Contenu du sommaire : Le locuteur natif.

Revue Histoire, Epistémologie, Langage Mir@bel
Numéro Vol. 35, no 2, 2013
Titre du numéro Le locuteur natif.
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Le locuteur natif. Valelia Muni Toke (Ed.)

    • Articles
      • Le locuteur natif et son idéalisation : un demi-siècle de critiques - Muni Toke V. p. 5-15 accès libre
      • Is the native speaker dead? - Davies A. p. 17-28 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
        Thomas Paikeday (1985) était à n'en pas douter en colère lorsqu'il a publié son attaque contre le locuteur natif. Bien d'autres l'ont suivi sur ce point, assurant que l'on n'avait plus besoin de recourir à la norme du locuteur natif, et que l'on pouvait trouver d'autres modèles dans les différentes variétés d'anglais dans le monde («World Englishes » ), dans les apprenants avancés de langues secondes, et, ce qui est une proposition plus radicale, dans les langues ayant fonction de lingua franca – l'anglais par exemple. Explorant les arguments de sociolinguistes, de spécialistes de l'éducation, mais également de psycholinguistes et de spécialistes de l'acquisition en langue seconde, cet article pose quatre questions : 1. L'anglais constitue-t-il un cas spécifique ? 2. que peut faire le locuteur natif que le nonnatif ne pourrait pas faire ? 3. quelle est l'importance de la culture ? 4. Une langue peut-elle survivre sans locuteurs natifs ? La conclusion est que les modèles, échelles et examens qui utilisent le critère du locuteur natif ne le comprennent pas dans son sens le plus commun – n'importe quel locuteur natif. Ce à quoi ils se réfèrent est une version idéalisée du locuteur natif.
        Thomas Paikeday (1985) was undoubtedly angry when he published his attack on the native speaker. Many others have subsequently agreed with him, maintaining that we no longer need the native speaker as a norm, that there are models in World English varieties, in proficient second language speakers and even, more radically in lingua franca varieties such as English as a Lingua Franca. Exploring the argument of sociolinguistic and educational scholars but also of psycholinguistic and Second Language Acquisition scholars, this paper raises four questions : 1. Is English a special case ? 2. What can the native speaker do which the non-native speaker cannot ? 3. How important is culture ? 4. Can a language survive without native speakers ? The conclusion is that models, scales, examinations which use as criterion the native speaker do not mean any or all native speakers. What they mean is the (idealized) native speaker.
      • Le corps du locuteur natif : discipline, habitus, identité - Joseph J.E. p. 29-45 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
        La question fondamentale est la suivante : comment le locuteur natif a-t-il cessé d'être un concept utile dans l'analyse et la pédagogie linguistiques, pour devenir un symbole d'oppression ? A-t-il toujours représenté une oppression, mais qui n'aurait pas été reconnue comme telle ? Ou bien d'autres changements, d'ordre social en particulier, ont-ils modifié ses conditions d'application, de telle sorte que l'oppression ne s'est fait sentir que progressivement ? Et notre perception du concept comme une oppression est-elle un produit temporaire de notre façon actuelle de voir les choses ? En posant ces questions dans une perspective historique, cet article montre que la notion bourdieusienne d'habitus aide à comprendre comment l'ensemble des pratiques que nous appelons «une langue » devient, en partie, incorporé, physiquement matérialisé en nous. Les normes linguistiques existent dès lors pour empêcher les locuteurs de parler «nativement » , c'est-à-dire, corporellement. Voilà la discipline ultime : la mortification de la chair langagière. La «langue standard » apparaît donc comme ce que nous avons de plus proche du langage des anges, ces êtres sans corps.
        How did the native speaker, having being considered a useful concept in linguistic analysis and pedagogy, finally become a symbol of oppression ? Has it always represented an oppression – but one that wasn't recognized as such ? Or did other changes, social changes in particular, modify the applicability conditions of the concept, so that the oppression was felt progressively ? Is our contemporary perception of the concept as an oppresion a temporary product of our present way of seeing things ? Raising these questions in a historical perspective, this paper shows how Bourdieu's notion of habitus sheds some light on how the practices that we name “ a language” become partly embodied, physically materialized in us. Linguistic norms thus exist in order to prevent speakers from speaking “ natively” – i. e., bodily. This is the ultimate discipline : the mortification of the flesh. The “ standard language” therefore appears the closest we have to the language of angels, these beings without bodies.
      • From native speakers to "new speakers" - problematizing nativeness in language revitalization contexts - O'Rourke B., Pujolar J. p. 47-67 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
        Dans le champ de la linguistique appliquée, le concept de locuteur natif est reconnu comme problématique depuis plusieurs décennies. Sa problématisation est néanmoins plus récente dans d'autres sous-champs des sciences du langage – comme celui des langues minoritaires et de la revitalisation des langues, auquel nous nous intéressons plus particulièrement dans cet article. Les chercheurs qui travaillent sur les langues de communautés minoritaires, comme l'irlandais, le basque, le gallois, le corse, etc., et les processus de changement linguistique et de revitalisation qui leur sont associés, ont dans l'ensemble eu tendance à privilégier l'étude des communautés «natives » . Une attention bien moindre a été portée au locuteur «non natif » , ou à celui que nous appelons ici «néolocuteur » . Nous examinons les raisons de cette situation, et en quoi le traitement du «natif » dans ce sous-champ disciplinaire correspond aux débats épistémologiques plus larges autour du concept de «locuteur natif » en linguistique appliquée et dans les sciences du langage en général.
        Within the field of applied linguistics the concept of nativeness has over the recent decades come to be recognised as problematic. The problematization of the native speaker concept has, however, been more recent in other areas of language analysis including the field of minority language research and language revitalization, the sub-field on which we will focus here. Researchers interested in minority language communities such as Irish, Basque, Welsh, Corsican etc., and associated processes of language shift and revitalization, have by and large tended to focus much of their attention on native and/ or heritage communities. Significantly less attention has been given to non-native or what we are referring to here as “ new speaker” varieties and categories. In this paper we are interested in examining why this has been the case and how the treatment of nativeness in this subfield fits with the broader epistemological debates around the native speaker concept in the field of applied linguistics and linguistics more generally.
      • Native speaker: from idealization to politicization - Muni Toke V. p. 69-93 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
        Par politicisation, j'entends un processus qui conduit à faire du locuteur natif une notion porteuse d'idéologies politiques du langage. Entrepris à la fin des années 1960 par la critique approfondie que fait Hymes du locuteurauditeur idéal (Chomsky 1965), ce mouvement prend une dimension globalisée avec l'émergence de «voix subalternes » des situations postcoloniales – un phénomène qui se traduit en linguistique appliquée par la reconnaissance progressive des «World Englishes » . Même si elle est centrale dans bien des travaux, la politicisation de concepts linguistiques n'est pas sans poser des problèmes aussi bien pratiques que théoriques, ce dont les chercheurs sont explicitement conscients. En ce sens, l'objectif de cet article est également de montrer que la politicisation du terme locuteur natif mène paradoxalement, dans une certaine mesure, au rejet du politique hors du champ de la théorie scientifique. En d'autres termes, locuteur natif ne serait pas une catégorie valide en linguistique, précisément parce qu'elle serait plus politique que scientifique. Politiciser le terme serait dès lors une manière de diminuer sa pertinence scientifique en mettant en valeur sa dimension idéologique : le locuteur natif serait avant tout une idéologie de l'état-nation.
        By politicization, I refer to a process that leads to the fact that native speaker, as a linguistic categorization, is said to be conveying political ideologies about language. Initiated in the late 1960s by Hymes's searching critique of the ideal speaker-listener (Chomsky 1965), this movement was to be taken to a globalized level with the “ emergence of subaltern voices” in postcolonial settings – a phenomenon that is translated as the “ rise of World Englishes” in the field of applied linguistics. Even if central in many current bodies of work, the politicization of linguistic concepts does not go without practical as well as theoretical problems of which researchers are obviously aware. In that sense, the goal of this paper is also to show that the politicization of the term native speaker leads, paradoxically, to the rejection of politics outside the boundaries of scientific theory to a certain extent. In other words, native speaker would not be a proper category for linguistics precisely because it is more political than scientifically accurate. Politicizing the term would then be a way of lessening its scientific relevance by emphasizing its ideological dimension : native speaker would primarily be an ideology of the nation-state.
    • Varia
      • Le traitement de la comparaison dans les grammaires du français des XVIe et XVIIe siècles - Fournier N. p. 97-132 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
        Cet article s'inscrit dans le champ de la grammatisation du français et s'intéresse au traitement de la comparaison tel que l'ont élaboré les grammaires du français des XVIe et XVIIe siècles, en adaptant la tradition latine de la comparatio. Il s'agit de montrer les difficultés rencontrées par les grammairiens pour élaborer un modèle «français » de l'expression du degré des adjectifs et des adverbes. L'article retrace les étapes de l'élaboration de ce modèle : construction des catégories du comparatif de supériorité, d'infériorité et d'égalité, adaptation de la catégorie du superlatif, traitement syntaxique et sémantique des structures comparatives, et montre comment cette élaboration impose de renoncer à l'autorité et à la cohérence du paradigme morphologique ternaire du latin.
        This paper deals with the linguistic treatment of comparison, as elaborated by the French grammars of the 16th and 17th century, by adapting the Latin tradition of comparatio. It enhances the difficulties encountered by grammarians when elaborating a “ French” model for the degree of adjectives and adverbs. The paper will show how they elaborated the comparative degrees of superiority, inferiority, equality, adapted the category of superlative, and dealt with the syntactical and semantic configurations of comparative structures ; and how, thus doing, they had to abandon the authority and coherence of the Latin morphological paradigm.
    • Lectures et critiques