Contenu du sommaire : Les philosophies écossaises : naturalismes et sciences de l'homme
Revue | Archives de philosophie |
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Numéro | tome 78, no 4, octobre 2015 |
Titre du numéro | Les philosophies écossaises : naturalismes et sciences de l'homme |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Scottish Philosophies. Naturalisms and the Human Sciences
- Les philosophies écossaises. Naturalismes et sciences de l'homme - Claude Gautier p. 587-596 Il s'agit de justifier l'un des fils conducteurs de cette présentation des philosophies écossaises : celui-ci repose sur l'esquisse des termes d'un dialogue avec Hume principalement centré sur la question de la possibilité d'une connaissance vraie. Discuter une telle possibilité engage, et c'est là l'une des particularités fortes de ces philosophies, une requalification des contours du naturalisme. Un naturalisme dont on peut dire qu'il est une voie presque systématiquement et toujours différemment explorée pour répondre à certaines des impasses de la philosophie classique. À partir de là, il est possible de présenter les choix adoptés dans la constitution de ce dossier ainsi que les contributions qui le composent.Scottish Philosophies: Naturalisms and the Human Sciences
My contention is to emphasize in what manner many Scottish Philosophers should be understood as dialoguing with Hume, especially on the possibility of a true knowledge. Such a possibility involves a re-examination of what is usually called naturalism in its relationships with classical rationalism. I shall then be able to present all the contributions as many attempts to underline aspects of such a naturalism on epistemological, ontological, and moral levels considering some of these Scottish Philosophers — particularly Hume, Reid, Hutcheson, Smith and Stewart. - La critique naturaliste du scepticisme humien chez Thomas Reid - Benoît Gide p. 597-613 Cet article montre comment le fait de la croyance irrépressible suffit, chez Reid, à la critique des doutes de Hume au sujet de la perception et de l'induction. Distinguant naturalisme psychologique descriptif et naturalisme épistémologique normatif, il montre comment le naturalisme humien peut être sceptique, pendant que celui de Reid en constitue la réfutation. Il défend l'idée que la critique naturaliste reidienne du scepticisme a une dimension purement épistémologique, indépendante de toute présupposition métaphysique.Titre en anglais: Reid's Naturalist Critique of Hume's Skepticism
This paper shows how irrepressible belief is a sufficient fact, for Reid, to repudiate Hume's doubts concerning perception and induction. Distinguishing between psychological descriptive naturalism and epistemological normative naturalism, it shows how Humean naturalism can be skeptical while Reid's naturalism counters skepticism. It advocates the idea that Reid's naturalist critique of skepticism has a purely epistemological side, independent of any metaphysical assumption. - Naturalisme et culture de l'esprit chez Dugald Stewart - Claire Etchegaray p. 615-629 On se propose de comprendre dans cet article le lien établi par Dugald Stewart entre la philosophie de l'esprit (l'étude des pouvoirs naturels de l'esprit) et la défense d'une culture de l'esprit (par l'éducation « libérale » et les réformes politiques). Pour ce faire, on rappelle dans un premier temps la spécificité du naturalisme théiste, anti-sceptique, développé par Reid et Stewart. Puis l'on montre comment le naturalisme de la philosophie du sens commun se concilie avec le perfectionnisme qui anime les considérations politiques de Stewart dans les Éléments de philosophie de l'esprit humain. Malgré sa fidélité à l'inspiration reidienne, il faut relever d'importantes divergences entre sa philosophie de l'esprit et celle de son maître, divergences qui s'expliquent par l'attention renouvelée qu'il prête à la pratique des opérations de l'esprit, en tant qu'elle développe des habitudes et des dispositions mentales. La philosophie de Reid n'était pas dépourvue de pragmatisme, si bien que Stewart a pu croire qu'il en accomplissait le projet, sur certains points, mieux que Reid lui-même.Dugald Stewart on Naturalism and the Culture of the Mind
This article considers Stewart's entwined treatment of the philosophy of the mind (examining the natural powers of the mind) and the intellectual culture of the mind (involving the promotion of “liberal” education and political reforms). In the first section, I recall some particular features of this treatment as compared with the philosophies of Thomas Reid and David Hume. Then I examine the connection between the naturalism of the philosophy of Common Sense and the perfectionism behind Stewart's political stance in his Elements of philosophy of the human mind. Despite Stewart's inheritance of Reid's philosophical system, he departed from Reidian themes in interesting ways. These differences arise from the renewed attention Stewart paid to the practice of mental operations, insofar as it leads to mental habits and natural dispositions. In so doing, Stewart may have seen himself as refining Reid's version of Scottish common sense philosophy, by reworking a systematic methodology in a more pragmatic way – but a way that Reid himself had opened. - L'homme introuvable. Fondements et limites du discours anthropologique chez Adam Ferguson - Patrick Vieu p. 631-648 Comprendre les ressorts psychologiques et anthropologiques du progrès pour en maîtriser le cours : tel est le projet politique et moral de l'Essai sur l'histoire de la société civile publié par Adam Ferguson en 1767. Empruntant à Thomas Reid son axiomatique du sens commun, Ferguson assoit son projet sur un fondationnalisme naturaliste visant à rendre possible, contre le scepticisme de Hume, l'édification d'une science de la nature humaine. Ainsi fondé, le discours anthropologique qui se déploie à la surface de l'Essai prétend mettre en évidence les « lois physiques de l'esprit » à partir de l'observation des pratiques humaines. Mais en imposant l'évolutionnisme d'une histoire « rationnelle » à la réalité des faits observés, ce discours autoréférentiel finit par abolir l'objet même de sa recherche : l'homme.The Undiscovered Man. Foundations and Limits of the Anthropological Discourse in Adam Ferguson
To understand the psychological and anthropological springs of progress in order to take control of its course: this is the political and moral project of An Essay on the History of Civil Society published by Adam Ferguson in 1767. Borrowing from Thomas Reid his axiomatics of common sense, Ferguson bases his project on a naturalist fondationalism which aims at making possible, against Humean scepticism, the building of a science of human nature. Thus founded, the anthropological discourse which spreads out across the Essay intends to find the “physical laws of the mind” from the observation of human practices. But by imposing the evolutionism of a “rational” law on the reality of the facts observed, this self-referential discourse ends up abolishing the very object of its quest: man itself. - Le sentimentalisme écossais et le problème de la normativité morale - Samuel Lépine p. 649-666 Dans cet article, je montre qu'il existe des désaccords épistémologiques forts entre deux figures majeures du sentimentalisme écossais, Francis Hutcheson et Adam Smith, à propos de la normativité morale. Tandis que le premier défend l'existence d'un sens moral naturel, le second soutient que nous développons notre connaissance des normes morales socialement, par sympathie avec les sentiments de nos semblables et la représentation d'un spectateur impartial. Je soutiens qu'en dépit de leurs efforts, ces deux auteurs ne parviennent pas à spécifier clairement ce que sont réellement les normes morales, et qu'ils tentent d'échapper au relativisme moral sans véritable succès. Je suggère enfin que ces difficultés constituent un défi important pour le sentimentalisme moral.Scottish Sentimentalism and the Problem of Moral Normativity
In this paper, I show that there are strong epistemological disagreements between two leading figures of the Scottish sentimentalism, Francis Hutcheson and Adam Smith, about moral normativity. Whereas the first one defends the existence of a moral sense, the second argues that we develop our knowledge of moral norms socially, through our sympathy with other people feelings and the representation of an impartial spectator. I argue that, despite their efforts, both those two authors fail to say clearly what really moral norms are, and that they try to escape moral relativism without any true success. I suggest that those difficulties constitute an important challenge for moral sentimentalism. - David Hume : la philosophie et les savoirs - Éléonore Le Jallé p. 667-678 Dans le Traité de la nature humaine, Hume identifie la philosophie à la science de la nature humaine et la présente comme une science capitale : c'est à partir d'elle que les autres savoirs pourront être conquis. Dans les Essais moraux, politiques et littéraires, un autre rapport de la philosophie et des savoirs se fait jour. C'est désormais en philosophe politique que Hume s'intéresse aux rapports réciproques unissant l'état des sciences et des savoirs aux conditions politiques de la société où ils naissent, progressent ou déclinent. L'article montre comment ces deux modalités du discours philosophique de Hume sur les autres savoirs s'articulent.David Hume: Philosophy and the Branches of Knowledge
In A Treatise on Human Nature, Hume identifies moral philosophy with the science of Human Nature and he maintains that such a science is capital, since the other provinces of knowledge are to be conquered from it. In his Essays Moral, Political and Literary, Hume explores a new link between philosophy and the other forms of knoweldge. He examines the reciprocal relations between the state of the arts and sciences and the political conditions of the society in which they rise or decline. The present paper shows how these two aspects of Hume's philosophical discourse on the other sciences are interlocked. - Le totémisme et sa trace. Comment la psychanalyse pense l'histoire - Bruno Karsenti p. 679-704 On s'efforce ici de lire philosophiquement Totem et Tabou, l'un des livres les plus décriés de Freud, et d'en restituer les thèses cardinales, non seulement sur le meurtre du père, mais sur la transmission des phénomènes psychiques et, en conséquence, sur les concepts corrélatifs de culture et d'histoire. On prend pour cela appui sur un élément singulier de la construction freudienne : le décalage entre les deux traces inégalement marquées du totem et du tabou, encore repérables dans la constitution des sociétés modernes à travers la structure de nos interdits moraux et les traits de la névrose obsessionnelle. En suivant ces traces, on voit alors se dessiner une pensée proprement psychanalytique de l'histoire, comme condition d'existence des sociétés dans lesquelles le totémisme, avec l'articulation qu'il implique entre pensée et réalité, n'a plus cours.Totemism and its Trace. How Psychoanalysis Thinks about History
This paper proposes a philosophical reading of Totem and Taboo, one of the most vilified Freud's books. It presents its main theses, not only on the killing of the father, but also on the transmission of psychic phenomena, and on the correlative concepts of culture and history. The paper is based on a particular element of the Freudian elaboration: the discrepancy between both traces of totem and of taboo, still recognizable in the constitution of modern societies through the structure of moral prohibitions and the features of obsessional neurosis. Following these traces, we can see that a really psychoanalytic thinking of the history is taking shape, as a condition of existence for societies in which totemism – and its articulation between thinking and reality – is no longer in use.
- Les philosophies écossaises. Naturalismes et sciences de l'homme - Claude Gautier p. 587-596
Bulletin de littérature hégélienne XXV. Bulletin de bibliographie spinoziste XXXVII