compagnonnage, l'accueil fait aux étudiants (externes et internes) et les interactions avec les chirurgiens seniors jouent un rôle essentiel sur l'envie de devenir chirurgien-ne. Nous verrons que les femmes doivent négocier leur identité sociale durant la formation pour se ménager l'aide des seniors et pouvoir supporter ce passage en chirurgie traditionnelle.How can the low number of women attracted by surgery be accounted for? How far can we say that their absence in that profession is unavoidable? The attitude to work of women of the present generation is a far cry from the attitude of their predecessors. Although they represent a majority among those who sit for competitive exams to become medicine students, few of them are actually attracted by surgery, or at least by some surgical specialities. It is possible to define two “social spheres”, with two different ethos, in which women engage and pursue their careers. The first sphere, that of traditional surgery, is pivotal as it is there that the training takes place. In other specialities an alternative ethos more open to women is to be found, though their access is not immediate. Given the forms of a training period that includes a modern version of trade guilds, the reception of students, be they non-resident students or house doctors, and the interaction with senior physicians play an essential part on their desire to become surgeons. It will be shown that women have to negotiate their social identity during the training period to secure the assistance of senior physicians and to safely make their way through this period in traditional surgery.
- Devenir professionnel en soins palliatifs : Bifurcations professionnelles, apprentissages et recompositions identitaires - Michel Castra, Florent Schepens p. 53-69 Comment décide-t-on de travailler auprès des malades en fin de vie et comment devient-on professionnel en unité de soins palliatifs ? Quels sont les profils des médecins, des infirmiers ou des aides-soignants qui s'engagent dans cet univers de soins particulier ? Cet article cherche à montrer qu'une approche par les trajectoires professionnelles et par la socialisation au travail permet de mieux comprendre les formes d'engagement et de professionnalisation auprès des malades en fin de vie. S'interroger sur les points de bifurcation et les réorientations professionnelles nécessite d'analyser ce qui peut provoquer ces changements dans la carrière. Il ressort de ce travail que la décision de s'impliquer dans les soins palliatifs témoigne avant tout d'une démarche engagée par les acteurs, et de la volonté de rompre avec la situation de travail antérieure ou de s'en distancier.How do you decide to work with terminally ill patients and how do you become a palliative care unit professional? What are the profiles of the doctors, nurses and auxiliaries who commit to that type of care unit? This article demonstrates that looking at career paths and socialization at work allows a better understanding of the different levels of commitment and professionalization of work with terminally ill patients. In order to analyse these career moves and shifts, it is necessary to understand what triggered them. What emerges from this study is that the decision to get involved in palliative care is an individual commitment as well as a desire to break free from a previous professional environment.
- Ludovic Cailluet, Yannick Lemarchand, Marie-Emmanuelle Chessel (dir.), Histoire et sciences de gestion : Paris, Vuibert, coll. « Fnege », 2013 - Olivia Chambard p. 71-72
- Corinne Gendron, Bernard Girard (dir.), Repenser la responsabilité sociale de l'entreprise. L'École de Montréal : Paris, Armand Colin, coll. « Recherches », 2013 - Pauline Barraud de Lagerie p. 73-74