Contenu du sommaire : Figures de la violence

L'inflation de la violence observée dans certaines pratiques artistiques contemporaines interroge le psychanalyste sur le rapport qu'entretiennent ces artistes avec une violence qui apparaît de moins en moins médiatisée par le travail de la représentation.Partant de ce constat, l'auteur retrace l'évolution de l'expression de cette violence dans l'art et plus particulièrement dans la peinture depuis le Moyen Âge jusqu'à nos jours. Cette évolution témoignerait selon les historiens de l'art d'une « crise de la représentation » dont on pourrait retrouver les effets dans certaines pathologies actuelles liées notamment à des défauts de symbolisations secondaires.

À partir du cas clinique d'un adolescent qui recourt à la tentative de suicide, il s'agit d'interroger l'essence de la violence pubertaire en plongeant au cœur du fantasme nécessairement convoqué par le processus adolescent. Or, le berceau du fantasme ainsi réactivé signe les prémices d'une tentative de mise en forme d'une conflictualité qui fait d'abord converger les logiques de la vie et de la mort en une rencontre éclatante. La violence agie pourrait ainsi avoir pour terreau un fantasme infanticide resté prégnant dans l'organisation du fantasme de scène primitive, à la faveur de difficultés de différenciation, d'où sa teinte paranoïde.

Nous avons tenté de montrer à travers l'analyse d'un cas de cure analytique, que les comportements violents de certains psychotiques ne sont pas seulement la conséquence d'une relation agressive et ravageante avec l'autre spéculaire (soi-même ou le prochain), antichambre d'un rapport de persécution avec le monde extérieur, mais une défense. Celle-ci n'a pas la solidité d'une suppléance symbolique, mais elle peut maintenir le sujet, pour un certain temps, dans une « hésitation structurelle », autrement dit, sur le seuil d'une structure clinique avérée, la paranoïa. La violence peut devenir une forme de « traitement » pour le psychotique, lorsque celui-ci arrive à la transformer, à en faire une béquille pour son existence.

Cet article se donne pour objectif de comprendre le trajet qui mène une mère à donner la mort à son enfant et le pourquoi d'un tel acte au cours duquel la pulsion de mort annihile la pulsion de vie. Plus précisément, il s'agit d'interroger la fonction de l'agir filicide de ces mères pour lesquelles l'expérience de construction du lien primaire s'est révélée nocive et a induit une souffrance non représentable, mettant en échec le sujet dans ses capacités subjectivantes et identitaires. À partir d'un cas clinique, nous interrogeons la fonction psychique de l'agir filicide au regard de l'histoire individuelle. Pour ce faire, nous étudions les aléas de la subjectivation féminine dans ses rapports au féminin/maternel et au masculin/paternel. Enfin, nous discutons des enjeux transféro-contre-transférentiels dans la rencontre et le travail thérapeutique avec une mère auteure du meurtre de son enfant.

Au-delà de la thèse classique sur l'effondrement du sujet dans le passage à l'acte psychotique, notre article met en évidence l'importance de l'histoire récente avec laquelle le sujet se débat. Cette histoire qui se structure autour d'un problème indiqué par la présence de l'angoisse ne fait pas seulement que donner sens à l'acte, mais elle participe à son déclenchement. Après qu'il ait cherché différentes solutions alternatives avec l'aide de son milieu, il développera un délire une fois qu'il ne trouvera plus d'intermédiaires pour adresser son problème au père. C'est dans un délire surdéterminé par l'histoire qui le précède qu'il trouvera dans un animal l'autorisation pour littéralement exploser jusqu'à en perdre connaissance. Cet article, par une méthodologie qualitative originale, éclaire sous un nouveau jour le passage à l'acte psychotique.

Les auteurs, un psychiatre et une psychanalyste travaillant en co-thérapie, présentent un cas de clinique de couple relevant des états limites. Repartant des possibilités qu'offre le cadre particulier d'une co-thérapie, ils proposent des pistes pour tenter de sortir des impasses de ce travail qui ne permet pas l'appui sur le refoulement secondaire comme dans la névrose. Pour ce faire, ils empruntent deux voies différentes bien que complémentaires, Roussillon et Winnicott pour l'une, Minkowski et Lacan pour l'autre, afin de tenter de penser ce qui a sous-tendu leur travail clinique et de donner sens à l'espace de la violence et à la violence de l'espace.

Témoignage d'une psychiatre en formation, cet article décrit diverses formes de violences rencontrées en psychiatrie, au travers de situation concrètes du quotidien.

Les difficultés engendrées par la dramatisation du roman familial à l'adolescence et la violence des agirs les attestant finissent par décontenancer les professionnels de la protection à l'enfance dans leur propre rapport au roman de l'institution. L'(af)filiation professionnelle s'en trouve complexifiée par des injonctions paradoxales qui grèvent leur pratique et par des pactes défensifs de groupe qui entravent la compréhension et la gestion de la violence des adolescents en quête de leur place dans la filiation.Un cas issu de notre pratique clinique montre comment l'échec à interpréter son roman familial par une adolescente adoptée puis “placée”, révèle la fixation clôturante d'une équipe éducative à sa propre (pré)histoire institutionnelle idéalisée.

Certains professionnels travaillant dans des lieux publics se trouvent confrontés à la complexité de la rencontre avec les adolescents. Lorsque les difficultés rencontrées ne trouvent pas ou plus à se réguler, ni à se partager en équipe, la souffrance s'entend alors à différents niveaux : souffrance dans les liens avec le public, souffrance dans les liens d'équipe, et souffrance de l'identité professionnelle.Quel peut-être alors le travail d'accompagnement de ces professionnels qui n'ont pas directement de fonction éducative ou de soin auprès du public ? Quelle écoute et quel dispositif proposer ? Il sera présenté ici un dispositif clinique original d'écoute et d'accompagnement psychologique d'agents d'une piscine municipale, en difficulté dans l'accueil d'adolescents et de jeunes adultes. Les nouvelles formes de demandes adressées à des cliniciens nécessitant d'adapter les cadres de travail, nous tenterons de montrer comment les évolutions du dispositif proposé ont permis à la fois un travail de figuration et d'élaboration des mouvements psychiques à l'œuvre dans le groupe. Nous éclairerons en quoi la mise en place d'un « temps de parole », en appui sur la fonction contenante et conteneur des cliniciens, a favorisé la reprise de la capacité à accueillir les adolescents.

Basé sur une analyse des récits de l'après-guerre au Burundi, cet article met en exergue une récurrence de la violence des ex-combattants. Il soutient que l'après-guerre ne va pas de pair avec le renoncement aux habitudes violentes d'autant plus que l'arrêt de la guerre est plus une décision politique qu'une réelle volonté de déposer les armes. L'article souligne aussi que la démobilisation découle plus de la désillusion et du désenchantement par rapport à la vie combattante et/ou à la carrière militaire que d'un véritable abandon de la violence. Il met en évidence que l'après-guerre est plus une façon de dire qu'une réelle manière de vivre.

Dans cet entretien, Maurice Berger développe certains aspects de son dernier livre « Soigner les enfants violents ». À partir de recherches qu'il mène dans son service spécialisé dans la prise en charge des enfants et préadolescents de plus en plus nombreux qui présentent un comportement extrêmement violent, il montre que cette pathologie grave a des origines multifactorielles et qu'elle s'inscrit dans une histoire personnelle et transgénérationnelle de négligence et de violence. Les processus psychiques présents derrière ce symptôme sont complexes. L'auteur propose une description précise des dispositifs thérapeutiques qui allient contenances institutionnelle, corporelle et pédagogique, couplées à un dispositif d'écoute intensif.